•• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Mer 21 Oct 2015, 13:38
« Au fil de ces veines bien trop bleues. »
La Forêt | 21/10/2015
Akitsuna Fuji & Lyham C. « A. » Jacobson
Contour, tu n'es plus que contour, Ashley ; astreint à un bouillonnement farouche autant que convulsif qui ébranle ta maigre poitrine d'un frémissement amer. Intime, la douleur vient teinter ta peau d'un aveuglant carmin, et dépose dans le bouquet de tes nerfs les esquisses d'un avenir qui deviendrait funeste.
Entends-tu tes organes hurler, Ashley ? Quand sur l'envergure de ta pensée s'étendent à tire-d'aile tes désirs les plus inaudibles, quand un matin à peine parût nimbe de ses bras amoureux l'horizon jusqu'à sa cime, tu n'acceptes plus en ton sein ce déchirant besoin qui caractérise ta race. Ainsi positionné dans sa poigne de fer, tu n'es plus rien qu'une inconstante marionnette, ou une créature évidée que pourtant les élans d'une obscure souffrance ne cessent de projeter jusqu'aux limbes candides d'une douce nature.
Et peu à peu tu te perds dans l'étreinte de cette avidité. Et, peu à peu, tu te voiles sous l'ombre épineuse de ces ramures feuillues.
*
Toujours, j'avais été plus sensible à la soif que nombre de mes congénères. Toujours, je dessinais sous la chape de mes paupières l'ébauche de la plus sombre des nuits. Et, sans comprendre plus rien au monde qu'une sourde douleur arrachant mes entrailles, je sacrifiais mes souffles à la crête de leurs terreurs.
Parce qu'un vampire est un néant, une aveugle béance servilement offertes à leurs gorges dénudées, née avec la promesse de vivre en s'impulsant sur la vie des hommes. Parce qu'un vampire est une éclipse, il n'a d'autre dessein que le reflet de celui des autres, il n'est rien qu'un fragment de miroir parsemé à l'infini de lui-même.
Lentement, doucement, je me plie sous le poids de mes épaules souffreteuses, arrondissant la courbe de ma nuque écrasée par le vent ruisselant. Puis-je encore le dire ? Je suis. J'ignore, simplement. Je ne sais plus vivre, Nature. Ou sinon en traçant du bout de mes doigts squelettiques quelques intrigues évanescentes déjà pourries par leurs ténèbres. Cousu sur le nœud de ces frêles fils de soie, tissé sur les lèvres d'un sublime chaos, depuis peu, je ne me sens plus vraiment virevolter. Peu à peu, mon ventre s'ouvre pour vomir de sombres fatalités, exhalant la pestilance de ce destin auquel nous sommes tous promis.
Abysse, abysses, mes ongles glissent au long de mon cou, fourmillant de déchiqueter cette gorge qui ne palpite que grâce à cette humanité en laquelle nous perdons foi un peu plus chaque jour, chaque heure. Je pourrais, en réalité, décliner en des millions et des millions de mots la sensation de cette artère qui se perd sous mes crocs. Un vampire l'a-t-il déjà respectée une nouvelle fois ? Vraiment, Nature, on m'a violé de tant de blessures.
Abysse, abysses. Haineux, un écœurant sanglot s'échoue au creux de mes lèvres, qui seules se fissurent entre cette écorce noire et ces feuilles unes à unes laissées à la pesante valse qui les lient au vent langoureux. Ma main, lourdement, vient aggriper ce flan osseux, comme pour assouvir la faim tenaillante d'un corps, la soif de son vermeil et de sa beauté. Oh, vraiment, comme un vampire est pathétique.
Je demeure immobile, le visage incliné vers la terre, dévoilant à ses seins verdoyants un soupir traître, une larme gravée le long de mes mains, ou l'ombre d'un univers qui s'écoulerait sous mes doigts. Mes paumes élancées devant moi, je suis de la prunelle les lignes sinueuses se jetant sous le bois. Les arbres, d'un vaste geste circulaire, projettent sur le sol une longue ombre portée, tissant l'air frais d'une nostalgique mélancolie, et de quelques ruines éparses. Là, entre mes phalanges, avec une inlassable nonchalance, s'écoule une exhalaison létale, emprisonnant tous mes sens en un cocon des plus fougueuses ténèbres, des plus opaques encore.
Je caresse d'un œil affamé le gouffre de la forêt, dans laquelle serpentent ces effrayants parfums ; et mon souffle s'envole, s'entrelace au sommet des troncs, siffle tel les aiguilles d'une horloge déglinguée heurtant le chambranle argenté. Mécanique suspendue au firmament de ses pulsions, cycliques, sanguinaires. Pitoyables. Un instant, mes mains tracent l'écho de paroles qui déjà n'existent plus. Une plainte, esquissée. Une douleur, distendue. Un désir, écrasant. Là, il t'arrache le cœur, t'explose les poumons, putréfie tes veines, embrasse sauvagement tes lèvres avec un amour que tu ne saurais décrire. Et, au creux de cette nuque qui porte ta si pâle figure, s'insufflent les ombres de quelques oiseaux sans ailes. Et, peu à peu, ils te décolorent à tes propres mouvements. Et, peu à peu, tu t'absous à ce monde. Comme tu aurais aimé effleurer ses espaces qui, déjà fantasmés, ne se lèveront pas demain !
Lentement, je me redresse, sur ce dos arqué dans la courbe du tronc ; mes talons s'entrechoquent puis s'effleurent jusqu'à l'herbe, dans les prémisses d'un élan que je ne saurais contrôler. Et, d'une impulsion féline jusqu'aux arbres, je m'abrège, presque pour m'envoler aux ailes d'un sourd brasier fait d'ardeur insatiable. Attendant la poussée d'une fureur passionnée qui jamais ne se terminerait.
As-tu été si asservi, Ashley ? Ainsi enchaîné à cette faim atroce qui t'éjecte au-devant et en-dehors de ta conscience, te balance au fond du trou, te relève, t'aide, t'aime. Sens-tu dans le galbe de ton rein la toile d'un esclavage bien plus vaste, qu'elle tisse à ses doigts de torture ? Pourtant, avec peine, tu te sentais tel un chien. Et, au nœud de tes veines, miroitait les reflets de ce pernicieux héritage.
Un. Deux... Indolente, ma respiration siffle lorsque l'odeur s'opprime, puis effleure le sol illuminé de soleil. D'un geste brusque, je dégage mes cuisses vers le haut, décale mes appuis sur ma jambe droite. Plus brûlant qu'un baiser, mon souffle se cristallise tel quelques fantômes se meuvent à mes lèvres dans une ultime valse. Là se profile un temps bien plus lourd, intensifié par la forêt, et alors qu'une détonation à-demi avalée par les feuillages et la terre me fait légèrement sursauter, on ne peut plus rien toucher que ce qui se dérobe à nos iris. Un vampire finit toujours par connaître la valeur éphémère des choses. Car ses cils plient sous une violence qui progressivement se fait sienne. Trois, Quatre. Je n'efface plus ces orgueilleuses majuscules.
Encore une fois, je me penche vers le sol, essoufflé ; de ma paume où bataillent ombrages et rayons, j'efface les traces d'un champ de pleurs et de terre humide. Le parfum est si fort qu'il mugit jusqu'à mes pensées les plus claires, arrosant de démence les derniers fragments soutenus d'un être disséminé entre deux miroirs. Ainsi positionné, je le vois complètement sans réellement le voir ; silhouette rendue floue par la faim. Une pulsion famélique fait chanceler mes poumons sur l'axe si tragique de leurs expirations. Cinq. Six.
Ma mâchoire se décroche, mes dents de requin déjà ont chu sur ma lèvre martyrisée, pareilles aux farouches amantes égrenant leur plaisir dans un soupçon de souffrance. Là, je m'élance, prunelles dilatées, chair tyrannique, mains avides de ce corps sublimé.
Car oui, peu à peu, je me perds dans l'étreinte de cette avidité.
Simplement pour vivre. Simplement pour être.
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Mer 21 Oct 2015, 17:00
ft. Lyham C. « A. » Jacobson
Au fil de ces veines bien trop bleues.
