Un petit vent de passage [PV : Anamée Sapphirshooter]

Une tête aux cheveux bleus, désordonnés, passa par dessus le stand de fromages. Quelques pics se penchèrent sur le côté, suivant le mouvement du cou, tandis que Hermès observait la nourriture, intrigué. Il trouvait toujours amusant le fait que, dans la plupart des cas, les fromages étaient en grande partie composés de microbes, de pourritures, de champignons, bref de plein de petites choses invisibles à l'oeil nu, et qui pourtant rendaient le goût de l'aliment très bon. Mais il avait beau être un Dieu, il n'était pas plus doué que les humains pour la vision et ne distinguait pas vraiment les petites bestioles. Ce qui n'empêchait pas d'essayer. Au fond, les mortels étaient un peu comme ces acariens et autres choses du même genre : nombreux, à l'allure insignifiante, et pourtant ils donnaient un bon goût à la vie. Parfois, ils étaient très amusant ! Surtout quand on les embêtait.

D'ailleurs, le Dieu messager eut un petit sourire presque mauvais, du genre qu'ont ceux qui préparent des mauvais coups, en regardant la femme qui tenait le stand. Elle observait ce jeune homme à l'apparence tout à fait banale, vêtu d'une chemise bleu foncé, ouverte sur un t-shirt blanc, et un jean noir un peu fatigué d'avoir été beaucoup porté. L'avantage était ses jambes, qui devenaient larges au niveau des pieds, et permettaient ainsi de dissimuler les petites ailes de ses chaussures. Personne ne pouvait savoir qui il était, à moins de le connaître déjà. Il était plutôt mignon, mais la femme se méfiait, il regardait ses fromages depuis un bon moment sans rien faire. C'était louche !

Une cliente se présenta et la femme abandonna Hermès pour se concentrer sur elle. Lui eut un sourire tout à fait innocent, puis regarda distraitement les fromages. Il se pencha un instant sur eux, pour les sentir apparemment, puis haussa les épaules et repartit tranquillement, les mains dans les poches de sa chemise ouverte. Il traîna entre les autres stands, jusqu'à disparaître de la vue de la femme aux fromages, puis marcha encore quelques minutes avant de s'arrêter et de sortir les mains de ses poches. Chacune tenait un petit fromage de chèvre, style crottin. Il les trouvait mignons ! Il croqua dans l'un, mangeant la moitié, et reprit sa marche, satisfait de son vol. Il fallait bien s'échauffer un peu pour la journée !

Tout en se baladant et en faisant disparaître les preuves de son méfait, Hermès aperçut un stand de boucherie. Hum plus délicat, car il y avait une protection devant la viande. Mais ça pouvait être un challenge intéressant. Et puis, le temps était idéal pour jouer un peu. Finissant ses fromages, le Dieu remit les mains dans les poches de sa chemise et s'avança pour observer les différentes viandes. Voyons... tiens, ce gros jambon serait parfait. La queue pour se faire servir était longue, il avait largement le temps de s'amuser. Observant sa proie, il se mit à se concentrer tranquillement, regroupant son énergie pour provoquer une petite brise, toute légère et banale. Sauf qu'une partie commençait à tourner autour du jambon, pour le soulever discrètement et l'approcher du bord droit du stand. Là ou la protection était la plus basse. Et accessoirement, où se trouvait Hermès, qui regardait en toute innocence.

[HRP : tu as oublié le "PV", derrière le titre :P]

