En bon touriste que nous sommes, nous ferons le tour du monde en 1 journée! [Pv Crim-Crim]

♟ 05:30 AM.

La respiration de Crimson est régulière. L’herbe fraîche est tout contre son dos, allongé dans celle-ci faisant face au firmament et ses étoiles, non loin des tentes et caravanes des autres membres du cirque. C’est calme, tout le monde dort encore. Tout le monde ? Apparemment pas car voilà qu’aux oreilles de notre magicien parvient le bruit d’une série de petits pas précipités. Qui est-ce ? Freya peut-être ? Non… elle est probablement trop craintive pour se promener dehors seule à cette heure. Et puis… ça ressemblerait bien plus à une certaine vampire sang-pur de se mettre à courir partout comme ça à une heure pareille. De quoi ? Ah, oui, il peut bien parler. En effet, il n’a rien à lui reprocher, après tout il est bien dehors allongé dans l’herbe humide par la rosée matinale à 5 heure et demi du mat’… Pas forcément une idée qui traverserait l’esprit de la plupart des gens. Sauf que justement, Crimson n’est pas la plupart des gens. Loin de là.

Il pousse un soupir discret. L’odeur de l’herbe fraîche est partout et au dessus de lui, le ciel foncé qui devient un peu moins étoilé à chaque minute qui passe, à l’approche de l’aube. Et encore ces petits bruits de pas. Qui… viennent par ici.

« CRIM-CRIM ! »

« … »

Pas de doute possible, c’est bien elle. Crimson ne broncha pas lorsqu’une June affamée et fatiguée lui bondit dessus avec force – Disons que ce magicien aussi étrange soit-il n’usurpe aucunement son air sûr de lui. Il est carrément solide comme mec. – La petite demoiselle avait dû avoir peur qu’il ne s’enfuie en la voyant (l’effet qu’elle avait tendance à produire sur Freya, comme tout le monde d’ailleurs), d’où la nécessité de se vautrer sur lui avec la grâce d’un cachalot échoué. D’ailleurs, il l’aurait peut-être fait, rien que pour l’embêter. Pas qu’elle soit lourde, mais tout de même. Ca n’enlève pas le fait qu’elle se retrouve au dessus de lui dans une position d’ailleurs suffisamment subjective pour mettre quelqu’un dans tous ses états. Cependant notre homme se contente de la regarder patiemment avec un air amusé, ne semblant pas le moins du monde dérangé par l’arrivée intempestive de la demoiselle.

« J’ai faaaaim Crim-Crim ! Dis-moi que tu as du sang frais sur toi… Je vais mourir… »

En entendant ces mots, Crimson laisse rouler un gloussement dans le fond de sa gorge en vrillant son regard sur elle. Il la laisse se redresser tout en couinant – le magicien peut comprendre, après tout il est lui-même un vampire. Et il faut dire que la soif (ou faim comme vous voudriez l’appeler, après tout c’est un équivalent de ce qu’une personne normale ressentirait lorsque son estomac n’a plus rien à digérer) n’est vraiment pas quelque chose d’agréable. Vraiment pas. Il se redresse alors aussi pendant qu’elle s’assoit dans l’herbe et lui sert un sourire à la Crimson.

« Désolé, j’aimerais bien aider une si jolie demoiselle en détresse mais je n’en ai pas sur moi. Mais en attendant… oui, une idée, ça j’en ai. A vrai dire, moi aussi je m’ennuie. Et la prochaine représentation du cirque sera dans deux jours… ça nous laisse un peu de temps. Que dirais-tu d’aller à la chasse ? On pourrait d’abord réfléchir à un endroit en particulier… hmmm… »

Il fit mine de réfléchir. Crimson appréciait June. C’était un personnage tout à fait excentrique, de sa propre manière, et avait un goût pour le divertissement. Tous les deux, ils arriveraient sûrement à s’amuser. D’ailleurs, il irait même jusqu’à dire qu’ils risquaient de s’amuser un peu trop. Cependant, si Crimson a des péchés mignons, il ne se sent aucunement coupable d’en profiter. Il fit un geste théâtrale en vrillant ses yeux dorés dans ceux de son interlocutrice.