Akitsuna se pinçait actuellement les lèvres avec tant de force qu'il n'aurait pas été surpris de découvrir qu'il en saignait. Ses yeux, ses yeux si horripilants, entièrement bleutés comme le ciel nocturne et tout aussi parsemés d'étoiles, qui lui donnaient des airs de créature ou bien d'entité extraterrestre tout droit sortie d'un film de sciences-fiction -ou d'horreur, ça restait à décider. Il plissait ces yeux-là, se concentrait, et découvrait qu'il pouvait verrouiller toute sorte de choses autour de lui. Verrouiller, comme cette action que l'on effectuait dans un jeu vidéo pour viser un ennemi. C'était tout pareil et, de fait, ce n'était pas si étranger à l'adolescent qui avait découvert avec stupeur une petite dizaine de minutes plus tôt un… Un quoi, hm ? Une capacité ? Un pouvoir ? Quelque chose qui s'en rapprochait fortement en tout cas. Néanmoins, être capable de faire exploser un caillou… Enfin, être capable d'exploser un caillou dans sa propre tronche, ce n'était pas terrible, et ce n'était pas non plus ce qu'il aurait choisi comme pouvoir -s'il avait eu le choix. Mais c'était là que se posait absolument tout le problème. Akitsuna n'avait pas le choix. Et cette simple constatation le remplissait d'un mal-être qui atteignait présentement son paroxysme. Il avait absolument tout subi depuis que cette lumière méchamment aveuglante était apparue dans sa chambre puis l'avait recraché sans la moindre considération dans cette forêt infinie, sans fin, et peuplée d'animaux aussi psychédéliques qu'ils étaient plus dangereux les uns que les autres.
Il avait tout d'abord erré quelques heures entre ces arbres innombrables, paniqué à l'extrême, ne comprenant absolument rien de ce qui se déroulait sous ses yeux. Il avait tenté de se persuader que tout cela n'était qu'un vaste rêve, ou une hallucination provoquée par… Par quelque chose -et il avait échoué. Il avait surtout méchamment échoué à se calmer à partir du moment où ce guépard avait débarqué dans son champ de vision et lui avait fait perdre tous ses moyens. Il n'avait pas crié -plutôt, le cri était lamentablement resté coincé quelque part dans sa gorge-, mais il avait couru. En vain. Et, lorsqu'il était tombé à cause de l'une de ces nombreuses racines traîtres, et qu'il avait fait face au guépard, et qu'il avait été convaincu qu'il allait se faire dévorer et que son existence s'achevait là, dans le brouillard et l'incompréhension la plus totale, voilà que la situation s'était retournée d'un bloc et avait laissé l'adolescent encore plus perplexe qu'il ne l'était déjà.
Ce n'était pas comme s'il avait carrément entendu les pensées du guépard, mais… Disons qu'il l'avait plutôt ressenti, et ce, de tout son âme. Il avait eu la présence d'esprit de s'écarter à temps pour esquiver l'attaque d'un lion énorme, à la crinière enflammée, avant d'être sauvé par l'être qui l'avait ensuite aidé et accompagné tout au long de sa fuite. Ce dernier avait calé ses foulées sur les siennes, alors que -et Akitsuna n'avait pas besoin de liens mystérieux pour le deviner- l'animal aurait pu aller infiniment plus vite et se contenter de sauver sa propre peau.
Après quoi, lorsque le lion avait été définitivement semé (Akitsuna n'avait même pas remarqué qu'il les avait poursuivi, mais il le sentait grâce à ce guépard, lui-même n'ayant pas entendu d'autres pas que les siens), ils s'étaient tous deux arrêtés et… Il s'était évanoui. Ou endormi. Peu importe. Les émotions avaient soudain débordé et, incapable de les supporter plus longtemps, quelque chose en lui avait littéralement craqué, faisant tout court-circuiter d'un seul coup.
A son réveil, Akitsuna se souvenait plus particulièrement de sa surprise lorsqu'il avait découvert que la bouillotte et peluche qui l'avait empêché de se transformer en glaçon durant son sommeil -ou son inconscience- n'était autre que le guépard, collé tout contre lui. Sa respiration était tranquille et régulière, pourtant le garçon était quelque part persuadé qu'il n'avait pas fermé l'œil, lui, et qu'il s'était contenté de monter la garde. Akitsuna ne comprenait toujours pas ce pourquoi le guépard le suivait à la trace et demeurait ainsi à ses côtés. Cependant la chose le réconfortait plus qu'il ne voulait l'admettre et il était véritablement soulagé de constater qu'il n'avait pas à affronter tout… Juste, tout, tout seul.
L'étudiant était ainsi resté un moment sans bouger, à tenter de remettre de l'ordre dans ses pensées. A comprendre ce qui lui arrivait, pourquoi. Comment. En vain bien sûr. Qu'importe la façon dont il essayait d'aborder sa situation, il était incapable de trouver la moindre réponse. Au contraire : y réfléchir n'amenait que plus d'interrogations. C'était affreusement décourageant.
Puis. C'était à ce moment-là, qu'Akitsuna avait découvert sa capacité. Tout en songeant à ces grandes questions, l'adolescent jouait avec un caillou, le lançait, avant de le rattraper, puis de le relancer. Il se concentrait, tentait de saisir quel était cet endroit où il avait atterri. Le caillou avait été verrouillé sans crier gare. Et la première réaction du jeune inconscient avait été de cligner des yeux -une action purement due au réflexe. Pour savoir s'il n'était pas en train d'halluciner. Pour voir si, après avoir fermé les yeux, en les rouvrant, la chose aurait disparu. Non seulement ladite chose n'avait pas disparu, mais en plus de cela Akitsuna avait eu la très, très mauvaise surprise de constater qu'il avait déclenché une explosion qui avait détonné juste au-dessus de sa tête. Oui, il avait eu chaud. Il n'aurait pas aimé que ça lui explose à la tronche.
Et, après vérification, oui, il constatait qu'il pouvait toujours verrouiller des cibles s'il se concentrait. Outre la crise cardiaque qu'il avait causé au guépard (dont la réaction avait été de carrément bondir sur place avant de se téléporter un peu plus loin et de grogner après le caillou qui s'était désintégré en petits morceaux), dont il aurait d'ailleurs presque pu en rire s'il n'avait pas ressenti la force de du choc de l'animal, Akitsuna commençait vraiment à se demander ce qui lui arrivait. Depuis quand était-il capable de faire exploser quoi que ce soit, bon sang de bonsoir...! Il était juste une personne lambda qui s'apprêtait jusqu'à très récemment à aller à l'université, et qui bientôt aurait pu se trouver un travail digne de ce nom et se construire une vie paisible et agréable. Il n'avait jamais, ô grand jamais, désiré plus que cela.
Et c'était tandis qu'il se plongeait de nouveau dans ses pensées qu'un frisson lui parcourut soudain l'échine. Fronçant les sourcils tandis que le rythme de son cœur s'accélérait drastiquement, Akitsuna perçut non pas par ses sens mais à travers ceux du guépard une présence nouvelle et, surtout, hostile. Ce n'était pas tant une intuition mais plutôt un savoir, une certitude qu'il devinait à cause du comportement de la chose qui se rapprochait furtivement mais efficacement de lui, comme… Comme un chasseur. Merveilleux. Akitsuna était de nouveau la proie de quelque chose. Quelque chose à deux pattes, perçut-il quelques secondes plus tard, toujours attentif à ce que le guépard lui transmettait. S'il existait un Dieu quelque part, l'adolescent avait dû sérieusement l'offenser pour avoir une poisse pareille et aussi récurrente.
Il ramassa discrètement un caillou dans sa main, bénissant soudain sa capacité à provoquer des explosions. Au moins serait-il peut-être apte à se défendre, cette fois-ci. Il attendit, nerveux, que le "quelque chose" se rapproche. Le guépard semblait avoir compris ce qu'il comptait faire et ne réagissait pas plus que lui. Il s'était d'ailleurs en quelque sorte remis du choc dû à l'explosion, et s'était tranquillement réinstallé auprès du garçon, l'air de rien. Sa respiration était paisible mais Akitsuna sentait l'adrénaline qui pulsait en lui. C'était contagieux.
