La Dragonne & le Feu Follet [Ketra]

Il devait être environ minuit lorsque j'ai ouvert les yeux, je me suis retrouvée allongée au sol, à l'entrée de la forêt. J'ignore combien de temps cela faisait que je me trouvais ici, non parce que je ne me souviens même pas du pourquoi du comment. Non je n'ai pas bu, parce que j'ai encore l'esprit lucide et j'arrive à un minimum de sentir sur pieds alors qu'est ce que je fais ici ?
Me relevant du par terre herbeux de la plaine de l'île, je me redresse et retire en grognant les petits brins d'herbes qui se trouvaient dans ma chevelure de feu. Je peste intérieurement contre moi-même, me parlant presque telle une vraie psychopathe. Bordel, qu'est ce que je ne suis pas douée... Je reprends petit à petit mes esprits à mon réveil et j'observe autour de moi, minuit avait dû déjà sonner, vu la position de la lune haute dans le ciel, il ne fait pas de doutes : je me suis soit endormie, soit on m'a foutu un coup sur la tête, ou alors j'suis devenue complètement tarée. Ah !

Alors que je m'apprêtai à repartir pour mon chez-moi glacé, j'entends comme une sorte de voix, un appel, la voix semble m'interpeller. Je me retourne et je découvre... la silhouette de mon bien aimé. Je ne comprends pas, il est mort putain ! Il a été tué ou j'en sais rien, mais il n'existe plus ! Je suis devenue folle à cause de lui, pourquoi il revient me hanter ?!

— LAISSES-MOI TRANQUILLE ! Tu m'as assez fais souffrir comme ça ! DÉGAGES !

Mais la voix insiste, la silhouette... Je la reconnais tellement. Je dois halluciner c'est pas possible. Les larmes me montent aux yeux et je commence à me sentir mal. Je tremble de tout mon corps et j'ai envie de hurler ma peine. Je grogne, je tremble, je me sens souffrante et je regarde toujours cette silhouette cachée devant l'entrée de la forêt qui ressemble énormément à celui que j'ai aimé... J'ai envie de le serrer dans mes bras et me dire que tout ça ne fut qu'un rêve, qu'il n'était pas mort, qu'il était toujours là, prêt à m'aimer...

Je me mets donc à suivre le chemin pour aller jusque dans la forêt. Là, la silhouette semble s'évanouir dans une brume blanchâtre, je dois rêver là non ? Mais je continue ma progression, je suis comme une désespérée une ombre dont je ne connais pas l'origine ni même si elle existe.

— Attends-moi ! Pourquoi tu me fuis ?! T'es censé m'aimer !

Continuant de la poursuivre, l'ombre m'attend à une sorte de croisement, là j'essaie de la surprendre et je finis par tomber sur quelque chose, un caillou. Je trébuche et je tombe la tête la première au sol. Bordel, c'est bien ma veine... Je relève mon visage et je ne vois plus le feu follet que je suivais. Je dois vraiment être folle. Je me recroqueville contre moi-même, adossant mon dos contre un arbre avant de me mettre à pleurer à chaudes larmes, je tremble, j'ai envie de craquer... J'en peux plus. Je place mes deux mains dans mes cheveux avant de serrer fort des mèches. Je me mords la lèvre à m'en faire saigner, j'ai juste envie... qu'on m'laisse tranquille...

Mais finalement, la folie l'emporte et je commence à taper des pieds, je hurle à pleins poumons ma peine... J'en ai marre, marre et remarre de cette souffrance. Je tiens bon depuis ces derniers jours, cela fait à peine une petite semaine que tout ce cirque à commencé, je dois... tenir... Mais je dois d'abord m'exprimer et je continue de hurler ma peine à la lune, je pleure, je tremble...

Je ne bouge pas de là où je suis, je continue de sentir des larmes me couler des yeux, je tremble de tout mon corps comme si j'étais en train de me congeler sur place mais c'est tellement d'émotions négatives qui m'entourent que mon coeur n'en peut plus, mon corps est fatigué, je suis épuisée... Physiquement, mentalement, je me suis déjà blessée plusieurs fois, j'ai pas arrêté d'avoir ces satanées insomnies, je ne fais que ça : me morfondre et mourir à petit feu. Je suis en train de devenir folle et j'en suis consciente mais ce lien me rend malade, je n'en peux plus. Saphir ma mésange bleue est présente à mes côtés mais même ses mots ne suffisent pas à me soutenir, ni même m'apaiser.

C'est alors que j'entends une délicate voix venant des bois...

Encore ce foutu fantôme ?! Non je ne peux pas y croire ! La voix se rapproche, elle me demande de me calmer, mais non je ne peux pas ! Je tremble encore plus et je me crispe sur moi-même en ayant encore plus les larmes aux yeux, comme si j'étais sur le point d'exploser sur moi-même...

Quelle vision atroce je donne moi... Je fais pitié en étant comme ça mais c'est plus fort que moi, je ne peux pas éviter cette folie qui m'envahit toujours un peu plus. Peu à peu, la pulsion se calme et mon corps reprend petit à petit son contrôle. Les tremblements se font plus légers, moins forts. Mes sanglots cessent et ce ne sont que des larmes d'apaisement sur mes joues qui coulent.

Mon visage se relève donc jusqu'à cette femme, son visage me dit quelque chose mais je n'arrive pas à m'en souvenir. Je suis un peu perdue, je la regarde avec un regard vide d'émotion, comme si elle était transparente à mes yeux. Je suis juste perdue, et j'espère qu'elle... ne m'en voudra pas.

— Il m'emmerde à se jouer de moi... Il m'énerve à me fuir, à me torturer...

