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 ••• skeletal heart ; Hiroyuki

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Anonymous
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••• skeletal heart ; Hiroyuki | Mar 23 Aoû 2016, 23:36


skeletal heart

──C'était rare que tu sortes, que tu te bouges le cul de ton vieil appartement miteux, que t'ailles te confronter à la lumière du jour alors que t'étais encore crevée d'une nuit passée dehors à chasser les salauds, les soûlots qui se bourraient la gueule avant d'aller rejoindre leur femme, ou une de celles qu'ils avaient. Tu t'en fous, qu'ils soient de bonnes ou de mauvaises personnes, tu t'en fous de l'identité qu'ils ont décidé de jouer - en fait tu t'acharnais sur eux pour te donner bonne conscience au réveil. Tu prétendais être une justicière alors que tu n'étais rien d'autre qu'une meurtrière. Et quand le jour se lève, ils te traquent. La police est à tes trousses, et l'inspecteur maudit sait déjà que c'est toi. Mais tu vas le détruire, tu le sais, tu le sais parce que t'as déjà décidé de son sort.

──Mais ce jour-là, t'étais sortie. C'était pas pour prendre l'air et encore moins le soleil - de toutes façons les nuages avaient décidé que ce serait pas pour aujourd'hui -, c'était juste le café qui commençait à être un facteur limitant - et surtout limité. Le sachet était presque vide et tu tiendrais pas la journée avec seulement trois tasses. Donc t'étais sortie, déambulant comme un zombie et errant comme un fantôme. T'avais la tête dans le cul et des cernes sous les yeux, mais tu te sentais bien - il faisait moins puant et humide dehors que chez toi après tout. Le sol était humide mais tu te rappelais pas qu'il avait plu cette nuit - après tout tu ne t'étais pas réveillé avec les cheveux mouillés.

« Salut, Charles. »

──Le vieil homme derrière son comptoir relève ses yeux fatigués vers ta silhouette courbée. Il peine à te reconnaître sous la capuche de ton pull mais tu finis par la descendre de ta tête et il sourit alors. Il te parle de sa nièce - Aurélie, la blondinette aux yeux bleus que tu connaissais sans jamais l'avoir vue autrement qu'en photo. Elle est tombée, Aurélie, hier, et elle a été blessée au genou - c'est fou ce que ça te passionnait, ces histoires. On aurait dit que ta vie était passionnante à côté de la sienne, mais c'était pas trop grave, il était vieux. Sa nièce, elle était morte à quarante-sept ans et il en parlait encore tous les jours, comme si elle avait eu huit ans la veille. Prudence, elle connaissait Charles depuis longtemps, elle l'avait vu mourir petit à petit pour finalement devenir un spectre de lui-même, un peu comme elle le faisait aussi. C'était la seule raison qui la poussait à aller le voir lui plutôt que le marchand d'en face, bien plus dynamique et... brillant.

──C'était toujours comme ça, t'avais toujours été attirée par les déchets, les handicapés et les vieux. Les autres t'inspiraient chaque fois le mépris.

──Tu prends ton sachet de café, tu lui laisses l'argent dans la main et lorsque tu relèves la tête, tu hausses les sourcils. Lui, tu t'en souvenais comme si tu avais eu huit ans hier. Un maigre sourire se dessine sur tes lèvres et tu te sens perdue. Il réapparaissait, comme ça, sorti de nulle part, comme venu directement de ton passé pour te rappeler comme c'était laid, autrefois - bien plus qu'aujourd'hui d'ailleurs. Il est là, avec sa gueule de crève-faim (on peut pas lui en vouloir), et tu sais même pas s'il t'a vue - reconnue.

