Dans le bain [Pv : Zeus & Elise]

Rien n’aurait pu expliquer la présence de Zeus dans un parc d’attraction par une telle journée. Certes, il n’était pas rare de te voir rendre visite aux habitants de l’île – principalement aux jolies demoiselles qui s’y trouvaient – mais franchement, qu’avais-tu à faire dans un parc d’attraction ? La cacophonie ambiante te donnait presque des envies de meurtre et il y avait beaucoup trop de personnes pour la faible superficie de l’endroit. Les manèges faisaient un bruit démentiel à t’en donner mal au crâne – ce qui était quasi impossible compte tenu de ton titre de Dieu – et les cris enjoués de ceux qui t’entouraient te donnaient encore plus envie d’enfoncer la tête de quelqu’un bien profond dans un mur. Pour tout dire, tu n’avais aucune envie d’être ici et jamais plus on ne reverrait le Dieu des Dieux dans un tel endroit. C’était bien la première fois que tu y mettais les pieds et c’était justement à cause de l’aversion que tu avais envers cet endroit qui t’avait poussé à apparaître ici, parmi la foule de personnes qui s’entassaient et se dirigeaient vers un endroit ou un autre. Tandis que toi, tu étais bien immobile, regardant tout autour, cherchant un endroit qui serait beaucoup plus calme et où tu pourrais aller réfléchir tranquillement. Parce que, avec le tintamarre qui t’entourait, il t’était même impossible de t’entendre penser. Tu devais donc trouver un endroit plus calme, et vite.

Ce fut comme une idée de génie. Et oui. Tu remarquas la courte file qui s’allongeait peu à peu face à une attraction qui semblait tout à fait paisible. Un peu de meilleure humeur face à cette découverte, tu parcourus en grandes enjambées la courte distance qui te séparait de l’attraction. Attraction conçue spécialement pour toi, tu en étais sur. En t’approchant un peu plus, tu étais encore plus soulagé de voir que l’attente n’était pas bien longue et que les nacelles défilaient assez rapidement. Ce fut donc rapidement ton tour. Alors que tu t’approchais de la nacelle, quelques gouttes d’eau vinrent s’écraser sur tes baskets. Tu enjambas le bord de la nacelle et prit confortablement place alors que des vagues vinrent glisser sur le bord du petit bateau où tu venais de prendre place. La nacelle enclencha son premier mouvement puis glissa doucement sur l’eau. Tranquillement. Paisiblement. Un fond sonore d’animaux accompagna tes pensées. Tu te sentais soudainement mieux, plus paisible. Toujours cet étrange envie d’assommer quelqu’un, mais celle-ci commençait à s’atténuer alors que la nacelle avançait calmement. Le seul problème était que tu savais pertinemment que l’attraction prendrait fin. Chose qui te désolait, compte tenu que l’endroit n’était pas si mal. Le silence était d’or, si on oubliait les quelques bruits en arrière-plan qui n’étaient pas si dérangeant que cela. Oui, tu venais de trouver l’endroit où tu passerais très certainement la journée, le temps que tout se calme à l’Olympe. Une tempête venait de se déchainer et tu n’avais pas trouvé meilleure idée que de fuir sur l’Île, dans un lieu où personne ne penserait à venir te chercher.

Voyant quelques faux animaux qui s’élevaient tout autour de toi, tu eus l’idée la plus brillante – ou la plus stupide, au choix – que tu n’eus jamais eu. Te redressant sur tes deux jambes, tu sautas par-dessus le rebord de la nacelle pour atterrir élégamment sur la rive. Tes baskets étaient cependant tâchés de boue, ce qui te désolait. « Je les aimais, moi, ces baskets » soupiras-tu alors que tu faisais quelques pas. Mieux valait que personne ne te voit ici. Tu allas donc t’assoir derrière un de ces faux animaux immobile, appuyant ton dos contre la paroi métallique. Maintenant, tu pouvais finalement souffler, les yeux fermés, alors que seul le clapotis de l’eau et quelques sons parvenaient à tes oreilles. Il fallait que tu patientes ici. Il était hors de question que tu retournes à l’Olympe immédiatement. Habituelle, tu n’avais pas froid aux yeux, tu allais de l’avant, face aux obstacles sans crainte ni peur. Tu étais un Dieu. Tu étais LE Dieu. Tu n’avais pas habitude de fuir devant le danger. Autre peut-être ce danger qui te menaçait actuellement. S’il y avait bien une personne à qui tu ne voulais pas faire face alors qu’elle était en colère, c’était bien ton épouse. Il y avait quelques jours, tu avais eu une aventure. Rien de bien important, simplement une fille que tu avais connu l’histoire d’une nuit. Or, c’était parvenu à ses oreilles. Et voilà qu’elle invectivait à l’Olympe, criant à qui le voulait bien que son mari n’était qu’un salopard, un infidèle, qu’il n’avait aucun respect pour elle-même. Dans ces moments-là, tu savais qu’il valait mieux fuir l’histoire d’une journée ou deux, qu’elle se calme un peu. Puis, tu subirais son mécontentement, son discours que tu connaissais par cœur. Tu hocherais de la tête, comme tu en avais l’habitude puis l’éponge serait passée. À nouveau, tu auras une aventure et l’histoire se répétera éternellement, comme cela était déjà le cas depuis quelques millénaires. Et pourtant, tu l’aimais Héra. Seulement, voilà, tu aimais aussi les femmes, à son plus grand damne.

