vénus toute entière à sa proie attachée (israe)

Elle avait dans son regard l'innocence des mots et l'impétuosité des sens, des lenteurs sensuelles au creux de sa peau et des senteurs lointaines entre les mèches brunes - s'il en avait rêvé plus sans que ce soit permis. Et il se rappelait encore la lenteur de ses pas graciles, au milieu des jeux hypocrites et habiles qui faisaient les grands de ce monde. Elle semblait perdue ça ou là, candide et aérienne dans une robe en mousseline   -  et s'il s'était permis seulement de tendre les doigts et agripper un peu de sa chaleur entre des murs froids.

Et il lui aurait promis des milliers d'arabesques pour lui dessiner un univers tout entier où le seul empire de son sourire régnerait, si seulement cela ne lui offrirait qu'une nuit et une seule, entre des draps embués de la propre solitude qu'il ressentait et qu'elle lui avait insufflé dans un instant d'étourdissement où l'empathie avait pris place - il ne le faisait jamais exprès.

Pourtant il avait attrapé, au milieu des rêves de grandeur et des simagrées mielleuses, la torpeur d'une âme libre et d'une conscience volubile sous des traits d'ivoire et une voix mélodieuse. Il avait capturé toutes les sensations qui semblaient l'appeler et seulement une conversation avec elle. Il voulait déjà plus, elle aussi assurément.

Il l'avait su au frisson qui lui parcourait l'échine chaque fois qu'elle s'était adressée à lui, qu'ils soient en public ou les rares occasions privées à cette fameuse réception, il l'avait goûté plus encore quand ils s'étaient quittés au pied du Castle of Heart, et regretté de l'amère facilité avec laquelle elle s'était évaporée de son univers, le politique au coeur de sa cour, sous son manteau de soie brodée sur-mesure pour mentir un peu plus.

Tout ce pouvoir encore dont il était assoiffé et qui lui avait offert sur un plateau d'argent tout ce qu'il fallait pour la retrouver - il avait les idées bien fixées dans son cerveau. Pourtant c'est en tout anonymat qu'il demanda à entrer, il s'étonna presque à la majesté des lieux de trouver la même silhouette brune immédiatement.

Elle était là, dans toute sa splendeur des jours passés, et les cheveux défaits qui s'entremêlaient sur ses épaules dans une valse sensuelle lui coupa le souffle déjà court, la seule envie au bout de ses doigts et le regard enflammé par l'ardeur des lèvres sucrées qui s'entrouvraient sous la surprise évidente de le trouver là.  

Elle était là devant lui et il retrouvait l'impétuosité de ses iris sombres, les courbes dessinées à la craie pour ne plus en dévoiler que l'art abstrait qui se cachait sous les tissus, le teint rosé qui couvrait les tourments qu'il avait su déceler - si seulement il en connaissait la teneur.

— Bonjour, Israe. Ce n'était plus Mademoiselle Frescoladi.

Et rien n'importait plus que le désir qui s'éreintait sur son propre épiderme, le poussant à l'insolence et l'ardeur de ne plus prononcer le moindre mot, seulement entrelacer le visage fin entre ses mains longues et chaudes, saisissant les lèvres charnues par la même occasion pour y laisser sa propre empreinte, des siennes fiévreuses, laissant ses mains s'attarder sur la chevelure brune sans rompre le baiser qu'il avait longtemps fantasmé. 

Et qu'est-ce qui t'arrive Adriel ?
Depuis quand tu tombes pour des courbes affolantes, des yeux enflammés et des lippes sensuelles ? À quel instant t'es-tu suffisamment arrêté de penser, de rationaliser, pour laisser les plus bas des instincts mener tes actions ?

Et il aurait pu s'arrêter là, retirer ses lèvres des siennes et se confondre en excuses pour son audace - sauf qu'il n'en avait aucune envie, et que l'absence de résistance qu'il rencontra chez l'héritière le poussa à continuer. Faire glisser ses doigts sur les tissus qui recouvraient sa peau qu'il sentait déjà brûlante, passer ses lèvres dans le creux de son cou déjà frémissant entre ses mains, et sentir son contact au-delà de tout ce qu'il avait pensé ces derniers jours - depuis cette soirée-là.

Elle le mena plus loin dans sa demeure et il n'opposa aucune résistante, quand bien même il se serait perdu dans ses courbes et sa sensualité, guidé par son parfum enivrant - et encore il se demanda un instant si ce n'était pas simplement le goût de sa peau, à nu, sans la moindre fragrance pour la sublimer.

— Permets-moi de ne pas te croire.

Et avant qu'elle ne puisse lui donner la moindre réponse à ce qu'il n'y avait rien à rétorquer, il attrapa ses lèvres une nouvelle fois qu'il marqua sans aucune prudence ni la moindre douceur - ce n'était pas ce qu'il recherchait dans l'acte.
Et c'est pourtant ce que lui recherchait chez cette femme - la tendresse et la volupté féminine, qu'il ne cherchait chez aucune autre. Il souleva son corps frêle pour qu'elle puisse s'agripper à ses hanches, et s'arrêta un instant pour observer le bercement de ses traits.

— Je suis sûr aussi qu'on t'a déjà dit combien tu es belle.

Ses bras encadraient sa taille fine, ses yeux se perdaient sur sa peau et s'échouaient dans les siens - et mon dieu qu'elle est belle.