« … Ou bien, nous pourrions visiter plusieurs endroits et goûter plusieurs « mets » différents ! »

Son sourire vicieux refit son apparition. June comprendrait tout à fait la nuance du terme qu’il avait employé, car pour un vampire, un met reste tout de même une personne. Il se redressa avec souplesse et tendit sa main à sa camarade pour l’aider à se relever.

« … à toi de choisir où tu souhaiterais aller. Que dirais-tu de visiter cette bonne vieille planète bleue ? »

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♟ Cachez-vous. Ils arrivent.

Crimson ne put réprimer un sourire amusé devant l’excitation exagérée de sa complice lorsqu’il lui annonça son plan tordu. De toute manière, il avait toujours des idées tordues, mais si en général elles créaient un malaise chez ses interlocuteurs, il pouvait toujours être certain que June serait ravie et l’accompagnerait avec un enthousiasme non-feint. Il avait beau dire, il l’appréciait assez. Elle était un peu folle, et elle aimait bien jouer avec lui de bien des manières – pas ce que vous pensez, dommage pour vous bande de petits pervers – et cela se révélait toujours intéressant. Ainsi, c’est de bonne grâce et de bonne humeur que Crimson accepta l’idée de sa compagne : commencer par visiter le Japon. Crimson avait vécu sur Terre il y a d’ici bien longtemps, et il n’avait jamais voyagé. C’était la parfaite occasion d’aller voir un peu les paysages étrangers et goûter aux spécialités locales si vous voyez ce que je veux dire. Et puis, pourquoi ne pas profiter comme l’avait suggéré June des sources chaudes ? Ca serait sympa. Il y aurait plein de choses à faire… et cette journée s’annonçait longue. Très, longue.

June prit son sac et s’agrippa avec joie à l’impressionnant magicien qui échangea un sourire avec elle tandis qu’ils déambulaient dans le cirque à la recherche d’une personne pour leur faire un portail. Cette merveilleuse personne trouvée et réveillée, nos deux fous furieux s’éclipsèrent du cirque pour aller semer le trouble quelque part, beaucoup plus loin, sur un autre continent. Crimson n’avait rien amené – il trouverait tout ce dont il avait besoin sur place, pas besoin de paniquer lorsqu’on est un illusionniste-voleur habile et monstrueusement charmant. Ils atterrirent dans une rue quelconque, et ils lancèrent des regards autour d’eux.

«Crim-Crim on fait quoi... ? Enfin, on fait comment ? Je suis jamais venue ici moi ! »

Crimson pouffa et lui tapota le haut du crâne – elle était quand même sacrément petite par rapport à lui, mais c’est une autre histoire.

« Moi non plus ! Raison de plus pour explorer un peu… j’imagine que tu as très faim. Cherchons un hors-d’œuvre, pour commencer. On verra après ♥ »

Crimson déambula tranquillou dans la rue, flanqué de notre jolie Madame Loyal. Heureusement, il n’était pas habillé de manière trop extravagante ce qui lui permit de ne pas attirer des regards suspicieux – il avait revêtu des vêtements confortables comme il traînait au cirque, donc un pantalon de jogging gris resserré au niveau des chevilles, un sweatshirt à capuche noir et une paire de docs d’un rouge flamboyant. Oui, on y peut rien, Crimson a un style vestimentaire assez particulier, mais cela lui va si bien qu’on ne peut même pas lui reprocher. Ses cheveux étaient tirés en arrière comme d’habitude, et avaient alors une couleur rousse qui tirait un peu vers son châtain naturel – il serait temps de se refaire une teinture. Car en effet, Crim’ se teinte les cheveux, et de toutes les couleurs imaginables, si ça ne suffisait pas. Il utilise des couleurs qui tiennent environ une semaine ou moins, donc assez aisées à mettre et à enlever si besoin. Rien qui n’endommagerait ses cheveux, non plus.