A vrai dire, le garçon commençait tout juste à penser que, ma foi, tout se passerait bien finalement, qu'une sensation nouvelle perturba absolument toute sa concentration et son self-contrôle. Il n'aurait su dire comment il en avait brusquement pris conscience, mais le "quelque chose" qui s'approchait était terriblement redoutable. Les yeux de l'adolescent s'écarquillaient jusqu'à l'extrême tandis qu'il décelait une aura d'un rouge à la fois chatoyant et sombre l'enserrer comme dans un filet. Il ignorait comment il savait que c'était une aura. Il ignorait également comment il savait que le propriétaire de ladite aura était puissant, dangereux, et s'apprêtait à s'en prendre à lui. Quoi que, ce dernier point était plus qu'évident lorsqu'il voyait cette sorte de brume aux couleurs du sang qui l'entourait peu à peu telles des serres. Comme s'il était déjà pris au piège. Ironie du sort, le garçon fut incapable de ressentir la moindre terreur tant sa surprise était grande. Sa bouche était entrouverte mais ne produisait aucun son, et son cerveau semblait finalement déclarer forfait.
Aussi ne réagit-il absolument pas quand une ombre surgit semblait-il de nulle part et bondit vers lui. Une fois encore, Akitsuna ne put que remercier et bénir intérieurement le guépard d'avoir réagi à sa place : il avait même cru l'entendre pester dans un recoin de son esprit. Il fut téléporté soudainement, sans crier gare, derrière le prédateur. Il en émanait désormais une aura qui redoublait d'agressivité ; se tortillait avec violence. Ah. Il est frustré.
Et, miracle. Tandis que la silhouette se retournait progressivement et découvrait que sa proie était à présent derrière lui, Akitsuna retrouva violemment, non pas la capacité à réfléchir, mais plutôt la capacité à sauver sa peau. Il lança le caillou avec une précision étonnante en vue du vide qui s'était formé dans sa tête. Il le fit ensuite exploser sans le moindre remords, froidement, lorsqu'il estima que l'objet était suffisamment proche de son agresseur. Cette seconde explosion fut tout aussi risible que la première, mais au moins, elle avait vraisemblablement atteint sa cible.
Et de là, guidé par une pensée du guépard avec laquelle il était parfaitement en accord, il fit demi-tour et pris ses jambes à son cou. Il n'était finalement pas en état d'affronter quoi que ce soit. Les actes héroïques viendraient pour plus tard. Ou jamais, dans l'idéal. Être lâche lui assurait au moins, en théorie, de survivre.
Hrp:
Je suis désolée c'est super loooong, j'espère que ça t'a pas trop bloqué ! Dx Je ferais de mon mieux pour faire quelque chose de plus court la prochaine fois, promis !
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Jeu 22 Oct 2015, 23:41
Estompé. Ainsi à genoux sur cette terre encore vierge, tu te sens estompé, abstrait sous les braises d'un crépuscule qui ne s'appréhende plus. Une charogne rendue malléable par les dernières pluies, une poupée de porcelaine à qui l'enfant brise les membres à la moindre colère. Sous ta peau teintée d'ébène s'effritent les volutes blafardes de ton existence, les ruines d'une acuité nécrosée par tes propres songes.
Alors que se tracent autour de tes poignets les intrinsèques menottes qui ne te lient plus qu'à quelques silhouettes abyssales. Oui, vraiment, tu ne vis plus.
Anamorphose, résonance. L'horloge, plus sourde encore, ébranle mon tympan d'un violent coup affamé ; alors que ses aiguilles lourdement se succèdent, exhibées à pan de ciel comme s'égrèneraient des nuages. Ma main, hâlée par les ombres, effleure une seconde l'herbe nacrée de perles, cherchant ce visage qu'il me fallait aimer jusqu'à ses plus profonds soupirs, ce corps qui à la douleur se serait laissé étreindre, ou cette gorge que j'aurais dû évaser à sa fragile carotide. Pourtant, sous mes doigts ne s'étalait qu'un terreau engorgé des nitescences de l'aube ; un instant je reste accroupi, protégé par la fine dentelure de mes paupières. Un sussurement de violence s'exhale au bas de mon ventre. Inhérente, cette ondulation. Rompues, les limbes de sa conscience.
Pesant sur mes doigts, je me redresse avec précaution, une main posée sur l'abdomen – et, comme contraintes à demeurer souvenirs fugaces, mes prunelles dérivent jusqu'à la ligne en demi-teinte profilant quelque reflet incertain. Trop, bien trop proche. L'étreinte du soleil fleurit encore sur sa joue pâle, nuançant sa courbe de constellations en ballet, de ses rayons les plus empathiques, telle une chrysalide aux ailes trop chétives. Là, sa main se dévoile au contre-jour pers, d'un souffle, un unique souffle ; puis s'envole en voile évanescent. Là où s'éclipsent les femmes couvrant de leurs cils toute la beauté du monde.
Je vacille un instant sur mes talons, expire sur une mèche roussie à la pointe et porte une paume maladroite à mon visage, alors qu'une brûlante égratignure fit perler à mon sourcil blanc un filet écarlate. Quelques battements de paupières me soustraient à la surprise, indolente, et j'écrase contre ma pommette les restes carbonisés d'un bout de pierre. Dans l'air s'effleurit une spirale de fumée, aussitôt déchiquetée par un soupir mourant à mes lèvres.
Sans-visage. Sans la moindre peine, tu pourrais épanouir au filigrane de ton pas la mutilation de tes traits les plus fins, ou l'esquisse de ces plaintes dénudée de tout esprit lucide. Enlacés, délacés, tes désirs et tes craintes s'allient uns à uns en une mélodie disharmonieuse ; et lorsque sous tes lèvres s'accumulent tes plus atroces hurlements, se grave en fleur de veines et sous ta peau violentée par tes propres ongles l'esquisse d'une effrayante folie. Que ne pourrais-tu faire éclore à l'orée de tes mains la gamme enlaidie de tes pensées toujours plus précaires ?
Là affleure à ta gorge les plus écœurants parfums. La gluance d'un acide bien trop funèbre à ta prunelle. Et qui pourtant ne peut flétrir l'air à son contact autant que cette chair qui n'est autre que la tienne. Tu t'étrangles de tes propres mains, Ashley, car tu t'es dénudé du plus petit instinct de survie qui devrait demeurer en chaque être.
Ça te fait mal, là, au creux de ton dos, jusqu'à ta nuque déjà brisée.
Affres désespérées. Une seconde s'écoule ; et s'évasent à ma narine les infâmes effluves de quelque tombe écarlate, décharnant l'horizon en quelques découpes malhabiles. De l'autre à présent jeté au-devant des arbres, j'entends les pas martelants, la respiration précipitée – aucune silhouette ne brise les tâches verdoyantes aux alentours. Mon dos s'arque, mes mains choient à ma cheville étirée, griffant cet épiderme basané de terre. D'un seul pas, j'élance mes muscles enlacés, peignant au long de son pas le portrait d'une mécanique peu à peu sauvage.
Tu n'es plus qu'une nuit sans lune, qui dissimule jusqu'au plus infime des souffles. Tu contemples, tu goûtes, et sous tes doigts tout semble mourir. Mal. Tu te sens mal.
Esquisse crucifiée. La Terre déjà se torture sous les lambeaux d'une fureur incontrôlable astreignant ma gorge à une palpitation de souffrance ; semble basculer lorsque mon talon explose sur la pierre. Et, alors qu'un frisson de bestialité s'enracine à mon flanc, déchiquette mon poumon d'une infecte secousse, je manque de m'effondrer tant le monde est pulsion. Rupture, obscurité. Transcendé à cet absolu inconstant, tourmenté par les murmures cauchemardesques de cet univers qui s'entrechoque sur ses propres os.
À cet instant, tu veux fuir – inspirer, rien qu'une seconde, autre chose que cet air cotonneux, asphyxiant et malade. Flétrissure. Douleur, douleur, douleur, douleur.
Je déploie les ailes de cette évanescence putréfiée. D'un mouvement d'omoplates, je me courbe vers le sol, passe mes mains sur mon visage pour effleurer une sueur malsaine. Un haut-le-cœur surgit jusqu'à mes dents ; épaule dressée vers le ciel.
Surveille tes arrières, bordel !
Je dois. Le trouver.
Fais quelque chose ! TU VAS MOURIR, BON DIEU !
Un râle explose – un cri, presque inhumain. J'oublie de respirer... Chancelle. Jamais un élan ne m'a porté aussi loin. Une détente me cambre à l'aube, comme sur un fil solaire aux nuances écarlates. Pour la première fois, je le voyais de près. Une chrysalide, encore. Une essence, en vérité.