Et voilà, encore une matinée passée à voler. Mais pas n'importe quel vol, non ! Sans ça, je serais morte de faim depuis pas mal de temps. Ou d'autres choses, allez savoir ... En tout cas, bien que je n'aimais pas vraiment être malhonnête ainsi, c'était devenue une habitude, au fil des jours. Je ne me posais même plus la question de savoir si c'était honnête ou non. Oui, j'était devenue une voleuse. Et le pire, c'est que ça me plaisait bien.
Enfin, c'était surtout drôle, pour moi. Les marchants ne se méfiaient pas vraiment, vu mon apparence. Qui aurait douté d'une jeune fille au visage enfantin dont rien n'était de travers ? Encore une fois, elle devait cette allure a nombreux vols de vêtements qu'elle avait effectuer. Après que les vendeurs soient dans une sorte de confiance, rien de plus simple : soit River attirait son attention -vous voyez souvent des lumières bleues se balader dans un marché, vous ? -, soit la personne était assez stupide pour tout laisser sans surveillance et surtout à portée de ma main. A la fin, vous vous en doutez, tout fini dans le sac que je porte constamment en bandoulière.
J'avais décidé de prendre assez ce matin pour toute la semaine à suivre et, le moins qu'on puisse dire, c'est que les, hum, "emprunts" remplissait bien la moitié du sac. Il ne lui manquait plus qu'à aller voir du côté de la viande et, accessoirement, chez le vendeur de chaussures. Je gardais toujours le boucher pour la fin car c'était le stand le plus difficile à voler. Pour lui, j'utilisais une technique différente et plus risquée, mais pour le moment, je n'avais pas eu le temps de réfléchir à quelques chose de plus poussé.
Je me rapprochais du stand et le boucher me sourit. Il avait vraiment l'air d'un idiot, comme ça, mais je me forçais à lui répondre par la même chose. Question de survie, vous comprenez ? Je fis le tour, sentant son regard dans mon dos. En fait, c'est surtout River, loin de moi pour pas me faire repérer, qui me décrivait le visage que tirait le marchant. Merci pour tout les détails, River. Cet affilié ... Je passais sous la camionnette stockant la viande, et, comme d'habitude, je la trouva fermée. L'espoir fait vivre.
Mais place au plan B -bien que le A n'ai jamais fonctionné-, c'est à dire aller directement "emprunter définitivement" sur le stand. River se montra utile ici en lui indiquant le morceau le plus facile à avoir, à droite du stand. Aussi rapidement que je le pu, je m'étais emparée de la viande - du jambon -, quand je remarqua un jeune homme qui me fixait maintenant, comme surpris. Enfin, ce genre de scène ne se voit pas tous les jours, aussi. Je restais quelques secondes devant l'homme aux étranges cheveux bleus avant de courir de toutes mes forces, de peur qu'il me vole mon butin ou qu'il me dénonce au boucher.
Je couru de toute mes forces, mettant mon vol dans mon sac et voyant River me rejoindre en quelques battements d'ailes. Je n'entendais aucun bruit derrière moi mais mon souffle et mon rythme cardiaque faisait tellement de bruit que c’en était presque normal. Le loup voulu prendre les commandes et je lui laissais le loisir de courir : un humain face à un loup, on connait le plus rapide. Il nous mis à quatre pattes, transformant tout ce qu'il fallait pour aller vite. Il fallait juste le semer.

Allez, encore un petit peu, et Hermès aurait le jambon à portée de main. Lentement, doucement, mais sûrement, la proie arrivait. Sa vitesse d'approche était très discrète, personne ne faisait attention au morceau de viande, c'était parfait, et presque trop facile. Mais il n'eut pas le temps de l'attraper : une femme assez jeune lui passa devant et... attrapa le jambon ! Non mais c'était quoi ce bins ? Hé, c'était SA proie ! D'où elle sortait celle-là ?

Il haussa les sourcils, surpris. Une voleuse, elle aussi ? Le regard bleu clair du Dieu observa un instant celui bleu azur de la fille. Elle semblait hésiter un instant, craignant sans doute sa réaction. C'est sûr qu'une personne normale hurlerait probablement au vol. Mais lui ne risquait pas d'agir ainsi : ce serait perdre son jambon à coup sûr ! Il n'eut pas le temps de dire quoi que ce soit : la jeune femme engloutit sa proie dans un sac et se mit à courir à toute allure pour lui échapper. Non mais et puis quoi encore ? Hors de question de la laisser filer ! Hop, il se dépêcha de courir à sa poursuite, assez normalement pour éviter de se faire trop remarquer par les mortels.

Tiens, Hermès aperçut une lueur bleue bizarre qui rejoignit sa voleuse. Un affilié ? Possible, mais pas spécialement important, du moins pour le moment. Et nettement moins intéressant que ce qu'il vit ensuite : les quatre membres de la fille se transformèrent en pattes d'animal, à priori de loup ou quelque chose du genre, avec une fourrure noire dessus. Une lycanthrope ? Il en sourit, amusé. Ca restait une mortelle, mais ça s'annonçait bien plus amusant que prévu ! Il avait un petit challenge à relever maintenant. Puisque la mortelle avait changé partiellement de forme devant tout le monde, il n'en avait plus rien à faire d'être discret. Au pire, on le prendrait pour un mage, et puis voilà !

