I have time to lose. But not with you. ~ Pv Ginger

I have time to lose. But not with you.

« J'ai de la peau qui décolle, tellement ça m'a brûlé. »

Ginger baissa la tête vers le bras d’Abiel. Effectivement, la peau était assez rouge et partait en quelques endroits. Pas très ragoutant.

« Mais…,commença la petite fée, si t’es un dragon pourquoi la chaleur te fait mal à ce point ? »

C’est vrai ça pourquoi ? Si Smaug avait mal au bras à cause d’une crêpe, le film aurait été bien moins épique alors pourquoi lui ça lui fait mal comme ça ?
Quoique, Smaug ne fait pas de truc de fifou dans l’eau en revanche. C’est quoi ce gars, un dragon sous-marin ? Depuis son arrivée ici, plus rien n’étonnait Ginger alors elle se contenta de mettre cette thèse dans la catégorie « probable » .
Elle fronça les sourcils et enfonça son visage dans l’eau jusque sous les yeux pour cacher ses joues qui viraient rouge de honte. La manipulation d’Abiel faisait son effet : elle se sentait coupable. Après tout, elle l’avait blessé pour rien. Bon, sa culpabilité était atténuée par la frayeur qu’il lui avait fichu tout à l’heure, mais quand même, elle était là et c’était très désagréable.

De son côté, Abiel s’était à nouveau immergé. Ginger restait donc là, faisant des bulles dans l’eau avec sa bouche en attendant que la trace de sa honte se dissipe enfin. Vous vous doutez donc bien que lorsque la jeune fille entraperçu la nudité de l’homme-dragon à travers la transparence des flots, ses rougeurs reprirent de plus belle.

« Mais il est à POIL lui ! » pensa-t-elle.

Oui, Ginger est dotée d’un sens d’observation et de déduction assez incroyable.
La réaction de la fée était sûrement assez comique. D’abord plus rouge que le sang qui tachait son pull, son visage se décrispa rapidement et repris son habituelle expression blasée. Bon, ce n’était pas le premier humhum que Ginger voyait dans sa vie. En effet, sa mère, une vraie hippie dans l’âme, l’avait une fois emmenée dans un camp de vacance de naturistes parce que les vêtements c’est la marque de l’homme moderne capitaliste. Autant vous dire que Ginger n’avait pas bougé de sous sa couette de toutes les vacances après la vue foudroyante qu’elle avait eu le déplaisir de voir en arrivant. D’un coup, elle en avait vu une bonne dizaine, elle était donc plus ou moins immunisée contre ce genre de vision.
Néanmoins, c’était gênant. La brunette détourna donc rapidement le regard et préféra se concentrer sur les plantes qui poussaient sur la berge. C’est drôle, elle n’avait jamais ressenti d’affection particulière pour les êtres végétaux (malgré sa nature de semi-fée oui) mais là, elle remerciait les dieux de lui offrir autre chose à regarder que….ça.

Quelque chose l’intrigua alors. Parmi les plantes se trouvait une espèce qui en temps normal ne pousserait pas dans un milieu aussi humide. Curieuse, elle ouvrit ses ailes et s’extirpa des eaux froides de la rivière pour observer de plus près son nouvel objet d’intérêt. Oui, c’était bien ça. Cette plante s’avérait être de l’aloe vera, et c’était franchement bizarre qu’elle pousse dans un coin pareil. Elle s’y connaissait un peu en plante (merci maman) alors elle était formelle. « Sûrement un coup des elfes du coin » pensa-t-elle en haussant les épaules.
Cependant, cela lui donna une idée. Elle arracha plusieurs bouts de feuilles qu’elle s’afféra à écraser avec un gros galet. Le tout était une mixture verte, grasse et informe, et dont la première faculté était de *roulement de tambour* soigner les brûlures !

De ces deux mains, Ginger ramena donc sa bouillie vers Abiel et s’assit en tailleur au-dessus de lui, dans les airs.

« Hé Abiel ! cria-t-elle des fois qu’il ne l’entende pas sous l’eau, montre ton bras j’ai un truc pour cicatriser un peu. »

C’était pas de la médecine de haute voltige, mais c’était toujours mieux que rien. Et n’allez pas croire qu’elle faisait ça pour se faire pardonner hein ! C’était juste pour faire taire cette saloperie de bonne conscience une bonne fois pour toute.

I have time to lose. But not with you.

« Alors c'est quoi ce truc? C'est mieux d'être apaisant, parce que je vais devenir agressif à force de sentir ça. »

La petite fée déglutit avec difficulté et hocha la tête, vachement moins sûre d’elle sur le coup. Elle s’approcha à petits pas d’Abiel, qui avait quitté la rivière et s’était assis dos à elle, pour son plus grand soulagement. Elle inspira longuement avant de faire le moindre mouvement.
Ginger n’avait pas de diplôme d’infirmière et ne se basait que sur la médecine approximative et naturelle que sa mère affectionnait tant. C’était un peu bancal, mais ça marchait vraiment, la brunette le savait par expérience (petite, elle s’était brûlée en jouant avec des allumettes, sa mère lui avait donc fait le même genre de bouillasse verte, en plus élaborée).
Cependant, elle savait que si elle se plantait, ou qu’elle y allait trop fort, elle ne donnerait pas cher de sa tendre peau de fée. Il suffisait d’entendre le ton sec et agressif qu’avait utilisé son « patient ».