Dans une impulsion éperdue, je crochette une fraction de seconde son épaisse chevelure par l'arrière, puis effleure son épaule creusée. Mon talon fait voler l'herbe en éclat – d'une main qui se fit plus lâche, agrippe son poignet fin comme celui d'une jeune fille. Inspiration de noyé. Deux, trois. Mes genoux ploient jusqu'au sol, un instant je demeure pantelant, haletant à m'en faire vomir. Torture. Tor-tu-re. Un flot de sang rugit à mes narines, s'écoule jusque dans ma bouche, se déverse aux pieds de l'être, tel l'humble offrande dans la paume d'un prince. Là, jusqu'à cette main trop fine que je verrouille dans la mienne, résonne un mot.
Universel. Torture. Tor-tu-re.
Et ta tête s'incline d'une exaltation presque éthylique. La sens-tu pulser à tes lèvres, Ashley ? La sens-tu déposer dans le creux de tes reins ce frémissement animal, cette délectable violence qui fait hurler tes doigts au meurtre ?
Écarté, écartelé, et un souffle rauque saille hors de ma poitrine lorsque s'engorge à mes veines cet affolant parfum. Tracées à fleur de peau, frémissent les exhalaisons musquées d'une terre assaillie par la rosée ; puis des plus bestiales, presque fauves, presque agressives, bien plus chaudes. Maladroitement, je cherche son visage du bout de mes doigts – effleure une gorge étrangère, déploie le long de sa joue satinée par l'enfance une effarante caresse. Je me redresse sur la main, lentement, sans lâcher celle de l'être à mon côté. Et enfin, je dévie les yeux vers la candeur de sa figure. Embrasse d'une prunelle toute l'ardeur du monde.
HRP ; ... *se tue* (nan sérieux j'essaye de me limiter la prochaine fois sorry ;;;;; ) btw j'ai un peu honte pardon pour la fin fermée, salement bâclée et qui fait pas avancer l'histoire D8 (je voulais poster aujourd'hui et j'étais un peu fatiguée e.e) si ça te convient pas, hésite pas à m'en faire part huhu
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Ven 23 Oct 2015, 21:34
ft. Lyham C. « A. » Jacobson
Au fil de ces veines bien trop bleues.
Le vent sifflait aux oreilles de l'elfe. Le vent sifflait, et il l'empêchait d'entendre tout son autre que celui de sa propre course. Ses pas étaient irréguliers, peu sûrs et ses mouvements se révélaient de moins en moins adroits. Il s'interrompait souvent à cause d'une racine qui manquait de le faire tomber ou bien d'une inégalité de terrain qui lui faisait quasiment perdre l'équilibre. Il bondissait, esquivait les arbres défilant sous ses yeux du mieux qu'il le pouvait, mais sans beaucoup de succès. Sa vitesse était trop inégale : tantôt il accélérait brusquement, tantôt il s'arrêtait presque à cause d'un tronc lui barrant la route. Le guépard, au contraire, se servait justement de ces troncs pour bondir de plus belle et maintenir son allure : sa trajectoire était imprévisible, zigzaguante et remplie de feintes, mais linéaire dans sa direction globale. Il suivait Akitsuna. Le soleil se couchait et projetait ses dernières ombres sur la forêt qui paraissait devenir de plus en plus menaçante, comme sur le point d'engloutir le fuyard dans la noirceur de la nuit. Tous les éléments avaient l'air d'être contre lui : des branches venaient griffer son visage, s'accrocher à ses vêtements, semblaient vouloir se resserrer sur le garçon comme des serres sur leur proie tant convoitée. Et le pire. Le pire. C'était cette incroyable aura écarlate qui continuait de l'égaler dans sa course. Elle rasait le sol et tentait de saisir ses chevilles avec force d'assauts et d'une férocité chaque fois redoublé ; mais elle ne possédait pas de matière, malgré son agressivité parfaitement tangible. Elle n'était pas dangereuse en soit. L'énorme lion à la crinière enflammée faisait pâle figure face à ce nouveau prédateur. Ce prédateur dont l'elfe n'avait pu imprimer dans son esprit que des yeux rouges comme le sang que ce dernier s'apprêtait -ou du moins désirait avec tant d'ardeur- faire couler.
La respiration d'Akitsuna devenait totalement incontrôlée : saccadée, elle était plus qu'insuffisante pour fournir suffisamment d'oxygène à son propriétaire et à ses muscles anéantis. Il sentait ses foulées ralentir malgré l'adrénaline, et malgré cette unique phrase qui se répétait en boucle dans sa tête à la manière d'une prière : "je ne veux pas mourir". Il ne voulait pas mourir. Mais personne ne voulait mourir. Personne ne choisissait de mourir. Akitsuna n'avait pas plus le choix que des milliards et des milliards d'autres personnes avant lui. Il avait cette sensation de désespoir qui lui murmurait sauvagement que c'était inutile de lutter ; que c'était inévitable de toute façon. Pourtant il était incapable de se résigner -de s'arrêter et de s'asseoir, puis d'attendre que la faucheuse vienne le prendre comme un épi de maïs. Ce n'était pas du courage ; c'était juste de l'instinct. Seulement de l'instinct.
Son coeur sauta au bord de ses lèvres quand un hurlement déchirant et déchiré retentit non loin. C'était un cri qui n'avait rien à envier à celui de la banshee : terrifiant et à glacer le sang de n'importe quel être vivant pris pour cible par le prédateur en question.
L'instant d'après Akitsuna sentit avec horreur quelque chose empoigner son épaisse touffe de cheveux. La pression disparut presque aussi sec tandis que l'on effleurait son épaule, puis qu'un bruit sourd, abrupt et dur retentissait à son côté. Le garçon écarquilla les yeux, poussa involontairement un gémissement craintif. Il n'avait pas besoin -n'avait nulle envie- de se retourner pour vérifier. En une fraction de seconde, la créature à l'apparence vaguement humaine mais aux mouvements si bestiaux, cette créature si exceptionnellement terrifiante, avait comblé la distance qui la séparait de sa proie. Sans avoir l'air d'avoir fourni le moindre efforts, elle avait bondi à moins d'un mètre de l'elfe, et à présent elle lui enserrait la poignée avec fermeté mais, l'adolescent en fut le premier surpris, sans brusquerie excessive. Néanmoins cette soudaine force qui lui ligotait le bras et tenait à le garder immobile stoppa net sa course : Akitsuna vit simplement défiler le paysage alors qu'il se faisait instantanément plaquer contre le sol. Le choc lui coupa crûment la respiration et le sonna, le tout sans plus de considération pour son pauvre corps malmené. Il sentait son bras le tirer douloureusement. Ses muscles étaient parcourus de tremblements convulsifs, impossibles à maîtriser. La seule chose que le garçon était capable de capter et de comprendre, c'était le souffle saccadé de l'agresseur au-dessus de lui. Sa main était glacée. Sa présence était comme une masse sur sa poitrine -sur ses poumons. L'elfe remarqua à peine qu'il pouvait de nouveau respirer car il était tout bonnement incapable de se laisser aller à une longue inspiration. Il se sentait suffoquer. Akitsuna sentit des doigts glacés chercher sa gorge avec une maladresse d'enfant totalement incongrue, la trouver, puis remonter avec une douceur quasi choquante sur son visage. La panique rendait tempétueuses toutes ses pensées.
Il parvenait à peine à distinguer son environnement à cause de l'écarlate de l'aura du prédateur qui brouillait toute sa vision, juste comme un épais brouillard matinal. Seuls ses yeux sinistres et sa chevelure blanche comme la neige, dont une unique mèche semblait roussie, se découpaient dans le paysage rougeâtre.
Un sursaut de conscience éclaircit les pensées ombrageuses et orageuses d'Akitsuna. Une mèche roussie. Ses sourcils s'arquèrent en une mimique désespérée, et pas seulement à cause de la présente situation. Il avait sans hésitation provoqué une explosion -une petite, certes, mais une explosion quand même- au visage d'un être qui, si terrifiant puisse-t-il être, pouvait ressentir de la douleur. Il l'avait fait sans l'once d'un remord et sans hésitation. Ç'avait été un pur réflexe de survie, mais il ne pouvait s'empêcher de sentir la culpabilité s'installer progressivement au fond de sa conscience. Lui, si inoffensif d'ordinaire, qui répugnait jusqu'aux disputes et désaccords les plus minimes, avait causé de la souffrance à quelqu'un sans sourciller. Il se reconnaissait à peine dans ce geste. Ce qu'il reconnaissait en revanche, tandis qu'il se faisait violence et se poussait à ne pas trop regretter cette action, c'était la nécessité de se défendre. Il ne voulait pas mourir.