Allez, hop, le Dieu laissa son corps répondre au défi et il accéléra de façon plus qu'impressionnante pour les mortels du marché. Agile, il n'avait aucun mal à esquiver les personnes sur la route, enfin le peu qui restaient sur le chemin, la plupart étant effrayés par l'humaine à moitié animal qui déboulait à toute allure. Elle était également rapide, mais il arrivait à maintenir le rythme sans la perdre et, petit à petit, à la rattraper. Bon, il aurait pu jouer comme ça longtemps, car elle n'était pas facile à rejoindre. Mais il devait récupérer son jambon ! Alors, déterminé, il se concentra en continuant de courir et un vent fort se leva juste devant la demi-humaine, la fouettant en pleine face, sans lui faire mal, simplement pour la stopper net, et peut-être la sonner légèrement.

C'était pas bon. Du tout.
Le loup prenait peu à peu l'avantage sur moi. Je n'aurais jamais dû le laisser prendre le contrôle, même pour aller plus vite. Ça restait un jambon. Un morceau, en plus, même pas un entier. A se demander s'il valait vraiment la peine d'être autant protégé. Mais de toutes façons, c'était trop tard. Je sentais l’instinct du loup étouffer les réflexions de mon cerveau, le bout de mes membres commençaient à fourmiller pour finalement échapper à mon commandement. Je combattais de toutes mes forces cette sensation d'être emprisonné, comme durant de longues années dont je ne me rappellais pas. J'étais prête à tout pour ne pas revivre ça. Et ce n'était sûrement pas pour un jambon que j'allais m'y résoudre.
- Que fais-tu ? Je suis plus forte que toi, de toute manière. Mais comme je suis gentille aujourd'hui, je te laisserai la vue, tu ne veux pas rater ce beau garçon, non ?

Ça résonnait, dans ma tête, rebondissant sur les parois de sa boîte crânienne. Si l'autre pensait que ç'allait être aussi simple, elle aurait des surprises. J'étais bien décidée à ne pas lâcher prise.
Les gens présents sur la place du marché, effrayés, fuyaient de toute part facilitant le travail de notre poursuivant. Enfin, il était devenu son poursuivant, puisqu'elle contrôlait mes pattes. J'espérais sincèrement qu'il arrive à nous rattraper et qu'il la stoppe avant qu'elle fasse des ravages.
Comme s'il avait entendu mes pensées, un vent non naturel se leva devant moi. Enfin, nous. Non, quand même moi puisque je me suis pris tout, ayant gardé uniquement le contrôle de ma tête. Mon autre moi ne fut donc aucunement touché, juste surprise. Mais elle avait l'instinct animal, et ça, mon poursuivant l'avait oublié : profitant du vent contraire à sa trajectoire, le loup continua d'avancer avant de faire un rapide demi-tour et de repartir dans l'autre sens. Il dépassa le garçon aux cheveux bleus à qui j'essayais de crier de le stopper, à tout prix. Je n'étais malheureusement pas sûre qu'il ai tout compris, ou même entendu. Et le loup, lui, continua sa course, en se contentant de ce qu'il possédait déjà de mon corps, c'est-à-dire tout, sauf la tête. Qu'il fasse vite, l'autre !

Absolument pas conscient du petit soucis de personnalité de la voleuse, Hermès continuait sa course, satisfait de voir son vent arrêter un instant sa cible. Tiens, il lui semblait que la fourrure des pattes avançait un peu plus sur le corps. Ce n'était peut-être qu'une impression, allez savoir. De toute façon, ça n'était pas important : animal entier ou partiel, personne n'était aussi rapide que lui, même pas cette saleté d'Iris ! Il rejoignit sa fuyarde mais, alors qu'il allait l'attraper, elle fit demi-tour et lui passa entre les mains.

- Hey ! Reviens ici !

Il dérapa un instant, surpris. Avait-il rêvé ou la fille lui avait parlé de la stopper ? Pas sûr que ce soit ça, ce n'était absolument pas logique, et puis avec la vitesse comprendre une conversation était difficile, pour ne pas dire quasiment impossible. Il se rétablit à temps, évitant de peu de s'étaler dans un stand de légumes, et se releva pour reprendre la poursuite aussitôt. Peu importait que cette fille lui ait dit de l'arrêter ou pas, il comptait bien le faire ! C'était SON jambon !