Enfin BREF, passons outre la tenue vestimentaire et capillaire de notre protagoniste (ou devrais-je dire antihéros), ce n’est pas ce qui nous intéresse le plus je crois. Revenons donc à nous moutons, ou plutôt nos vampires – veuillez excuser cet humour déplorable chers lecteurs, difficile de rester sérieux avec un contexte pareil – qui à présent sont à la recherche d’un amusement, ou plutôt d’une amuse-gueule. Notre cher psychopathe de service avec sa petite psychopathette bifurquèrent bientôt dans une rue différente. Une rue quasiment vide, où seulement deux hommes se trouvaient. Etant donné l’allure de l’endroit, il serait difficile de les blanchir sur leurs intentions – et puis les asiats’ sont jaunes, c’est bien connu désolée c’était tellement nul et raciste j’ai honte le prenez pas mal. Les deux membres du cirque s’étaient assez éloignés des rues passantes pour que Crimson soit certain qu’il n’y aurait pas de potentiel témoin à ce qui risquait fort de se produire.

Ah, parce que vous vous attendiez à ce qu’il saute sur la première écolière en mini-jupe pour la mordre en pleine rue en lui susurrant des « je vais te souiller » ? Ah mais non hein ça ne se passe pas comme ça dans la vraie vie – lol –. Il a beau avoir une manière de penser très particulière, il n’est pas stupide. Et puis il a toujours eu une préférence pour les personnes qui fourraient leur nez dans la drogue ou d’autre trafics et affaires pas terribles. Peut-être étais-ce son ancienne personnalité aimant la justice qui l’influençait d’une quelconque manière, ou bien seulement le sentiment de jubilation que lui procurait l’expression que ces individus faisaient lorsqu’ils se rendaient compte qu’ils n’étaient pas le plus gros poissons du quartier. Oui, c'était sûrement ça. La chute d’une personne est très amusante à observer.

Crimson leva son doigt longiligne peinturluré de noir  vers les deux personnages au fond de la ruelle.

« Ceux-là iront ? Je pense que tu sais aussi bien que moi qu’on trouvera difficilement mieux comme proie… Sans avoir à provoquer un immense grabuge qui serait tout à fait ennuyeux. J’aime l’attention, mais aujourd’hui je préférerais profiter de notre petit voyage dans la quiétude, si possible. »

Il lui fit ensuite un sourire si bourré de charme que toute personne réfléchissant normalement aurait eu une attaque, puis s’avança vers les deux hommes qui prirent enfin conscience de leur présence. Ignorant leurs regards hostiles, Crimson fit un geste ample du bras dans leur direction, souriant toujours à June. Il inclina la tête avec galanterie.

« Les demoiselles d’abord… »

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♟ Cachez-vous. Ils arrivent.

Dès que Crimson eut prononcé ces mots témoignant de sa courtoisie qui paraîtrait déplacée pour la plupart d’entre vous, il croisa les bras en fixant la petite demoiselle face à lui. Un sourire se dessina sur ses lèvres alors que ses yeux vifs la virent prendre une position légèrement galbée vers l’avant pour disparaître. Il n’avait même pas besoin de le voir pour être sûr qu’elle était réapparue derrière les deux hommes à présent incrédules. Il pouvait sentir la peur naître en eux avec un plaisir non dissimulé, un sourire vicieux étirant ses lèvres en même temps que celui de sa camarade. Ces pauvres hommes ne savaient pas ce qui les attendaient, mais rien que l’aura dévastatrice qui émanait à présent du magicien qui leur faisait face aurait eu la force de les immobiliser. Forcément, quand ils se rendirent compte qu’ils étaient coincés entre nos deux fou-furieux, ils durent bien se résoudre à forcer le passage d’un côté. Choix instinctif ? En effet : ils se tournèrent immédiatement vers la frêle Mme Loyal en parlant à tout vitesse en Japonais.