Ses mirettes étoilées se braquèrent sur celles de l'homme à la chevelure blanche. Il lui semblait que cela faisait une éternité qu'ils se fixaient ainsi, yeux dans les yeux -ce qui pourtant était très peu probable. C'était comme si une scène d'un film d'action avait été mise sur pause. A vrai dire, seule la respiration haletante de l'un et de l'autre trahissait l'immobilité de tout ce qui les entourait.
Akitsuna ouvrit la bouche. Il voulait dire quelque chose -ignorait quoi. De toute façon, aucuns sons ne paraissaient décidés à passer le cap de ses cordes vocales. Sa main tressauta involontairement, toujours prisonnière des griffes du chasseur.
Une ombre violette surgit ensuite tout à coup, venue de nulle part. Elle s'écrasa violemment tout contre l'homme qui ressemblait à une bête ; ils disparurent ensuite dans un "pop" lumineux presque comique. L'elfe papillona des yeux. Puis il se rappela de la présence du félin multicolore. Félin multicolore qui tentait actuellement de lacérer sans pitié le dos du prédateur humanoïde, avant de s'en écarter puis de s'élancer promptement vers Akitsuna. Il pressa son museau contre sa joue, mordilla sa manche. Il l'intimait de se relever.
Il ne fallut pas bien longtemps à l'adolescent pour se rendre compte qu'il n'y parvenait -et n'y parviendrait- pas. Son corps hissait le drapeau blanc ; ses muscles étaient aux abonnés absents. Il réussit uniquement à se redresser contre le tronc d'un arbre, prenant appui sur celui-ci afin de garder bien en vue l'homme aux cheveux de neige -et ses réactions. Il prit le premier objet qui lui passa sous la main au cas où il aurait à se défendre de nouveau. Le guépard grondait avec puissance à côté de lui.
- Si tu essayes encore une fois de me bouffer je t'explose ça dans la bouche. Lâcha-t-il d'une traite d'une voix tremblotante.
Le tout en brandissant... Une feuille morte. Akitsuna haussa un sourcil à sa propre bêtise. Sans commentaire.
Hrp:
T'inquiète donc pas, il semblerait que je ne sois pas fichue de faire plus court non plus en ce moment. x'D Pas de soucis, j'aime toujours autant tes rps de toute façon. *o* puis pas grave si ça fait pas avancer l'histoire, ça fait durer le plaisir huhu. Oui j'aime faire souffrir mes persos et même que je l'avoue :D
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Dim 25 Oct 2015, 01:43
Ta voix tremble, Ashley, l'ignores-tu ? Chaque soir, tu t'appliques à faire éclore au creux de tes mains des millions de lanternes, tu souffles sur leurs voiles pour qu'elles effleurent la courbe d'une nuit violacée. Et pourtant, dès que se suspendent leurs lueurs à cette cime marbrée d'étoffes, d'un crépitement muet elles s'éteignent unes à unes. Cédant de leurs faibles mains à l'étendard de l'obscurité. Alors s'effilent sous ta peau quelque dessin de monstres informes, silhouettes en ombres chinoises expirant sur ton corps d'innombrables éclats nitescents. Et des hématomes s'entrouvrent sous tes paumes rabattues d'un voile de ténèbres.
Abandonné dans les mondes les plus noirs, clos aux sillons de ta propre demeure, peu à peu tu les emprisonnes contre ton pectoral palpitant sous les éros de quelque lambeau de vie. Serais-tu devenu comme cette eau qui ne perce son indolence qu'à la pente de son terrain ? Serais-tu devenu comme cette eau qui s'emprisonne elle-même dans l'étreinte amorphe de ce lit sans contour ? Parce que tu n'espères plus pouvoir comprendre la lumière.
Là l'horizon brut et sombre, tempétueux comme dans un songe, se meure sous un râle déclinant. Et remonte à contre-courant de ses premières lueurs un bouillon décharné, une entraille maladive ; alors que tout, jusqu'au ciel, semble s'évanouir dans la contemplation d'un crépuscule soudain, depuis trop longtemps dérobé à lui-même. D'un regard, j'effleure les brumes cuivrées par un soleil devenu trop faible, expire pour les transpercer à ma vue – et, dissimulée sous les ombres, s'effeuille un souffle qui s'étire, un cœur qui martelle, un corps qui chuchote. Puis fluidement enlace cet effroi, gorgé d'appels ensanglantés, épouse sa crainte avec l'aisance de l'amant.
Mes yeux s'échouent à son visage gracile, la tissure en arabesque de sa paupière, le port altier de ses cils. Ils sembleraient presque affleurer sa joue blanche d'une délicate dentelle s'il les abaissait jusqu'à ses lèvres finement masculines, rosées comme sous un baiser ravi à arrache-cœur. Alors qu'à sa petite main éclot la frêle magnificence de ces êtres écartant l'ombre du sang au fil de leurs doigts, leurs rires, leurs confidences les plus heureuses. Êtres-éclat, affolant l'aurore alors qu'à leurs pieds s'éveille le jour, et éclaire quelques mèches éparses en floraisons immaculées, perdues au sein de leurs chevelures. Êtres-racine, couvrant en un unique souffle toute l'harmonie du monde – de cet équilibre effleurit sur l'essence-même de l'homme. Subjugué, je frôle du regard ses miroitantes prunelles, parsemées d'étoiles, constellées d'astres nés à fleur de ciel, ouverts aux plus chastes lumières qui supplicient le temps lui-même.
N'existerais-tu que par les fragiles beautés qui t'entourent, Ashley ? Alors que même à ton enfance tu t'y montrais déjà sensible, que ne pourrais-tu ardemment décliner sur des pages et des pages entachées de ta sueur la courbe élégante de cette épaule, la grâce volutueuse de ces hanches, ou l'affolant galbe de ce sein, à sa mamelle purpurine ?
Ainsi au long de tes veines graves-tu les esquisses de mille corps dénudés.
Ôcre délavé, orange écarlate. Le crépuscule engorge les peaux de tant de couleurs exotiques, qu'un instant je demeure suspendu aux lèvres de la forêt nimbée de soleil déclinant. Entrouvertes aux murmures étranglés de la Terre, enivrée d'un vermeil soufflé par les lumières fauves, les irradiations cuivrées d'un jour las. Là, violemment, une odeur carnassière déflagre à mes narines ; un profil félin – bien que violet – se découpe un instant, tendu jusqu'à l'infini, tel un gigantesque papillon aux ailes déchiquetées. Une brusque lumière me soustrait, l'espace d'une fraction de seconde, au paysage illuminé par l'astre semi-lunaire ; me menant à quelques pas du jeune garçon.
« Merde. »
Le juron s'estompe dans la brise, alors que je me jette en avant pour éviter une mâchoire effarante, puis élance ma tête sur la droite, les sourcils froncés, esquivant un coup de griffe qui frôle mon cou de justesse dans un doucereux murmure. Ouvre dans ma chair une estafilade sanguinolente, à demi-indolore, plus vive par à coup. Agaçant. D'un bond, l'énorme félin s'éloigne ; mes chevilles plient, me redressent en position accroupie là où il m'avait laissé. Quelques fils écarlates se mêlent au bout de mes cheveux. Là où s'écoulent les vagues d'un monde indistinct, en reflets de miroir souillé.
{ Du sang – le mien. Oh, vermeil. Tu es mon piédestal déshonoré. }
Inspiration, expiration. Malhabiles, mes doigts se portent à mon cou, se déploient le long de l'ouverture à fleur de peau pour la compresser ; puis effleurent mon nez toujours ruisselant d'hémoglobine. Pénible, pénible, pénible. Ce pouvoir était une plaie de chaque instant. Un grondement déchire la brume, se perd dans ses échos orangés – alors qu'il s'adosse à un arbre en quelque geste fébrile.
« Si tu essayes encore une fois de me bouffer je t'explose ça dans la bouche. »
La voix chancelle. Claire comme de l'eau, presque chantante ; rapide, comme pour que les mots prennent moins de place. Mon regard dérive jusqu'à sa main brandie. Une feuille morte – de chêne, peut-être ? –, en toute logique ; voilà qui allait faire de considérables dégâts. Selon toute vraisemblance, il ne doutait pas de grand chose.