Plus question de jouer. La bestiole n'était pas stupide, il risquait de la perdre s'il faisait trop l'andouille. L'avantage était qu'avec cette pagaille, la plupart des gens avaient filé, il n'y avait donc quasiment personne, à part quelques marchands planqués derrière leurs stands. Peu regardaient la scène, préférant se faire oublier pour ne pas être impliqués, et les autres déformeraient ce qu'ils voyaient. Donc il n'avait pas à se gêner !

Toujours derrière la fille partiellement animale, Hermès accentua sa concentration pour faire apparaître à nouveau un vent devant elle, afin qu'elle s'y cogne. Il était assez violent pour donner l'impression de rentrer dans un mur. Mais cette fois, pas question de lui laisser le temps de filer. Hop le vent s'intensifia à une vitesse incroyable pour entourer la voleuse, sa rapidité augmentant pour le rendre tranchant. Au final, c'était un petit tourbillon qui tournait autour de la fille, haut de plusieurs mètres pour l'empêcher de sauter et s'enfuir.

- Non mais sans blague !

Avec un peu de logique, les gens encore présents le prendraient pour un mage de vent. Personne n'irait chercher l'identité d'un Dieu, c'était parfait ! Satisfait, Hermès ralentit pour s'arrêter devant sa petite prison venteuse et observer la chose qui s'y trouvait, prêt à intensifier le tranchant de l'air si elle faisait mine d'essayer de filer. On touchait pas au jambon de Hermès Mercure !

Comme attendu, mon poursuivant fut étonné de la manœuvre de l'autre, qui s'en réjouissait grandement. Je commençais à entendre ses pensées, comme la dernière fois. Il était .. réjoui, heureux de prouver qu'il était encore en lice et que, malgré ses "longues" années sans bouger, il réussissait à faucher un adversaire aussi facilement. Il riait, se moquait de la faiblesse du jeune homme, raillant l'espoir que j'avais placé en lui.
Ce qui était maintenant un loup-garou -anciennement moi-même - courrait toujours sans s'arrêter en direction de la place d'Athéna, d'où il aurait pu sauter de toits en toits en s'offrant le luxe de bien connaître le terrain. Mais leur ancien poursuivant, qu'il avait cru avoir semer, était bien derrière eux et les talonnait même. Ce qui enragea bien sûr l'autre idiot qui le prenait comme un véritable affront. Il força encore plus l'allure, allongeant les pattes comme seuls les loups savent faire. Heureusement pour moi, le garçon aux cheveux bleus réagit avant que l'autre ai mis sa puissance maximale en place.
Et pour changer, c'est de nouveau MOI qui me suis pris son mur de vent, en plein dans la tête. Un, ça allait, mais là, un deuxième en moins de quelques minutes, avec l'afflux de sang comme quand l'ont court, ça donne une sacré bosse et surtout un sacré mal de tête. La partie louve - n'aillant rien pris pour la deuxième fois - voulu s'en sortir de la même manière, croyant que son adversaire ne penserait pas à ce qu'il aille faire deux fois la même sortie. Mais il y avait apparemment pensé à ça, puisqu'un véritable tourbillon apparut tout autour d'elles. Le vent tournait si fort que je ne voyais plus rien dehors, mais ce que je vis bien, c'était que ça faisait mal : la louve avait déjà pris son élan pour repartir quand le mur tranchant était apparu. JE me pris donc pour la troisième fois un truc dans la tête. Super. Sauf que cette fois, du sang coula du haut de mon front. Je commençais sérieusement à lâcher mon emprise sur ma tête, et l'autre le savait bien. Je ne devais pas céder, sinon, c'était la fin assurée. Je ressentis des vertiges, tout devenait flou autour de moi, intensifié par le mouvement circulaire du tourbillon. Rester consciente. C'était tout ce qui importait. Je vis sa silhouette, au dehors. Toutes cette histoire pour un misérable morceau de jambon.
L'autre moitié, lisant dans mes pensées, su donc ce que voulais notre poursuivant. Elle fit donc tout pour l'énerver : elle le nargua. Elle sortit le jambon de la sacoche où il était rangé avant de l'approcher doucement mais sûrement du mur tranchant. Un bout du morceau parti en éclat. L'autre c'est alors assise, et nous avons attendus. Plus précisément, l'autre attendait, moi, j'espérais que l'inconnu de dehors rapplique rapidement, sous peine de retomber sous le joug de l'Anamée sauvage. C'était comme si je nageai avec un poids à chaque pied, mais que ma tête restait hors de l'eau malgré tout : quelques fois, j'arrivai à respirer, d'autre fois, l'eau me submergeais et j'étouffais à moitié. Cependant, rester calme et assise m'aidait à retrouver un peu de constance, alors que la silhouette dehors semblait se mouvoir.