Les yeux de Crimson devinrent deux fentes et ses lèvres s’écartèrent légèrement pour laisser apercevoir ses dents blanches. Terrible, terrible erreur de leur part. Non seulement ils croyaient pouvoir s’en sortir avec June, mais en plus ils avaient eut la stupidité de tourner le dos, à lui. Franchement, tout le monde sait très bien que le dresseur de fauves ne doit jamais tourner le dos à l’un de ses félins sous peine de se faire attaquer l’instant d’après. Et Crimson est un peu comme ça. Il aime se servir des faiblesses des autres pour les abattre, et le fait qu’ils dévoilent ainsi leurs dos rendait le tout très tentant. L’un d’eux sortit un revolver, le pointant vers June. C’était presque mignon. Ils ne se rendaient absolument pas compte qu’ils étaient, l’un comme l’autre, déjà morts. Il avait presque de la sympathie pour eux.

Crimson reste en recul pendant quelques instants supplémentaires, observant avec intérêt June à l’acte – il sent d’ici le sang de sa victime bouillonner dans son propre corps avant de… oh. Cela n’en a pas l’air de l’extérieur mais elle use d’une extrême violence pour tuer ses victimes, sans gâcher une seule goutte de sang. Intéressant.  Puis, à l’instant où elle sortit les crocs pour le mordre, Crimson se jeta avec souplesse sur l’autre homme qui ne comprenait rien à ce qui se passait.

Crimson se redressa agilement et essuya ses lèvres d’un revers de la main, une lueur dangereuse dansant encore dans ses yeux. Lorsqu’il se nourrissait, il devenait souvent plus froid et mortel, son sempiternel sourire quittant son séduisant visage pour ne laisser qu’un homme d’une beauté anguleuse prédatrice et décidément hypnotique. Il regarda le cadavre disloqué à ses pieds au travers de ses longs cils noirs, ses yeux dorés s’attardant sur l’expression délicieusement torturée qui resterait à jamais sur son visage drainé de toute couleur. Il chercha au fond de lui quelques instants, le signe d’un moindre remord ou faiblesse. Il ne trouva rien. Son ancien lui avait bel et bien disparu dans la marée de folie que représentait à présent son esprit tortueux. Cependant il n’eut pas le temps d’y songer plus avant car la voix de June s’éleva dans son dos. Immédiatement, l’amusement le prit et les coins de ses lèvres marmoréennes se redressèrent de nouveau. Il pivota sur lui-même pour faire face à sa camarade vampirique.

« Ah oui ? Moi j’aime bien cela, le goût corsé me plaît bien… Je n’ai proablement pas le palais aussi délicat que toi. »

Il se rapprocha d’elle tandis qu’elle se mettait à fouiller les cadavres des malheureuses victimes de sa faim dévorante. Terrible demoiselle, n’est-ce pas ! Crimson eut un éclat de rire lorsqu’il vu sa tête dubitative en observant le paquet de cocaïne qu’elle avait déniché dans la poche de feu son repas. Elle ne devait probablement pas savoir ce que c’était. D’ailleurs, il rit de plus belle lorsqu’elle le jeta avec négligence derrière elle sans un regard supplémentaire. Vu la quantité de poudre drogue dedans, cela avait dû coûter bonbon. D’ailleurs, la pilleuse se mit bientôt à remuer un portefeuille rempli à craquer de billets sous son nez, après s’être redressée et dirigée vers lui.

« Crim-Crim ! Avec sa on va pouvoir se laver de ce goût infect ! Car bon c’était infect….aussi infect que l’infect même ! »

Et Crimson n’eut pas même le temps de rétorquer quoi que ce soit qu’elle l’avait déjà embarqué en l’attrapant par le bras. Il la suivit docilement – oui, Crimson est capable de faire ce genre de choses – en souriant pour lui-même tandis qu’elle bougonnait encore des trucs comme quoi ça avait été dégoûtant et cætera. Puis, soudain, elle s’arrêta en montrant du doigt… oh ! Des bains aux sources chaudes ! Bonne idée. Il la regarda en haussant un sourcil lorsqu’elle demanda si c’était mixte. Franchement, il ne se surprendrait plus du manque de pudeur de cette fille. Lui-même s’en fichait d’ailleurs, mais c’était si drôle de voir une demoiselle à l’apparence si – trompeusement – délicate et sensible dire ce genre de choses de but en blanc.