J'entoure mes genoux de mes bras, accroupi, pour me balancer sur mes talons ; ma prunelle effleure l'herbe gorgée de crépuscule, s'évase dans celles, parsemées d'astres, du garçon. Et enfin un sourire tuméfie mes lèvres, âpre, amer, plus doux ? alors qu'éclot à mes commissures une écume rosée, puis sanglante, et s'écoule jusqu'à mon menton. D'un geste, j'efface quelque traînée rougeoyante ruisselant au long de ma clavicule, comme la course d'un poignard suspendu au fil de la lune.
« Un... guépard. » Rauque, cette voix.
Un instant mon œil frôle l'immense chat, longe l'arc félin de son dos, les dents prédatrices sublimant sa gueule de fauve ; puis de nouveau glisse sur le visage frêle de face. La courbure gracile de sa gorge, frémissante de vie, comme embrassant de ses fines vertèbres l'éclat d'un monde éclipsé dans le sang. De nouveau, mes lèvres gonflent en un sourire railleur.
« Quelle chance incroyable tu as, petit être. »
Efflorescence nacrée, demi-volte. Mon cou s'incline à mon épaule. À ma lèvre se suspend une mince respiration. Ballerine confuse, enlacée au conflux de la mort.
Oscillant sur mes talons, sans faire mine de me relever, je m'immobilise à la pointe de mes pieds.
« Ta prunelle est ravissante, le sais-tu ? »
Au loin se dénudent les nuages sous ce ciel ravagé par le feu, déchiqueté, transpercé ; comme à l'orée d'un monde qui déjà n'existe plus.
HRP ; Merci, mercii ** je te retourne le compliment <3 Je me relierai demain (pour ainsi dire tout à l'heure -o-) pardon pour les éventuelles fautes et répétition ;-;
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Dim 25 Oct 2015, 15:14
ft. Lyham C. « A. » Jacobson
Au fil de ces veines bien trop bleues.
La mâchoire du félin claqua avec fureur dans le vide alors qu'une jugulaire échappait promptement à ses dangereux crocs affûtés comme des rasoirs. Un coup de patte se précipita sur la gorge de cet homme à la chevelure d'un blanc immaculé : il esquiva d'un mouvement vif les griffes acérées qui sifflèrent non loin de son oreille. Le guépard profita ensuite de sa position pour lacérer consciencieusement tout ce qui pouvait l'être de sa victime puis, d'un bond agile, retourna aux côtés de l'elfe qui observait le spectacle ensanglanté avec effarement.
Akitsuna n'avait jamais été particulièrement sensible à la vue du sang, ou même d'organes et de boyaux ; si ce n'était même de tout ce qui se rapprochait de près à de loin à ce qui aurait pourtant fait vomir d'horreur toute personne autre que lui. Néanmoins, il possédait une conscience ; et le peu qui lui en restait dans la présente situation le glaçait d'effroi à l'idée d'à quel point la terrifiante créature aux mirettes rougeoyante devait souffrir -probablement. D'abord une explosion, ensuite quelques coups de griffes... Ce devait être douloureux, non ? Même s'il savait que c'était totalement et parfaitement ridicule de se montrer aussi compatissant envers un être qui quelques secondes auparavant était sur le point de le manger tout cru. Et qui l'avait déjà tant dévoré des yeux. Un long et désagréable frisson lui parcourut l'échine tandis qu'il se remémorait cet instant. Il ne s'en était pas rendu compte sur le coup, trop paniqué pour faire attention aux détails : mais il se sentait désormais comme violé de ce regard écarlate -ce qui très franchement accroissait son sentiment de ridicule. Il n'avait jamais imaginé que le lien entre un prédateur et sa proie puisse être si intense. Son coeur tambourinait encore violemment contre sa poitrine. C'était ridicule.
Presque autant que la feuille morte qu'il brandissait avec perplexité et de sa menace redoutablement chétive, à vrai dire. Ironiquement, l'absurde de cette situation le calmait un peu et éclaircissait ses pensées brumeuses.
Le jeune homme (car il semblait manifestement à peine plus âgé qu'Akitsuna) porta sa main à son cou et la pressa sur sa blessure. Le sang qui en coulait donnait une impression bizarre à l'elfe, certainement à cause du contraste entre ce rouge si vif et le blanc si clair et pur de sa chevelure et de sa peau. C'était surnaturel, tout ce blanc.
Puis, lorsque le garçon avait débité d'une voix fébrile ce qui était censé être un avertissement, le prédateur passa ses bras autour de ses jambes. Toujours accroupi, il entama un mouvement de va-et-vient quelque peu étrange ; comme s'il se berçait doucement. Akitsuna décela par la même occasion, et avec un soulagement intense, l'aura écarlate qui se repliait lentement mais sûrement tout autour de la silhouette finement musclée de son propriétaire. Elle se promenait maintenant dans les airs avec une tranquillité quasi prodigieuse quand il opposait mentalement l'image de cette allure si paisible avec son agressivité époustouflante d'il y avait à peine quelques minutes. L'adolescent remplit brusquement et à craquer ses poumons d'oxygène, avant d'expirer le tout en un long, très long soupir. Il se sentait comme allégé d'un poids immense.
Une voix enrouée, presque gutturale, brisa le silence de la forêt. Le félin violet retroussa ses babines en une menace muette ; Akitsuna se découvrit soulagé de savoir que la créature à l'apparence humaine savait parler et que, mieux encore, était dotée d'intelligence. Ou bien peut-être que ce dernier point était censé le mettre en garde au cas où les hostilités reprendraient.
Néanmoins l'adolescent ne répondit pas. Il se contenta de fixer toute son attention sur sa respiration, prudente et peu naturelle. Il avait l'impression qu'il réapprenait à respirer. De toute façon, il n'avait pas grand-chose à dire. Oui, ce guépard était... Un guépard.
Il fut cependant forcé de réagir aux paroles qui suivirent. Il fronça les sourcils et fit la moue tandis que l'être à la chevelure blanche comme neige s'ornait d'un sourire narquois. De la chance...? Une chance incroyable, qui plus est ? C'était bien l'affirmation la plus absurde qu'il ait jamais entendu...! Ces derniers heures de sa vie avait été les plus épouvantables, les plus atroces et les plus malchanceuses de toute sa piètre existence. Il avait vraisemblablement été téléporté en un lieu dont il ignorait jusqu'à la localisation, découvrait une faune plus qu'agressive et plus que dangereuse, errait un temps infini au milieu de cette flore qui paraissait ne jamais avoir de fin, puis se faisait presque dévorer par... Par celui qui paraissait actuellement lui faire la discussion, à supposer que ce n'était pas une distraction toute bête pour mieux le surprendre et le manger plus tard -bien que son aura indiqua que son humeur s'était fortement apaisée. Ses yeux étoilés se détachèrent de ceux, hypnotisants, de son interlocuteur pour mieux se porter sur le félin multicolore. Ce dernier, quoi que toujours prêt à sauter à la gorge du jeune homme, lui rendit son regard, curieux.
- Disons dans ce cas que j'ai de la chance dans mon malheur. répliqua-t-il finalement d'une voix beaucoup plus calme tout en observant le fauve d'un oeil distrait.
Il ne releva pas l'appellation "petit être" : Malheureusement pour son ego, il n'avait aucuns arguments contre ça. Il était petit face à tant de puissance ; il était un être et non plus un simple humain. Sujet clos. Ou presque. Il fallait qu'il comprenne ce qu'il était désormais. Plus tard, cependant, plus tard. Un problème à la fois.
« Ta prunelle est ravissante, le sais-tu ? »
Akitsuna porta évasivement ses doigts à ses dites prunelles en se pinçant les lèvres, surpris et contrarié à la fois. Il nota dans un coin de son esprit que cet être au regard flamboyant de sang possédait un vocabulaire étonnamment soutenu étant donné la bestialité dont il était capable ; cependant ce détail se perdit bien vite dans les méandres de ses pensées. Il repensa brusquement à sa famille. À Mamie Soleil et à Amélia, sa petite soeur. Au fait qu'elles ne le reconnaîtraient peut-être même pas avec sa voie lactée en guise de globes oculaires. Au fait que, à vrai dire, il risquait de ne pas les revoir avant un bon moment. S'inquiétaient-elles de son absence à la maison ? Sûrement. Elles devaient mourir d'inquiétude. Une ombre passa finalement dans son regard.
- Pas vraiment, non. Répondit-il platement.
Le garçon se fit violence pour rediriger ses pensées. Il devait garder conscience qu'il y avait un ordre de priorité à ses inquiétudes, et que rester en vie et comprendre ce que Diable il lui arrivait était en tête de liste. Il braqua de nouveau son regard d'astres sur celui de l'étrange jeune homme. Il fallait qu'il profite de son instant de lucidité et de calme. Il ignorait si cela durerait et il voulait saisir cette opportunité.