Hermès sourit en voyant la bestiole captive. Elle avait cru pouvoir refaire le coup de son demi-tour ? Ahah elle le prenait pour un débutant ou quoi ? C'en était plus amusant. Il imaginait la voleuse en rage, humiliée de s'être faite avoir comme ça, et en prime coincée. Niark niark niark ! Ca lui apprendra à piquer les proies des autres ! Il sentit à travers le vent qu'il maîtrisait que la fille à moitié animale s'était cognée contre le tranchant de l'air. Bien, ça lui permettrait de comprendre qu'il valait mieux ne pas essayer de filer.

C'est alors qu'il perçut un mouvement dans le tourbillon. Qu'est-ce qu'elle faisait encore... Il ne voyait pas distinctement, mais il sentait ce qui se passait, les mouvements à l'intérieur. Et comprit alors qu'un bout du jambon venait d'être tranché par l'air.

- HEEEEEEEEEY ! C'est de la triche là !

Son jambooooooon ! Noooooooon ! C'était cruel ! Oooooh elle jouait avec le feu celle-là, elle allait l'énerver si elle lui bousillait son repas comme ça ! Très bien, il allait le chercher et le sauver des griffes de cette abomination tueuse de jambon ! Hermès s'approcha du vent et passa tout simplement à travers. Il rigola un instant tout seul. Il aimait bien faire ça. Là où l'air aurait découpé quelqu'un en petits morceaux en une seconde, lui était tout simplement chatouillé par une douce brise.

Une fois à l'intérieur, il fit face à la chose inhumaine et particulièrement au jambon.

- Maintenant tu me rends mon jambon ou c'est toi qui va être taillée en pièces !

Bien sûr, le Dieu n'était pas stupide : il restait sur ses gardes, prêt à utiliser son agilité légendaire pour esquiver la moindre attaque, le moindre bond vers lui.

Toujours coincée. En plus, l'autre dehors ne réagissait toujours pas. Son jambon, alors, il comptait pour rien ? Autant le balancer tout entier. Mais ce n'était pas moi qui contrôlait mon bras, malheureusement. J'entendis tout de même une phrase, presque hurlée. Ah, ben c'était pas trop tôt ! Il bougeait, à l'extérieur, alors que mon autre partie s'asseyait tranquillement, attendant. Il était maître de la situation, même enfermé ici, puisqu'il avait le destin du jambon entre ses mains. Enfin, entre ses pattes avec des griffes tranchantes aux bouts.
La silhouette s'approcha et entra dans le tourbillon, ne sentant apparemment pas du tout le vent sur lui. Ce n'était pas un simple mage. Ce n'était pas possible. Mais, qu'était-il, alors ?

- Maintenant tu me rends mon jambon ou c'est toi qui va être taillée en pièces ! Bon, c'était clair, au moins. Mais comment lui expliquer que je n'étais pas maîtresse de mes mouvements ? Et puis cette entaille au front saignait toujours, bien que moins qu'avant. Je devais vraiment avoir l'air dérangé, avec mon visage affolé et ma main, sûre d'elle, tenant le jambon près du mur coupant.

- En fait, c'est compliqué,

Sérieusement ? Autant y aller cash, quitte à ce qu'il ne comprenne rien.
- De toute façon, tu ne vas pas garder le contrôle, et là, je mangerai tout cru le mec au cheveux bleus.
Elle attaquait, voulant prendre le contrôle de ce qui était le plus important : mon cerveau. Une fois cette partie conquise, je savais que seul une aide extérieure -en d'autres mots, River- pourrai m'aider.
J'allais prendre la parole quand la lumière apparue, en haut du tourbillon de vent. Je bougeais le regard : l'autre, absorbée par l’assujettissement de moi-même, ne devait surtout pas le savoir ici. Et elle ne s'aperçut de rien, avant de voir le jambon se faire kidnapper par la lumière. Il se dirigeait vers le haut, pour s'arrêter juste au-dessus de la fin du vent pour profiter des courants.
- A toi de jouer, Ana' !