Alors que tu réfléchissais à ce que tu allais dire à ta charmante épouse, une fois retourné à l’Olympe, tu entendis quelques pas précipités. Tu ramollissais, Zeus. Trop concentré à ce que tu allais dire à Héra pour qu’elle finisse par te pardonner – comme elle le faisait toujours – tu n’avais pas entendu la personne se rapprocher de toi. Tu ouvris donc les yeux et te redressas juste à temps pour entendre le bruit singulier de l’eau lorsque quelqu’un tombait malheureusement dedans et pour voir ladite personne tomber dans l’eau. Ce n’était pas bien creux, elle allait très certainement rejoindre la rive. Du moins, ce fut ce que tu pensas, en un premier temps. Jusqu’à ce que tu l’observes en train de couler misérablement vers le fond de l’eau. Tu soupiras. Malheureuses créatures qu’étaient les mortelles. Cependant, tu étais beaucoup trop empathique et tu avais tout de même assez de cœur pour ne pas regarder quelqu’un mourir sous tes yeux, principalement si tu pouvais faire quelque chose pour l’aider. Remontant les manches du pull en laine beige que tu avais enfilé, tu sautas à l’eau, aussi simplement que cela. Tu aurais soudainement préféré que ce soit ton frère qui se soit retrouvé ici plutôt que toi, il aurait simplement pu la sortir de là sans avoir à se tremper. Attrapant le frêle corps de la demoiselle, tu l’attiras contre toi et nageas jusqu’à la surface avec un poids en plus. Te trainant hors de l’eau, tu l’hissas sur la rive et l’amenas derrière les quelques animaux, histoire de ne pas attirer l’attention. Tu te demandais ce qui lui avait pris, que de se précipité ainsi vers la nacelle alors qu’elle partait. En fait, tu te demandais surtout pourquoi avait-elle mise pied sur la rive.

Pestant contre tes courts cheveux blonds, désormais trempent, qui chatouillaient ta nuque, tu t’accroupis près du corps que tu venais d’allonger sur l’herbe synthétique. Tu passas une main sur son front pour dégager ses cheveux. Passant ensuite une main sur son cou, tu perçus nettement son pouls. Au moins, elle était vivante. Tu la regardais fixement, espérant qu’elle reprenne vite conscience. Ce fut lorsqu’elle papillonna des paupières que tu eus un soupire de soulagement. « Tu vas bien ? Ou enfin, mieux ? » Parce que bon, impossible d’aller bien alors qu’on frôlait la mort. Du moins, c’était ce que tu te disais comme la mort n’avait jamais été un concept auquel tu t’étais attardé. Seul un Dieu ou un Titan pouvait prétendre pouvoir attenter à ta vie. Et nul ne s’y était encore jamais tenté. Ou enfin, plus depuis que tu avais envoyé les morceaux séparés de la dépouille de ton cher paternel dans le Tartare. « Il y avait une raison particulière pour que tu ais mise pied ici ? Tu aurais pu sagement rester dans ta nacelle et rien ne serait arrivé. » Légèrement accusateur, il était vrai que tu trouvais son geste complètement inconscient et insensé. Elle aurait dut rester dans sa nacelle, tu ne serais pas en ce moment tremper de la tête au pied, ton pull en laine ne te pèserait pas sur tes épaules, tes baskets ne seraient pas définitivement finis et ton jeans ne te collerait pas à la peau. Elle avait été inconsciente et tu t’étais senti obliger de jouer au super-héro. Tu pris place au sol plus confortablement, assis en tailleur, tes yeux posés sur la demoiselle que tu venais de sauver d’une mort certaine.