- Qu'est-ce que tu es, au juste ? S'enquit-il en parcourant furtivement des yeux son aura écarlate.
Allez. Il avait sans nul doute passé le plus dur. Ce n'était pas le moment de flancher. Il avait commencé par poser cette question et, petit à petit, de fil en aiguilles, il aurait peut-être l'occasion de poser les interrogations qui lui semblaient les plus primordiales. Avec un peu de cette incroyable chance qu'il devait avoir .
Hrp:
Merchiiii. o/ Y'a aucun soucis. Grâce à toi je me suis levée du bon pied en voyant que tu avais déjà répondu ce matin. :D
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Lun 26 Oct 2015, 13:58
« Disons dans ce cas que j'ai de la chance dans mon malheur. »
Comme se délacent les écumes brisées de tes souvenirs, esquissant une valse éphémère jusqu'à l'orée de ton destin.
Dans le crépuscule, une fleur éclot une seconde fois. Un instant je porte ma paume à l'herbe ébourriffée d'un flot de soir, où s'entrouvre le cœur de quelque corolle égarée ; mes yeux caressent son pétale doucement étreint de vent comme les plumes entrecroisées d'un oiseau. Pourrait-il s'envoler un jour ? Se rire de cette poitrine cotonneuse qui l'enchaîne à la terre, comme il en esquive l'étreinte factice en se tendant vers la brise ? Un frisson se déploie à ma gorge, cherchant ce souffle dérobé à mes lèvres ; et qui au fil des effluves de ma pensée jouait de se dissimuler à lui-même.
« Ton malheur. Pauvre enfant. Imaginais-tu donc être le seul à plaindre sur ce monde ? Une foule entière s'appitoyant sur ton petit sort ? Estime-toi heureux d'avoir trouvé quelqu'un pour te guider aussi rapidement, de t'être lié à un animal capable de te défendre à ta place. Te rends-tu simplement compte que ce guépard que tu couves d'un regard si désintéressé n'est que ce qui te rattache à ton souffle depuis que tes chevilles ne foulent le sol de l'île ? Que seul l'amour qu'il te porte a pu concéder à ta nuque gracile de demeurer vierge de sang ? »
Mes doigts effleurent le pampre délicat, traçant au creux de son efflorescence musquée l'esquisse d'horizons qui ne déclineraient pas. Qui peu à peu se travestissent et s'absolvent à leur enveloppe charnelle pour déployer un univers bien plus vaste ; éthéré, nébuleux, onirique à quelques-uns de ses reliefs... Et peut-être même infiniment plus libre. Dans celui-ci, l'oiseau volera sans entrave.
Je glisse mes yeux sur le parterre recouvert de feuilles, qui paraissait soudain s'évaser aux mains de cette âme spectrale, celle hantant parfois les objets ou les lieux marqués par le temps. Telle les réminescences ombreuses liées aux confins de ces multiples racines ; là où on sentait presque les tacites aspirations de mille personnes mortes depuis longtemps. Sans doute quelques amants, après une nuit des plus délicieux ébats, s'étaient évanouis dans la contemplation de ces nuages se délaçant avec paresse, pour faire naître à pan de ciel les derniers rayons d'un soleil somnolent.
Et bien que même les lointains parfums éclots à la cime de la forêt ne semblent sous les doigts n'exhaler qu'une simple fraîcheur bienheureuse, on peut discerner dès que nos souffles s'allongent au fil du vent, l'ivresse de tant de vies avortées, la transcendance d'un héritage qui jamais ne pourrait s'éteindre.
« Qu'est-ce que tu es, au juste ? »
Pendant quelques secondes, je me surprends à admirer son reflet sur la terre, déposant à son tour les roses de son âme sur cette Nature portant déjà le poids des courbures passées. La lumière ambrée, presque rosie, d'un vaste geste nonchalant s'allonge dans l'herbe assombrie, tentant de capturer la frêle silhouette de l'enfant – qui se dérobe d'un unique souffle à leur nitescence scintillante. Alors que son ombre, valsante sous les toiles de ses mots les plus innocents, déformée par quelque pierre drue ou feuilles mouvantes dans le vent, s'ourle d'une candide splendeur. Comme une mélopée délicate qui se fossilise dans un éclat d'éternité.
Ainsi incliné sur un sol auréolé de cuivre, il semblait couvrir de sa seule prunelle toute l'immensité des existences qui y avaient laissé le tampon de leurs souffles oubliés, comme autant de fleurs sur la sépulture de leur propre corps. Et pourtant au creux de ses paumes ne se burinaient bien peu de destins brisés ou accomplis, ou de fragiles fantômes tapissant une vie centenaire. Avait-il déjà, à ses années les plus jeunes, effeuillé de ses doigts encore satinés d'aurore les pétales d'une rose pour les mener sur le fil de la lune à ses chastes instants ; rompre ces chaînes condamnant leur envol ? Existait-il marque de jeunesse plus vive, plus immaculée que celle-ci ? Lorsque s'étend mon expiration jusqu'à l'orée des premières étoiles, je me sens sublimé par un être qui me dépasse.
« Probablement le témoignage d'un million de vies avortées dans le miracle de la mort, comme bien des vampires avant moi. Peut-être pour déposer les roses de leurs expirations dans le berceau de ceux qui naissent le lendemain ? Le monde est décidément la plus belle des tombes qui existe... »
Un nouveau sourire éclot à mes lèvres. Pourrais-je être plus que cela ? Après tout, un vampire est un néant. Ou est-il simplement égaré dans l'abîme, à faire fleurir au bout de ses doigts les chrysantèmes de chaque âme offerte à la lune.
« Certains disent aussi que je suis un monstre. Qu'en penses-tu, toi ? »
Un instant silencieux, je détourne le regard ; laisse dériver mes yeux sur l'astre lunaire qui doucement apparait sous l'étendue mordorée du ciel. Elle aussi avait vu le flux incessants des corps qui peu à peu se révèlent à l'ombre, bien plus, tellement plus que n'importe quelle prunelle. Telle une danse macabre, un bal empli des frous-frous de robes nimbées de souvenirs. La question s'égrène, un soupir s'évade à mes commissures. De nouveau, j'accroche les lumières dans les yeux de l'enfant.
« Tu peux m'appeller Ashley, si tu le souhaites. Et toi, qui es-tu ? Ou plutôt, sais-tu au moins qui tu es ? »
HRP ; Je suis contente de l'apprendre alors ** Si ça te plaît pas tu connais la chanson hehe
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Lun 26 Oct 2015, 22:00
ft. Lyham C. « A. » Jacobson
Au fil de ces veines bien trop bleues.
Akitsuna sentait avec soulagement les battements de son coeur ralentir et enfin laisser sa pauvre poitrine malmenée en paix. Les tremblements convulsifs de ses muscles s'apaisaient ; les nuages de son esprit achevaient de s'évaporer et il avait cette impression rassurante et familière qu'il contrôlait de nouveau son corps et le fil de ses pensées. Sa respiration se faisait encore quelque peu hachée ; cependant elle était régulière et il n'avait plus besoin de se concentrer afin de ne pas asphyxier. Ah, et ses jambes étaient en compote. Il n'arriverait pas à se relever -pas encore. Il poussa un soupir, encore. Mais le pire était passé. Théoriquement.
Akitsuna parcourut de son regard miroitant des astres de la nuit son environnement comme s'il le découvrait pour la première fois. Le soleil avait quasiment disparu derrière l'horizon et les premières teintes nocturnes peignaient désormais la voûte céleste. Les ombres de la forêt ne cessaient de grandir, et la visibilité très imparfaite que l'adolescent avait dans le noir risquait de fortement l'handicaper si le conflit éclatait de plus belle ; songea-t-il avec prudence tout en remuant nerveusement sur place, toujours adossé contre le tronc de l'arbre.