« Tu t'es pas arrangé, hein ? »

──C'était un monstre, lui, et il avait pas eu peur d'elle qui était un monstre aussi. Il était moche, qu'elle s'était dit, la gamine. Et elle avait raison, mais elle était plus laide encore, à bouffer les gens parce que ça la faisait se sentir vivante. Maintenant que t'étais là, face à lui, tu savais plus qui il était, tu savais plus parce que le temps avait passé, qu'il avait disparu, s'était évaporé comme s'il n'avait jamais existé. T'avais même cru à un ami imaginaire que tu te serais inventé pour passer ta rage et ta solitude. Mais il était là, à raviver des souvenirs que tu pensais ne jamais te rappeler. La gamine c'était toi, mais tu t'en rappelais pas.





Anonymous
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Re: ••• skeletal heart ; Hiroyuki | Mer 14 Sep 2016, 19:08


skeletal heart
featuring Prudence


La banalité de ses journées avait fini par ennuyer Hiroyuki. Certes, il devait l’admettre, il avait recherché cette vie monotone à l’écart d’une population qui ne pouvait le comprendre - et il avait même décidé de s’installer dans un endroit éloigné, même au sein de cette communauté surnaturelle. Parmi toutes ces mesures, son ennui s’imposait - mais les natures variées des nombreux habitants présents lui autorisait quelques visites en extérieur sans risquer d’imposer une crise cardiaque à quelqu’un d’autre.  Malgré tout, il évitait de trop s’exposer - mais pour peu qu’il soit forcé de vivre dans un endroit comme celui-ci, il se permettait d’écouter ses propres caprices lorsqu’ils s’imposaient un peu trop à lui. Parfois, même, il gardait sa réelle apparence pour effrayer les gens un peu trop fiers - il avait beau craindre un nouveau dérapage, il essayait de se débarrasser de cette phobie en agissant à son encontre. Ce matin, c’est avec cette idée en tête qu’il quitta sa maison si bien rangée pour une marche jusqu’à Skyworld - et le monde présent ne le découragea pas. Le visage impassible, un sourire ineffacable dessiné dessus, il marchait les mains dans les poches de son inséparable veste bleue - et tournait la tête presque avec hyperactivité, à la recherche d’une occupation.

Aujourd’hui, le marché était très actif et le boucan attira le squelette qui s’y dirigea presque machinalement. Une marche tranquille, un pas silencieux qui le mena au milieu d’une foule étrangement calme. Lorsqu’il restait trop longtemps chez lui, Hiroyuki oubliait cette agréable sensation de ne pas devenir instantanément le centre d’attention - et chaque fois, il en profitait avec une satisfaction si discrète qu’on se demandait, comme souvent, s’il possédait des sentiments. Ainsi, baignant dans cette paix qu’il n’expérimentait que peu souvent, le squelette appréciait un instant si agréable qu’il fut presque agacé que quelqu’un le traîne hors de ses pensées. Il considéra une seconde le visage qui clamait le connaître étant donné les mots qu’on lui adressa - et ce regard qui défiait le sien avec des sentiments si réels qu’il en excluait le mensonge finit de le convaincre qu’il ne rêvait pas ; cette fille s’adressait à lui. Il la considéra un instant, se remémorant peu à peu les traits maintenant bien plus vieux de la gamine qu’il avait connu à l’époque, et la déduction lui valut un bref mouvement de sourcils qui adoucit son expression et avait valeur de sourire.

« Au contraire, j’ai trouvé un moyen efficace de le faire, mais j’ai décidé de ne pas le mettre à profit aujourd’hui. La journée est trop belle pour que je n’en profite pas au naturel. »

Il s’avança et leva les yeux pour la regarder, son éternelle et impassible expression se confrontant à toute l’humanité dont cette gamine faisait preuve. Plus ou moins. De ce qu’il en savait, elle était bien différente du reste du monde - et le fait qu’elle l’ait accepté, à l’époque comme aujourd’hui, montrait comme c’était le cas. Par égard pour elle, il décida d’entamer une conversation dont la normalité le surprit.

