( make me feel alive and shatter me ) ♛ eugenia

make me feel alive and shatter me

Noir noir noir qu'il est le plafond
le sol
le monde.
D'un noir de charbon qui l'entoure d'une manière aussi désagréable que les cadavres. Elle rampe, se faufile, protège ses ailes en premier lieu – pas question qu'on les abîme, ces doux élytres brillants. 1940, perdue au fin fond de Londres.
Agressée par les habitants forcée de se cacher de se mêler à la foule - « allez petite fille c'est pas le moment de traînasser, où sont tes parents ? » elle aurait aimé répondre, leur cracher au visage que ses parents étaient loin, si loin que même avec toute la détermination du monde elle n'aurait pas pu les rejoindre.
Et on l'a emmenée on a agrippé ce frêle bras on a broyé cet os fragile entre des mains calleuses, des mains d'hommes comme elle les déteste comme elle les méprise – elle n'a pas bougé, elle s'est docilement laissée faire. Ecoutant le vacarme des bombardements, les larmes des enfants et la frustration des plus récalcitrants.
Claustrophobie au plus profond des abris, collée contre les inconnus et forcée de respirer leur haleine lourde la vampire grogne joue des coudes se fraie un chemin et passe la nuit dans un coin.
Boom, boom, boom.
Les abris ne tiendront pas les humains tomberont mourront comme de vulgaires insectes et elle sera là elle regardera elle dévorera
Cersei.

Une
deux
trois inspirations.
Elle prend le temps de battre des ailes de se frotter les yeux et de respirer encore encore et encore. Entière, elle est entière, un seul morceau de chair désespéré, une masse morte depuis trois siècles – oh, quelle tendre éternité passée à détruire cette enveloppe charnelle. Les marques de lames refusent de disparaître – faible.
Etendue au beau milieu de nulle part, elle se lève, elle se repère, elle bat encore des ailes et laisse le vent la soulever, caresser sa chevelure – détendre ses muscles.
Un
deux
trois battements.

Ses pieds quittent le sol, le rythme saccadé devient plus doux, plus calme – les bras enroulés autour de sa frêle carcasse, elle se frotte et tente vainement de se réchauffer. Encore une fois, elle s'est assoupie, elle s'est laissée aller dans une grotte – envahie par la nostalgie acide. Yeux frottés les vaisseaux sanguins éclatent en leur sein ; Cersei, dans toute sa splendeur, affronte le soleil et l'autorise à faire briller ses merveilleux ailerons.
Oh qu'elle est belle la lumière qui les traverse, ressortant dans des tons presque multicolores, presque poétiques. Elle aime se sentir belle, quitte à ce que ça ne soit que dans ses ailes. Alors elle traverse la ville jusqu'à ses propres appartements et s'occupe de nettoyer cette maigre enveloppe charnelle, préparée à affronter une nouvelle journée, un nouveau fardeau parmi des milliers d'autres.

Dehors, les passants passent, le vent souffle et les oiseaux piaillent – rien d'extraordinaire, alors que la mordue esquive chaque personne croisant son chemin, déterminée à revisiter le joli lieu qu'est le jardin des Fitzduncan. La nostalgie se glisse entre ses doigts s'incruste dans ses os et caresse vicieusement l'esprit fragile d'une petite fée aux pieds misérablement nus. La Faucheuse, la Faucheuse marche au milieu des plantes, respire leur tendre parfum mais n'en cueille aucune – elle les écoute leur conter leurs histoires, qu'elles soient roses ou tulipes, pommiers ou fraisiers.
La fraîcheur de l'aube lui chatouille les bras.

C'est dans cet état d'esprit délicatement paisible qu'elle volette, petite fleur au milieu d'une seconde famille : la Nature. Cette doucereuse Nature, avec une haine majuscule, une rancune au tendre arrière goût de frustration. Les émotions se bousculent mais aucune n'est dirigée vers Cersei, alors elle poursuit elle vole traverse hume et caresse.

Ces fleurs lui avaient manqué, tant d'années étaient passées.

ft. eugenia • hrp luv • dialogue #368bc1