Alors, il lui sourit sans répondre et entra dans l’enseigne après avoir passé son bras autour de ses épaules. Il se tourna vers une femme qui tenait l’entrée et lui demanda en japonais – car oui, Crimson est capable de parler plusieurs langues aussi bien que l’écrire et est très cultivé. Son intelligence n’est pas feinte, et quand on a déjà presque 300 années à son actif, on a eu le temps de s’instruire un minimum comme lui. Il ne faut pas oublier qu’il est curieux et avide de beaucoup de choses, le savoir en faisant partie. Bref, il s’adressa donc à cette femme avec un air affable.

« Bonsoir mademoiselle. Avez-vous des bains mixtes ? Ma sœur et moi aimerions prendre un bain ensemble. »

Puis, il lui fit un sourire à tomber par terre, usant de son charme naturel. Bien entendu, la dame s’empressa de lui répondre que – ô miracle – oui, ils avaient des bains mixtes. Le fait qu’il ait subtilement glissé qu’ils étaient frère et sœur donna confiance à leur interlocutrice – disons que prendre un bain mixte quand on est un couple peut se finir de manière plus ou moins… chaude si vous voyez ce que je veux dire. En tout cas, après avoir payé grâce à l’argent de lu dealer décédé, ils furent  guidés jusqu’à une pièce où ils pouvaient retirer leurs vêtements avant d’avoir accès à l’extérieur, là où il y avait un bain brûlant. Une fois seuls, Crimson pivota vers June et lui fit un grand sourire.

« Et voilà le travail. Bon, il est temps d’aller se détendre, pas vrai ? »

Il retira alors ses vêtements et les plia soigneusement dans un panier mis à sa disposition, puis il étira doucement son dos et ses épaules musculeuses. Il enveloppa une serviette autour de sa taille puis se tourna vers June.

« On y va ? »

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Alors même que Crimson se retournait en invitant June à avancer, il ne trouva personne en face de lui. Se doutant bien que ce n’était pas la petite taille de cette demoiselle qui l’avait leurré – elle était pas insignifiante au point qu’il ne la voit pas, surtout en la cherchant – il pivota avec un air passablement blasé sur le visage lorsqu’il la vit se précipiter avec vélocité vers les bains. Il ne fut même pas surpris de la voir bondir comme un singe pré pubère dans l’eau en hurlant sans grâce aucune. Parfois, Crimson avait vraiment besoin de se forcer pour se souvenir que June était même plus âgée que lui malgré les apparences. Eh oui, eh oui, ça peut choquer comme ça, mais c’est la vérité. Peu impressionné par la prestation on ne peut plus… éclatante de la jeune fille, Crimson descendit dans l’eau bouillante calmement, soupirant à fond en sentant son corps se relaxer. Les japonais, ils savaient comment se détendre. Jurant avec son habituel état moqueur et réfléchi, ici en ce jour vous est offert sur un plateau d’argent – d’or, même, n’oublions pas qu’il est tout nu ! – un Crimson qui somnole avec un air absolument inoffensif ! Si, je vous assure qu’une telle chose est possible. On ne dirait pas comme ça, mais lorsqu’il dort profondément, il a un air vraiment candide !
Cependant, cette accalmie ne dura pas longtemps car la délicate et douce voix de June retentit à nouveau – et j’espère que vous avez perçu l’ironie.

« Crim-Crim, t’as jamais pensé être une nana ! »

… Alors là, s’il s’attendait à ça ! Un ricanement amusé s’échappa des lèvres du semi-vampire en une mélodie veloutée tandis qu’il entrouvrait ses yeux dorés pour regarder la petite puce surexcitée – légèrement calmée par la chaleur des bains, dieux merci – en train de partir dans un délire digne d’une longue soirée de beuveries. Lui, en fille ?! Non, en toute franchise, cela ne lui avait mais alors jamais traversé l’esprit. Il l’écouta se contredire elle-même avec un air si sérieux qu’il aurait été dur de ne pas trouver cela cocasse. Il soupira avant de sourire à nouveau.