« Je ne suis pas tellement étonné de te croiser ici. On ne s’est pas vus depuis des années, qu’est-ce que tu as à me raconter ? »


codage par langweilen sur apple-spring





Anonymous
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Re: ••• skeletal heart ; Hiroyuki | Ven 23 Sep 2016, 20:09


skeletal heart

──Tu hausses les sourcils en guise de réponse et un rictus déforme tes lèvres, ton regard fatigué dévorant sa silhouette squelettique – si seulement il n'y avait eu que sa silhouette, d'ailleurs. Sa question te prend au dépourvu. Cela faisait plus de deux-cents ans que tu n'avais parlé à personne de ta situation, parce que personne n'était censé s'intéresser à ce que tu étais. Peut-être qu'il ne s'y intéressait pas non plus, mais qu'il n'avait rien trouvé de mieux pour combler l'ennui accablant qui régnait sur sa vie. Et sur la tienne, de toutes évidences. Tu hausses les épaules. Son regard vide te rappelait cette image pathétique de la gamine misérable que tu étais, salie par la crasse et les mains tâchées de sang, le regard glacé et les lèvres tremblantes. Il réapparaissait comme un fantôme, nourrissant par sa présence le spectre de tes souvenirs maudits.

──Il n'y avait pas grand chose à raconter. Ou alors il y avait trop de choses à raconter. Tu devais bien réussir à les résumer, mais tu n'étais même plus sûre de t'en rappeler. Tu salues rapidement le marchant qui t'avait servi et t'éloignes de quelques pas, comme si tu ne voulais pas que ce pauvre Charles ait les oreilles trop curieuses.

« Un homme que j'aimais est mort, j'ai retrouvé son assassin et je l'ai tué. J'ai fait la guerre. J'ai fait l'amour. Et je suis tombée enceinte d'un homme que j'ai tué. J'ai appris récemment que c'était un dragon, d'ailleurs. Et le petit monstre que j'ai au fond du bide devrait arriver d'ici quatre mois. C'est étonnant que tu ne l'ais pas tout de suite remarqué. »

──En vérité, tu détestais ça. Tous ces gens autour de toi qui te tenaient la main, qui te proposaient de t'asseoir ou qui te regardaient comme si tu étais handicapée. Tu allais bien, n'avais aucun problème pour marcher, et ta grossesse ne t'avait ni empêché de boire, ni empêché de fumer. Alors ça ne pouvait pas t'empêcher de vivre ou d'être active, non plus. Puis il en avait déjà vu d'autres, ce petit bout de bébé. La mort était bien peu de choses pour un monstre.

──Tu réfléchis un moment et demeura satisfaite de ta réponse. Tu étais sûre d'avoir oublié une majeure partie de ce qui t'était arrivé, de toutes façons. Mais ça faisait deux-cents ans, et tu n'avais pas vraiment envie de te rappeler. Tu levas les yeux sur lui, comme pour vérifier qu'il était bien là.

« Comme tu le sais, j'ai toujours été baignée dans l'opulence et la gloire, alors... »

──Quand tu le regardais, tu avais l'impression de lui raconter une blague. Pas parce qu'il riait – puisqu'il ne riait pas, en fait – mais parce qu'avec la gueule qu'il avait, sa vie ne devait pas être fort glorieuse non plus. Et tout les deux plantés là, à faire vos courses au soleil, ça sonnait un peu trop ironique pour que tu n'esquisses pas un sourire.

« Et ton histoire à toi, elle a évolué, depuis? »

──T'étais pas venue discuter, t'avais pas non plus l'intention de lui tenir la conversation sur vos vies respectives bien longtemps. C'était pas que les souvenirs et toi aviez la fâcheuse tendance à mal vous entendre, mais c'était presque ça. Toi, t'étais venue chercher du café, et t'étais pas contre l'idée d'en partager, mais t'étais plus ou moins réticente à l'idée de partager ces mots futiles alors que, tu le savais, il n'avait pas exactement le même niveau de conversation que les mégères du troisième étage. Alors elle lève le sac dans lequel était fourré son paquet de café.

« Tu veux un café ? Ou j'ai du lait, sinon. Chez moi c'est à.. trois pâtés de maisons d'ici. Ou on peut rester dans la foule à discuter de nos histoires pathétiques, si tu veux. »





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