Encouragée par River, je me lançais donc dans un monologue, m'attendant à se que l'autre ne me croit pas, se moque, comme toutes les autres personnes. Je me sentais vraiment seule dans cette situation, des fois...

notre

Je n'avais pas l'habitude de demander de l'aide aux autres, mais là, avais-je le choix ? De toute manière, s'il voulait revoir son jambon entier, il devait m'aider.

Hermès observait la fille à moitié animal, méfiant et agacé. Elle avait pas entendu ou quoi ? Il lui avait dit de lui rendre son jambon ! Au moins, elle semblait assez intelligente pour ne rien tenter directement contre lui, c'était déjà ça. Remarque il se ferait un plaisir de la couper en deux avec ses vents si elle faisait mine de l'attaquer. Ca serait juste un peu trop rapide mais bon, les plaisanteries les plus courtes sont les meilleures parait-il. Et il le voulait de plus en plus son jambon !

Il haussa un sourcil quand elle lui répondit. Compliqué ? De quoi compliqué ? C'était très simple : elle avait son jambon, il le voulait, elle n'avait qu'à lui rendre, tout simplement. Sauf si elle voulait se suicider bien sûr. Bon elle ne pouvait pas fuir, et il n'était pas si pressé que ça, alors autant écouter ce qu'elle allait lui sortir comme explications bidon. Ca pouvait être drôle après tout. La fille semblait commencer à parler d'ailleurs, mais elle ne dit rien, l'air de regarder autre chose. Quoi encore ? Il s'impatientait et tapa légèrement du pied par terre. Il n'y avait rien au dessus, juste le ciel ! Seul le jambon comptait.

D'ailleurs... hey c'était quoi encore ce bordel ! D'où il s'envolait celui-là ? Hop hop hop, le Dieu rejoignit les vents les plus hauts juste au dessus du jambon d'un regard, coupant toute retraite. Et assombrissant du coup considérablement l'intérieur du tourbillon venteux. Ce n'était pas noir, juste gris, comme lors de ces soirs d'été où les nuages rendent la luminosité sombre et lourde. On y voyait donc encore, c'était juste moins clair qu'avec la lumière du jour.

- Non mais sans blague !

Il écouta ensuite la fille lui déblatérer toute une histoire loufoque. Une espèce de schizophrénie entre la partie humaine et la partie animale. Bon d'accord, c'était possible. Il en avait vu des trucs bizarres depuis le début du monde, et il savait que beaucoup de lycanthropes étaient incapables de se contrôler. Souvent, ça donnait naissance à une autre personnalité, car l'humain, prétentieux comme toujours, refusait d'être associer à un animal, considéré comme inférieur. Quelle stupidité ! Refuser d'accepter ce que l'on est ne cause que des tracas bien plus graves. Enfin bon, chacun ses problèmes.

Ce que racontait la voleuse était donc tout à fait possible à ses yeux. Mais qu'est-ce qui prouvait que ce n'était pas une histoire inventée pour essayer de s'échapper, hein ? Il haussa un sourcil en l'entendant ensuite demander de l'aide. D'accord, elle était coincée par ses vents, mais elle parlait clairement de son copain animal. Et la façon qu'elle avait de dire ça... comme s'il était obligé d'aider pour récupérer son jambon. Il pouvait la tuer sans problème en claquant des doigts ! Mais bon, il n'avait pas non plus envie qu'on le remarque davantage. Ok, passer pour un mage de vents c'était plausible. Mais s'il explosait une hybride en deux secondes, difficile de faire croire qu'il n'était qu'un simple magicien, même puissant.

Il croisa les bras pour réfléchir, penchant un peu la tête à droite. Ses mèches bleus bougèrent un peu, lui tombant autour des yeux. Aider une lycanthrope, hum... bah ça pouvait être marrant après tout. Il n'avait plus frayé avec ces bestioles depuis un bon moment. Ca faisait un challenge amusant pour récupérer son jambon, et ça serait plus discret que de lui étaler la cervelle sur le marché. Il décroisa les bras et releva la tête.

