I stay here all alone in the cold wondering where i'm going today.
Tout est noir autour de toi. Tout était noir au début et tout est noir, maintenant que tu arrives à la fin. À ta fin. Quelle triste façon de partir. Tu vois ton corps flotter parmi un océan de ténèbres, comme si ta conscience s'en était détachée.
Tu es morte. Tuée d'une balle dans la tête. Le trépas ne ressemble en rien à ce à quoi tu t'attendais, mais au moins, tu ne souffres plus. Tu ne ressens plus rien. C'est la première étape du décès, dit-on. D'abord l'engourdissement puis vient une lumière blanche. D'ailleurs, le voilà qui arrive, perçant l’obscurité de nul part, un rayon lumineux t'accueille en son sein, te happe puis t'emporte. Tu en aurais presque ris. Allais-tu au paradis ? Très peu pour toi.
Mais ce n'était pas le paradis.
∞
Tu te réveilles en sursaut au milieu d'un endroit qui t'es inconnu. Tu inspires longuement, comme si tu sortais d'une grande apnée.
Une grande apnée appelée mort.
Tu inspectes ton corps, histoire de t'assurer que tu es entière. C'est le cas. Mais tu ne comprends pas. Tu ne comprends rien. Tu étais morte. Tu en es sûre. Tu te souviens encore de la balle traversant ta tête. Tu te souviens encore du goût de la mort sur tes lèvres. Mais te revoilà. Apparemment, bel et bien vivante.
Ne sachant que faire, tu ne peux penser qu'à marcher. Vers où ? Peu importe, tant que tu quittes cet endroit. Tu as toujours détesté la neige et la voilà qui t'encercle à des kilomètres à la ronde. Autour de toi, tout est blanc à perte de vue et au loin, on peut voir la silhouette sombre des montagnes se découper dans le ciel. Tu ne supportes pas tout ce blanc.
Tu tentes une première fois de te mettre debout. En vain. C'est à peine si tes muscles répondent. Tu as l'impression que ton cerveau est réduit à l'état de mucus. Si tu éternuais, il te sortirait probablement par le nez. C'est sans doute l'effet de la mort. Ou plutôt de la résurrection. Cette dernière engourdit complètement tes capacités motrices et de réflexion. Tu tentes une seconde fois de te mettre debout. Cette fois-ci, tu y parviens. Du moins, tu ne tombes pas. Tes pas sont lents dans l'épaisse couche de poudreuse et très vite, le froid commence à pénétrer ta peau. Ce n'est que maintenant, alors que la neige resserre ses doigts de givre sur ton corps, que tu te rends compte que tes vêtements sont dans un état pitoyable. Évidemment. Avant de mourir, tu venais d'encaisser une
explosion qui avait fait de tes habits, des guenilles.
La combinaison noire que tu portes n'a maintenant plus de manche. Elle est déchirée au niveau du ventre, et une des jambes a complètement disparue tandis que l'autre a seulement été raccourci, quand aux chaussures, tu n'en a plus.
Et puis, il y a la douleur.
Cette douleur que tu ne ressentais plus pendant que tu errais morte, dans les ténèbres. Cette douleur qui commence à reprendre sa place dans ton corps. Cette douleur que tu exècre.
Tu aurais préféré rester morte.
Puis soudain, tu t’arrêtes. Immobile dans la neige, l'impression de froid te semble encore plus accablante. La sensation d’hébétement ne fait qu'augmenter. Et elle te donne envie de dormir. Là, maintenant. Tout ce que tu veux, c'est céder à cette soudaine et irrésistible envie de dormir.
Mais Jane, ne serait-ce pas quelqu'un là-bas ?
Trop tard. Déjà, tes yeux se ferment.