« En fille, hein ? De toute manière, ce n’est pas comme si je pouvais me changer. Je suis peut-être magicien mais je ne suis pas métamorphe. » Il redressa son dos fièrement, jouant le jeu, avec un sourire à faire tomber la clientèle féminine. « Mais il faudrait peut-être que j’essaie. Tes flatteries sont plutôt agréables à entendre. Mais dire qu’une si jolie fille comme toi es aussi perverse ! Quel gâchis ~ »

Il haussa un sourcil de manière provocante tout en sachant qu’elle n’en tiendrait probablement pas compte – dans la tête de June, les moyens utilisés avec les humains normaux ne marchent pas la plupart du temps. Elle ne répond en général pas à la provocation, mais pour Crimson qui emploie cet outil de séduction comme il respire, cela ne change pas grand-chose. De toute manière, quand on parle de ces deux là, on pourrait s’attendre à littéralement n’importe quoi. Franchement, malgré les apparences, June serait fortement capable dans un élan de… je-ne-sais-quoi, décider de se jeter sur Crimson ici même tandis que ce dernier pourrait se mettre à lui faire un cours sur la géographie de la Terre. Ce que je dis n’a pas de sens ? Eh oui, c’est normal : bienvenue au cirque Utopia, j’ai envie de dire. En attendant, aucun de ces cas de figures ne se présenta, et le magicien se contenta de végéter tranquillement dans l’eau brûlante tout en observant June trifouiller par-ci par-là avec les seaux et autres récipients que l’on peut trouver dans un bain japonais. On aurait presque pu croire que ce qu’il avait raconté plus tôt était vrai : un frère avec sa jeune sœur en vacances qui prennent un bain. C’était cependant plus étrange et complexe que cela. Dans tous les cas, lorsque June posa sa prochaine question, l’un des sourcils de notre adonis s’arqua et il se mit à sourire. Alors comme ça, mademoiselle avait soif de potins ? Doucement, il se rapprocha d’elle dans l’eau et saisit son menton entre ses doigts pour qu’elle le regarde dans les yeux.

« Tu sais pourtant bien ce que je pense des informations… il faut bien que je garde des secrets, sinon je perdrai mon aura mystérieuse… ~ »

Bon. C’était une sorte de mensonge. Il est vrai que Crimson ne parlait pas à tors et à travers de tout et n’importe quoi, gardant une grande partie sous clé, mais il aimait bien dire des choses sur lui. C’est un homme parfaitement égocentrique, alors pas étonnant qu’il apprécie parler de lui. Donner son avis sur les membres du cirque ? Hmm… cela pourrait lui apporter des ennuis au vu de la petite pipelette en face de lui – il était trop malin pour lui faire confiance. Il savait bien que la bonne parole de June, bien que sincère sur le moment, pouvait être totalement oubliée dans le feu de l’action. Non, franchement, pas une bonne idée de se confier à elle. Cependant, l’entendre parler des autres membres pourrait être drôle. Et puis, de vous à moi, Crimson ne craignait pas que les autres apprennent ce qu’il pense sur eux. Après tout, ce n’est pas tant un secret que cela ; et puis franchement, s’ils ne sont pas contents, qu’est-ce qu’ils peuvent bien y faire ? J’vous vois bien, moi, aller voir Crimson pour exprimer votre mécontentement… cela l’ennuierait bien vite et il s’empresserait de vous faire taire d’une façon ou d’une autre. Cela dépend de la valeur que notre magicien confère à votre vie. Et puis, rien ne peut garantir qu'il dise la vérité... ~

Bref, laissons de côté cette petite réflexion qu’eut notre cher taré-d’la-vie, car son attention fut à nouveau attirée par les paroles de la sang-pur.  Ses yeux s’agrandirent légèrement lorsqu’elle se mit à parler du directeur, Elysion. Alors là, ce type pouvait pas voir Crimson en peinture, ce qui avait d’ailleurs le don d’amuser ce dernier au plus haut point. Cependant, notre cher magicien est loin d’être idiot ou aveugle, au contraire. Je doute que l’on puisse trouver un homme plus observateur que lui. Alors, aux « innocentes » paroles de June, il se contenta de sourire. Il savait, lui. En même temps, faut dire que le fait que les deux personnes partageant le même corps (sans le savoir et sans que cela ne se sache, donc) avaient une aura singulièrement similaire, et sortaient de la même caravane. Oui bon voilà, ça c’est quand même franchement pas dur à remarquer pour un déceleur d’informations hors-paire comme Crimson. Il y avait également un facteur intuition là dedans, mais il en avait l’intime certitude : ils ne faisaient qu’un. Bon, c’est pas comme s’il allait le dire. Crimson avait tendance à jouer les arbitres. Il ne donnait pas ce genre d’informations en or à quiconque, laissant les autres le découvrir… ou non. Il trouvait ça plus drôle de savoir ce que les autres ignoraient. Cela vous offre une puissance qui n’est pas négligeable.