Ginger se mordit l’intérieur de la joue pour ne pas se mettre à trembler, d’appréhension, mais aussi de froid (parce que quand on tombe dans la rivière, les vêtements mouillés après, ça aide pas). Puis, elle entreprit de déposer le plus déééélicatement possible sa bouillie de plante. Après, elle l’étala sur la brûlure de l’homme dragon, toujours aussi doucement. Elle avait beau en avoir marre d’elle, Gin trouvait que sa tête était bien mieux quand elle reposait sur ses deux épaules. Elle prit donc mille et unes précautions en soignant Abiel.
Une fois sa mixture appliquée sur l’épiderme du blessé, elle déchira un bout de manche de son pull avec ses dents (il était foutu de toute façon) et fit un bandage pas trop serré autour de son bras.

Elle observa son travail, puis se releva, plutôt satisfaite. Elle n’avait vu ça que dans des séries (le coup du bandage fait avec un bout de fringue) et trouvait que ça le faisait plutôt bien tout compte fait !

« Bon alors, normalement ça devrait apaiser la douleur, et si t’as assez de patience pour garder le bandage quelques jours, ça devrait aider à cicatriser. Je te conseillerai quand même d’aller dans un hosto, ou un truc du genre, mais bon, j’sais pas si c’est trop ton truc les hôpitaux… »

Bah oui hein. Dans les films, les méchants veulent jamais aller à l’hôpital quand ils sont blessés. Ça doit être la même chose pour lui. Enfin, peut-être.

I have time to lose. But not with you.

« Merci du conseil. »

Wow… Il avait eu la politesse de la remercier mais… niveau chaleur humaine, on pouvait dire qu’il se surpassait pas. M’enfin, au vu de ce que Ginger connaissait de lui, elle ne s’attendait pas vraiment à ce qu’il lui tombe dans les bras et lui fasse une grosse bise de remerciement hein. De toute façon s’il l’avait fait, elle se serait jetée dans la rivière.
Ginger ne sait pas y faire avec la tendresse.

« La prochaine fois, je ne te laisserai pas une telle chance, Ginger. Souviens-t-en. »

Yep, cette phrase confirmait les doutes de la brunette, Abiel était toujours d’une humeur de chien. Mais elle ne se laissa pas démonter pour autant et haussa les épaules en affichant un léger sourire espiègle.

« La prochaine fois je te balancerai pas de crêpes dessus. Je fais (presque) jamais la même erreur. »

Sur ce, elle s’écarta quand l’homme dragon se releva et l’observa rejoindre la rivière. Ne sachant pas encore si elle pouvait s’en aller -parce qu’après toutes ces émotions, elle n’avait qu’une envie, rentrer chez elle et squatter le canapé tant qu’elle pouvait- elle se balança d’un pied à l’autre, les mains dans le dos, en attendant un signe quelconque lui  assurant qu’elle pouvait quitter les lieux impunément, sans risquer de se faire poursuivre par un dragon géant. Quand elle le vit se jeter dans l’eau comme s’il n’avait rien, elle se colla une deuxième claque sur le front -bien moins forte cette fois.

« Mais fais gaffe patate, ton bandage va… Oh, et puis merde hein, fais comme tu l’sens. »

Ginger nota de ne pas se questionner sur la logique des dragons aquatiques. Le risque de migraine est trop important.
N’empêcha qu’elle s’était drôlement appliquée pour le faire ce bandage. Bon certes, c’était surtout pour garder sa tête à sa place, sur ses épaules, mais quand même ! C’est toujours frustrant de voir le fruit d’un dur labeur partir en sucette à peine deux minutes après sa création !
Elle vit Abiel se tourner vers elle et elle plongea ses iris noires dans les yeux ambrés du garçon, avec une certaine appréhension dans le regard. Qu’allait-il dire cette fois ?

« J'vais pas te retenir plus longtemps, petite fée. »

Gin fit les grands yeux, surprise par cette déclaration. Bon, ça sentait un peu la menace mais elle s’en fichait. Rares étaient ceux qui la laissaient partir comme ça après un tel accrochage.

« Tu me laisses partir ? Genre, tu vas pas me voler après hein ? Ça serait trop fourbe ! »

À la réflexion, ça ne lui ressemblait pas de faire ce genre de chose. C’était plutôt le truc d’Elliot les coups de putes dans le dos.

« En fait non, j’ai rien dit. Salut Abiel, c’était marrant de traumatiser les petites filles avec toi ! »

Parce que ouais, c’était vraiment marrant en fait. Sur ce, la petite fée ouvrit ses ailes et s’envola vers d’autres cieux. Restait plus qu’à retrouver le chemin de la maison maintenant.
En chemin, Ginger se remémora cette journée et en conclut que la morale du jour était la suivante.

Avant de lancer une crêpe brûlante sur un salaud, assure-toi toujours qu’il ne risque pas de se transformer en gros reptile volant. Question de survie