Les jours se suivaient et se ressemblaient, et à mesure que le temps passait, l'enfant du pays se rapprochait un peu plus de Cora. Ses cheveux argentés avaient repris leur éclat -presque doré- et son teint avait embrassé les rayons du soleil, chassant ce que la mort avait laissé derrière elle. Un sourire espiègle avait remplacé la moue qu'elle arborait encore il y a quelques mois ; et le toucher. Perséphone ne se laissait pas approcher en sortant des entrailles de la Terre, mais on l'avait vue, aujourd'hui au village, caresser la joue d'une fillette pour calmer ses pleurs. Petit à petit, la Sicile retrouvait sa précieuse Cora, et bientôt on sembla oublier qu'elle était un jour partie.
Elle, en revanche, n'oubliait rien.
Perséphone quittait la ville tous les soirs -un peu avant le coucher du soleil, pour rejoindre les hauteurs de l'île où personne ne la dérangeait jamais. Son silence suffisait pour prétexter un besoin de solitude, qu'on lui accordait volontiers si tel était le prix à payer pour ne pas la contrarier.
Sauf que la déesse n'avait pas besoin d'être seule ; bien au contraire. Assise dans l'herbe, entourée des fleurs qu'elle faisait pousser tous les ans, elle attendait. Tous les soirs, elle regardait le soleil se coucher sur l'horizon, avec cet infime espoir de voir la terre s'ouvrir sur des ténèbres qui, progressivement, disparaissaient de sa mémoire comme un mauvais rêve.
Elle se leva, dos à la colline, les yeux rivés sur la ligne d'horizon derrière laquelle les bateaux disparaissaient pour rejoindre le continent. Un vent frais souleva les cheveux qui ondoyaient le long de son dos.
Et alors, un frisson d'effroi remonta le long de son échine.
Elle réprima un sourire, et ferma les yeux.
«
— Seigneur Hadès. »
Venu honorer la promesse qu'il ne lui avait jamais faite -le prince des ténèbres avait foulé la terre dont il avait été banni il y a des siècles de cela.
«
— Comme je le plains, d'avoir épousé une femme comme la sienne. »
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