Dans tous les cas, le beau roux cessa de rester dans un silence énigmatique – fallait pas trop faire mariner June voyons – et il prit un air légèrement taquin en la pointant du doigt.

« Bah, ça m’étonnerait pas qu’il t’évite ! Y’en a beaucoup qui ne sont pas franchement à l’aise avec toi. Il a dû entendre Ameleyr se plaindre que tu le martyrises tout le temps, ça a du le faire fuir ! »

Il rit pour lui-même et passa un main dans ses cheveux humides, les tirant vers l’arrière. Ce qui l’amusait le plus dans sa tirade, c’était qu’elle était franchement valable pour lui. Les gens étaient pas à l’aise avec lui. Il fout un peu les pétoches, en fait. Même carrément. En plus, il est sacrément chiant quand il s’y met. Mais il le sait parfaitement. Et il n’y a rien de mieux pour le faire sourire. Oui, il est carrément tordu. Mais en attendant, il n’avait pas fini de faire son casse-pieds. D’ailleurs, il eut une idée franchement pas délicate mais qui lui plaisait plutôt bien. Il était à peu près sûr à 99% que, contrairement à ce que June disait, ils n’étaient pas réellement tous les deux. Etrangement, quand il avait parlé à Elysion – après avoir compris le lien entre eux – il avait eu la quasi-certitude qu’Elysion le savait, pas comme June. Donc, s’il le savait c’est que… il les entendait, là. Haha. La bonne blague. Un sourire passablement vicieux étira les lèvres de Crimson lorsqu’il reprit la parole.

« … Mais franchement, pour te parler du directeur… hmmm… la dernière fois, j’ai surtout eu une impression désagréable. Il est très agressif, ça n’a pas vraiment la classe. »

Puis, il fixa June dans les yeux, mais en réalité il regardait quelqu’un d’autre : ce regard était adressé à celui-même dont il parlait. Il eut une expression moqueuse avant de se détourner et de s’appuyer contre une paroi en pierre.

« J’ai pas grand-chose à te dire, tu sais, June. Quoi que, ça peut se discuter si tu me racontes quelque chose d'intéressant sur Lyvion ou Ameleyr, tiens. »

Toujours dans le marchandage, hein. Il perd pas le nord, le Crimson. Détendu, il attrapa le plateau derrière lequel June flottait tout à l’heure, l’attira vers lui et saisit la bouteille de saké qui y trônait. Il s’en servit et but une gorgée. Il n’en proposa pas à June : si elle en voulait, elle en prendrait ; mais en attendant, s’il pouvait éviter de se retrouver avec une June bourrée sur le dos, c'était pour le mieux.

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Les yeux perçants de Crimson ne lâchaient pas les petits mouvements que la demoiselle faisait en même temps que son visage se tordait subtilement en des mimiques allant de la confusion à la douleur. Il écoutait sa voix fluette faire des commentaires à elle-même, comme elle en avait tant l’habitude. Une mauvaise habitude, si vous vouliez l’avis de Crimson, mais qui avait toujours eu le don de l’amuser ou de le renseigner sur des choses qu’il n’aurait peut-être pas du savoir. Les yeux du magicien suivirent les ondes qui se formaient à la surface de l’eau lorsque sa frêle camarade se déplaça vers le bord afin de s’installer d’une manière identique à la sienne.