Comme un robot mécanique, je sors ces mots avec strictement aucune expression particulière, je suis vidée de toute énergie. J'ai qu'une envie c'est de m'allonger et dormir, me reposer... Ou pire encore, que la mort m'emporte afin de rejoindre les âmes mortes...

— Je suis sûre qu'il est dans les bois, je l'ai suivi... depuis la maison. Je me mets à rire. Il est fatiguant...

Je regarde cette satanée ange venir à ma rescousse, sans déconner, j'ai vraiment l'air d'être une princesse en détresse ? J'sais pas, les gens s'inquiètent toujours dans la ville quand ils me voient délirer complètement. Ouais, peut-être que je délire, que j'hallucine mais pourtant je suis pratiquement certaine que j'ai pu déjà sentir la caresse de mon... ancien bien aimé sur ma peau, j'en suis sûre, il était là il y a quelques minutes, tous les jours il vient me voir, il vient me parler, et je lui crache dessus, parce qu'il m'énerve à me fuir, il m'a rendue triste, il m'a déçue, pourquoi il me fait subir tout ça ? Il peut pas crever et me foutre la paix ? Je suis dure, mais j'en ai marre, franchement marre de courir après un être qui ne veut plus de moi pour une obscure raison. Tout s'est passé tellement vite, très vite. J'ai rien vu venir... Maintenant je suis seule, sans aucune raison de vivre, alors pourquoi me faire chier à parler aux gens, à leur expliquer ma détresse ? Pour qu'ils me prennent encore plus pour une demeurée ?

— IL ME HANTE ! m'écriais-je subitement. Je l'ai suivi, il voulait que je le suive, il me parle tous les jours puis il disparaît, je crois que je deviens folle à lier à force... J'en ai marre.

Elle veut m'aider ? Elle veut m'aider, vraiment ? Dans ce cas là je vais la tester, voir si elle est vraiment capable de m'aider. Mais ça, ça viendra après, parce qu'il n'y a qu'une chose qui peut m'aider, donc elle va devoir s'armer de courage pour pouvoir m'aider. Alors j'attendrai qu'elle fasse son speech pour lui annoncer la couleur et la seule et unique solution pour arrêter cette folie qui me gagne de plus en plus chaque jour qui passe.

— J'ai saccagé mon chez-moi... toute façon. J'ère ici et là, je rentre juste chez moi pour dormir c'est tout... j'en peux plus.

Je lui avais parlé d'une voix sèche et claire, parce que toute façon, j'ai tout cassé, je dors limite à même le sol, sans vraiment m'en soucier. Cette maison possède bien trop de souvenirs à mon goût et j'voudrai juste soit mourir, soit devenir amnésique, voilà, c'est tout, je veux tout oublier ou qu'on me foute la paix. Complètement.

— Je suis devenue folle... Y'a rien d'extraordinaire... Je suis seule, je me raccroche au fantôme réel de lui...

A ce point, on est fou non ? Je parle la nuit aux fantômes que je vois dans mes rêves, que j'imagine, je revois les souvenirs, je ressens de la douleur physique et mentale, à ce train là au final, je vais plutôt devoir me faire interner quoi.

Cela ne m'aurait clairement pas dérangée de ne plus la revoir, elle... elle fait partie de mon passé, que je le veuille ou non, il était encore avec moi lorsque je m'étais battue avec elle, c'était lui qui m'avait guérie de mes blessures... Pourquoi elle devait revenir dans ma vie ? Je veux juste faire un nouveau chapitre bordel, je veux qu'on me laisse tranquille, toute façon, à quoi bon lutter ? Je vais finir au fond d'un trou si ça continue et je l'aurai bien mérité. Pourquoi j'ai osé m'attacher à quelqu'un ? Pourquoi il m'a laissé ? Ces vampires sont de parfaits connards... ils veulent juste faire chavirer les cœurs et délaisser ceux qui prennent pour des banques à sang personnelle. Et dire que j'en étais accro... Je peux encore sentir la douleur mêlée au plaisir de recevoir cette morsure... si fantastique.

Soudainement, je me relève, je vois qu'elle veut m'aider, je le comprends assez facilement sauf qu'elle ne sait clairement pas ce qu'il m'arrive. Je veux pas la blesser, enfin si peut-être, enfin je sais pas. Je suis complètement perdue et j'ai qu'une envie c'est filer loin d'ici, je veux pas qu'elle puisse m'attraper... Je...
Je me raccroche alors à un arbre près de moi alors que je sens la folie me reprendre, ahah... Je peux sentir une aura bien connue... il est encore là, je le vois derrière cette ange ! Sans m'en rendre compte, l'arbre sur lequel repose ma main commence à se geler de ma main, je ne contrôle rien, pas même mes pouvoirs, pas même mes émotions.

— Comment tu veux effacer son image ? Il me faudrait devenir amnésique ! Ahah... Mais que dis-je, tu n'as sûrement pas ce don ! Pas mêmes des dieux me viendraient en aide !

Oui, je divague, je rêvasse, je dis n'importe quoi, et c'est sûrement cette saleté de folie qui m'anime toujours plus à chaque fois que je sens sa présence, mais tout ça, c'est autant de foutues hallucinations.

— "Il" est derrière toi, il me regarde, il te regarde... Je suis sûre qu'il s'amuse de mon état ! dis-je d'une voix colérique tandis que je pointe du doigt le vide derrière Ketra qui devait certainement encore plus me prendre pour une folle. Ahh... Si seulement... je pouvais tout recommencer et ne jamais accorder ma confiance à ce foutu vampire... Je les déteste, je les déteste tous !

— Tu ne peux pas m'aider... Sinon comment tu vas t'y prendre ? demandais-je finalement en redressant mon regard vers le sien, croisant nos regards durant un instant où je lui posais une question vraiment sérieuse.