- Ok ! Faut faire quoi pour virer ton copain animal ?

Il avait clairement l'air de trouver ça amusant, absolument pas effrayé ou dérangé par la fille à moitié louve devant lui. On lui avait proposé un truc sympa à faire, tout simplement.

Après que River ai pris le jambon, l'autre referma (en quelque sorte) le tourbillon, ne laissant aucune chance à mon affilié de s'enfuir. Et River pouvait toujours déchiqueter le morceau, au pire. Je débitais d'un trait mon état intérieur, demandant de l'aide à l'autre. J'avais du mal à l'admettre, mais je ne voyais pas comment m'en sortir seule. Ça faisait quelques semaines, jours peut-être, que ma moitié n'était pas sortie et elle mourait d'envie de me contrôler, à nouveau. Je ne pouvais plus lutter.
La réaction du pseudo-mage, qui n'avait pas tant tardé, m'étonna en premier lieu. Il me croyait, franchement ? Enfin, il semblait y a réfléchir : au moins, tout n'était pas perdu. Il prit une position exagérée, bougeant ses cheveux sur ses yeux, aussi bleus les uns que les autres. Mais, finalement, il était comme les autres : il le prit comme une blague, un truc facile à réaliser. Si seulement ...

- Ok ! Faut faire quoi pour virer ton copain animal ? Bon, il acceptait de m'aider au moins. Si j'avais été maîtresse de mes mouvements, j'aurais relevé la tête d'un coup, de façon à voir ses yeux, s'ils étaient sincères ou non. Mais l'autre, comme je l’appelais, avait déjà pris mon cou, rendant impossible le relevé de tête que j'avais voulu faire. Je du me contenter d'observer ses pieds. Ma vue se troublait également. Je sentais me yeux virer au noir, comme quand le loup les capturaient. Dans une dernière impulsion, je lui avouais que je n'en savais rien. Quelle personne stupide je faisais. Je rajoutais également que j'avais retrouvé mon corps uniquement après être passé par ses portails, ceux qui reliaient l'île à la Terre. Et ce fut fini. Je ne sentais plus rien, mais j'entendais toujours le vent, voyait toujours les chaussures de l'homme. Plus rien ne dépendait de moi, à part peut-être la volonté de vouloir à nouveau vivre, pleinement.

~

Les souvenirs revinrent, d'un coup. Je me rappelais, plus petite, quand nous vivions en harmonie, toutes les deux. Avant le massacre, évidemment. Je revis les jeux, les arbres où la louve grimpait avec tant de facilité, les lapins qu'elle pistait, pendant que je réfléchissait à des pièges pour les proies, à quels arbres escalader pour arriver le plus rapidement à la maison. Nous étions en harmonie, en ce temps-là. C'était à la fin, à l'aboutissement de nos plans communs que nous étions toujours en désaccord. Elle voulait manger le résultat de la chasse, alors que je voulais juste l'observer avant de le relâcher. Elle voulait que je m'enferme dans ma chambre alors que je voulais aller chez mes parents. Elle avait toujours haït mon père. Sûrement parce que c'était un simple humain. Elle n'aimait pas non plus ma mère, peut-être parce que l'on ne voyait que rarement la louve en elle. Je n'en savait rien. A part montrer et ordonner, ma moitié n'avait jamais vraiment parlé. Encore moins après.
C'était peut-être ça, qui l'avait tant mis en rogne. Que je ne me sois pas battue, libérée seule, grâce à un plan. En fait, j'avais le plan. Mais pas sa force. Comment aurais-je pu me libérer seule ? Elle était partie, durant ce temps-là. J'étais seule dans mon corps, je l'avais sentie. J'étais seule aussi à l'extérieur. Ma mère était partie vers le Styx, ne pouvant plus supporter tous les traitements, avant moi. Mais la loup était revenu. Sans excuses, pardons, défense, justifications, prétextes. Rien. Elle était simplement venue, puis s'était emparée de mon corps, comme aujourd'hui.
Au moins, elle m'avait libérée, là-bas.

~

Je retournais soudain à la réalité ; ma vue s'assombrissait. Les poils de loup avaient donc déjà recouvert toute notre tête. Et elle prononça un mot. Qui me concernait.
- Fin.

[HRS : si jamais ça te conviens pas, je peux changer n_n]

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