Quelques secondes s’écoulèrent, tandis qu’il attendait qu’elle reprenne la parole, répondant oui ou non à ses provocations. Lorsque les lèvres en forme de cœur de la sang-pur se séparèrent et que sa voix s’en échappa, le cerveau de Crimson se mit à tourner en même temps qu’il sentait qu’elle se confiait à lui. Lui, oui.  Un spectre de sourire plana au dessus de son visage tandis qu’il observait cette dame se recroqueviller sur elle-même, finalement pas beaucoup plus qu’une petite chose fragile, sous ses airs de vampire dont le cœur n’était jamais effleuré du moindre doute. Il ne fit aucun mouvement dans sa direction. Il n’allait pas la réconforter. Ce n’était pas son rôle, et puis il préférait l’observer se torturer l’esprit. Il sentait que dans peu de temps, tous ces doutes qui la rongeaient feraient surface, déborderaient de son être. Et ce jour là, quelque chose d’intéressant se produirait. Crimson espérait qu’à ce moment là, il serait dans les parages pour se repaître d’une pièce de théâtre au dénouement lui étant pour l’instant inconnu. Mais connaissant l’esprit non conventionnel de sa compagne, il se doutait que jusque là, elle oublierait ses ennuis. D’ailleurs, répondant à son intuition, le regard de June s’éclaircit, et elle s’écria d’une telle manière qu’elle aurait pu donner à une attaque à quelqu’un ne connaissant pas son caractère bondissant.

« Je veux un uniforme d’école du jap dans mes vêtements ! »

Crimson ferma les yeux et gloussa de sa voix de basse. Il ne serait donc jamais surpris par son comportement ? Parfois, elle se montrait très prévisible, il suffisait de la connaître. Fermer les yeux, se boucher les oreilles, fuir la vérité… c’était une attitude bien trop humain pour lui appartenir, et pourtant, voyez ce qu’elle était en train de faire… Crimson lâcha un soupir imperceptible puis se redressa sur ses jambes musclées, l’eau bouillonnante coulant le long de son corps d’athlète.

« Ca me semble être une bonne idée. Les vêtements que l’on peut trouver ici sont d’un goût absolument raffiné. Allons faire quelques emplettes, très chère. Ensuite, nous pourrons changer d’itinéraire… qu’en dis-tu ? »

Crimson lui servit un sourire narquois et complice, démentant son niveau de langue fleuri. Certains auraient dit que ses paroles étaient bien trop subtiles pour en être crédibles, et que derrière tout ce miel et cette bonne éducation se cachait un serpent prêt à mordre, dont le venin était été en train de couler lentement dans les veines de ses interlocuteurs peu alertes afin de les endormir. C’était probablement bien plus proche de la vérité que d’autres voudraient ne se l’avouer, d’ailleurs…

La longue main pâle et élégante du jeune homme saisit celle de sa camarade, avant que ses pas ne les guident à nouveau dans la pièce où ils s’étaient changés. Le bain lui avait fait un bien fou, et il sentait que sa peau habituellement parfaite resplendissait d’autant plus. Il se frictionna rapidement avec une serviette avant d’emprunter un Yukata traditionnel à disposition de la clientèle. Il sourit en sentant le satin sur sa peau. Il tira ses cheveux en arrière, toujours légèrement mouillés, ondulants autour de son visage saillant.

« Bon, petite June, allons donc faire un tour dans les magasins avoisinants. »

Il fit un léger sourire à cette dernière, après avoir rangé ses vêtements soigneusement pliés dans un sac à dos noir – appartenant probablement à un autre client, mais vous savez à quel point le cynisme de Crimson se moque de ce genre de choses – qu’il hissa sur son épaule. Les deux individus se déplacèrent nonchalamment jusqu’à la sortie de l’établissement, gardant le rôle de grand frère/petite sœur avec une exemplarité exceptionnelle, et retenant leur amusement respectif malgré l’état cocasse de la situation. Lorsqu’ils furent sortis dehors – car en effet, Crimson va se promener dehors en Yukata et tongs qu’il a pris aux sources chaudes – ils se mirent à se déplacer un peu au hasard vers là où devraient se trouver les magasins qui feraient le bonheur de notre chère Madame Loyal.

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