Aussi, le jeune homme aux allures de prédateurs se révélait sous un nouveau jour à présent qu'Akitsuna le détaillait plus soigneusement -surtout, avec l'esprit au clair. Il y avait toujours ces yeux uniques, aux pupilles écarlates presque trop claires ; une lueur pleine de malice pétillant en leurs coeurs ensanglantés. Sa chevelure au blanc si pur et si surprenant semblait duveteuse et, pour un peu, il aurait pu la confondre avec un cristal renvoyant des reflets aux couleurs insolites. Il possédait des traits et une silhouette efféminée ; néanmoins Akitsuna avait conscience de l'incroyable force qui l'animait. Plus tôt emprisonné par sa main glacée, aux longs doigts qui lui rappelait presque des pattes d'araignées, il avait été totalement incapable de se défaire de cette prise ferme mais indolore et s'était retrouvé plaqué au sol en une fraction de seconde comme si de rien n'était. Aussi rempli de magnificence qu'était cet être, aussi fragile pouvait-il paraître, il demeurait un quelque chose d'inconnu au commun des mortels et s'avérait être un prédateur redoutable et ô combien dangereux.
Pourtant, pourtant, il y avait ces détails qu'Akitsuna remarquait après coup. Des détails qui brisaient le charme de ce spectacle et qui rappelait la dure réalité au triple galop. Ce sang qui coulait le long de sa gorge. Ce sang qui apparaissait à la commissure de ses lèvres. Ce même sang qu'Akitsuna découvrait avec étonnement sur son propre visage. Il ne prit malgré tout pas la peine d'essuyer le liquide rougeâtre de sa figure. Se connaissant, il parviendrait seulement à étaler le tout.
La voix, devenue suave et beaucoup plus agréable à l'oreille, résonna dans un long monologue persifleur. Des mots peu communs agrémentés de tournure de phrases complexes réclamèrent à l'adolescent toute son attention afin de mieux pouvoir déchiffrer le discours. Il se rappelait que même sa grand-mère adoptive, pourtant dotée d'une richesse lexicale exceptionnelle, était plus aisément compréhensible pour le petit enfant qu'il avait été que lui, maintenant, en présence de ce personnage imprévisible et mystérieux.
Akitsuna se sentait qui explosait doucement au fur et à mesure qu'il comprenait les premières paroles, railleuses. Il était capable de beaucoup afin d'éviter toute forme de conflits, y compris s'écraser au sein d'une fierté blessée et d'un ego enterré plus bas que terre. Mais il n'était pas naïf -pas autant qu'il n'en donnait l'air. Il n'était pas non plus bouffi d'orgueil. Il n'appréciait simplement et absolument pas de se faire rabaisser par un parfait inconnu qui avait qui plus est manqué de le dévorer l'instant d'avant.
En fait, la situation en elle-même était particulièrement confuse et perturbante. Voilà que proie et prédateur conversaient tranquillement, comme si le second n'avait jamais tenté de faire du mal au premier et, pire encore, tenté de le manger tout cru.
Ce qui, au fond, ramena le garçon à calmer le feu de guerre qui s'était allumé en lui tandis que le jeune homme à la chevelure de neige le faisait passer pour... Pour pas grand-chose en fait. Il était pessimiste, certes. Mais pour une fois, il avait de sacrées bonnes raisons de l'être. Toutefois son interlocuteur n'avait pas tord en affirmant qu'il devrait être mort. Qu'il serait déjà six pieds sous terre sans l'aide miraculeuse apportée par ce guépard qui ne le quittait plus d'un pouce et qui le protégeait avec la férocité d'une mère pour ses enfants. Une bouffée d'affection pour ce félin dont il comprenait si peu de choses le fit frémir tandis qu'il se rendait compte d'à quel point il lui était redevable. Il ne quittait cependant pas un seul instant du regard celui qui l'assénait si volontiers de ses leçons. Les astres dans ses yeux se muèrent quelques secondes durant en étoiles filantes.
- Quand bien même, ça ne te donne pas le droit de me juger -ou de te payer de ma tête. Tu ne sais rien de moi. maugréa-t-il en un murmure quasi inaudible. Il avait sérieusement eu l'impression de se faire reprendre comme un enfant.
Akitsuna fit néanmoins l'effort de ne pas tiquer, conscient qu'il marchait présentement sur des oeufs et qu'il n'était pas non plus en position de se vexer pour quelques piques. Il dépendait intégralement des informations qu'il pourrait obtenir de ce jeune homme -et éventuellement, de l'aide qu'il pourrait lui offrir, même si de cela il doutait fortement. A propos d'informations, l'adolescent n'avait certainement pas oublié de noter dans un coin de son cerveau fatigué deux indications intéressantes, que l'individu menaçant avait laissé s'échapper : l'évocation d'un "lien" entre lui et le guépard (qui signifiait de fils en aiguilles que ce phénomène devait sûrement être quelque chose de connu, voire de courant, dans... Dans le coin) et le fait qu'ils étaient en réalité sur une île (cela élargissait l'horizon de "forêt très grande" à "île potentiellement immense"). Il faudrait qu'il tente de mieux comprendre ces deux points plus avant, mais plus tard. Ce n'était à vrai dire pas ce qu'il plaçait en tête de liste d'importance.
Le garçon avait ensuite posé la question qui lui brûlait tant les lèvres. "Qu'es-tu" ; plutôt que "qui es-tu". Un choix qui lui paraissait légitime. Il avait besoin de savoir d'où pouvait provenir toute cette puissance, tous ces pouvoirs. Toutes ces étrangetés. Aussi écouta-t-il avec une attention toute redoublée la réponse de son interlocuteur : réponse enveloppée sous une interprétation mélancolique qu'Akitsuna peina tout d'abord à comprendre pleinement. Jusqu'à ce qu'un mot, le mot-clé, lui saute aux oreilles. L'adolescent eut la sensation que son cerveau se fit plus lent uniquement pour qu'il ne soit pas victime d'une crise cardiaque -ou plus bêtement d'une crise de panique- en absorbant trop rapidement l'information qui achevait de chambouler sa perception de l'univers. Vampire. Vampire. Il avait bien entendu ? Ledit vampire le fixait avec un sourire qui lui parut cette fois-ci dénué de toute moquerie.
Akitsuna cligna des yeux. Cala sa tête bien contre l'arbre afin de ne pas défaillir. Il avait l'impression que tout tournait autour de lui. Ça commençait à faire beaucoup, beaucoup, en une seule fois. Ses paupières se fermèrent doucement. Le temps que la douleur passe. C'était psychologique. Il inspira, expira, méthodiquement. Il ignorait quel était le pire, d'apprendre que les vampires existaient vraiment, ou bien d'y croire d'emblée.
« Certains disent aussi que je suis un monstre. Qu'en penses-tu, toi ? »
Akitsuna rouvrit les yeux. Les étoiles qui y luisaient semblaient presque avoir faibli dans leur luminosité. Il se sentait d'un seul coup beaucoup plus fatigué. Alors comme ça, un vampire que l'on qualifiait de monstre s'inquiétait de savoir ce qu'il en pensait ? Si l'adolescent en avait eu le loisir, il aurait préféré stopper net la discussion et piquer un somme, toute simplement. Il emmagasinait trop de choses en trop peu de temps. Mais ce n'était pas du tout une bonne idée. Il n'avait pas le droit de laisser filer cette occasion.
- J'en pense rien. répondit-il dans un soupir. Il sourit ensuite paradoxalement pour lui-même -presque avec discrétion. Par contre, je sais que tu es celui qui m'as le plus fichu la frousse de toute ma vie.
Le guépard quitta finalement sa posture défensive pour se rapprocher du garçon, l'air inquiet. "L'air inquiet". Un fauve capable d'avoir un air -inquiet en plus de cela. C'était forcément dû au lien mentionné par le vampire, ça. Il faudrait qu'il s'informe là-dessus également. Il avait mal au crâne. Sacrément mal au crâne. Le félin renifla prudemment l'adolescent, attendit que ce dernier se détende et s'habitue à cette soudaine proximité, puis se lova confortablement à ses côtés. Ses yeux s'étaient fermés et un léger et agréable ronron émanait de lui ; sa queue se balançait de droite à gauche tel un métronome. Miraculeusement, Akitsuna se sentait soudain un peu mieux en fixant pensivement le balancement régulier du guépard. Il sentait que celui-ci demeurait malgré tout sur ses gardes.
« Tu peux m'appeler Ashley, si tu le souhaites. Et toi, qui es-tu ? Ou plutôt, sais-tu au moins qui tu es ? »
Akitsuna se fit violence. Reprit un peu de poil de la bête. Allez. Il ne devait surtout pas baisser les bras. Il avait la galaxie dans les yeux, pouvait créer des explosions, était accompagné d'un guépard mauve. Alors pourquoi pas des vampires ? Ce n'était pas si terrible en fin de compte. Il suffisait simplement de l'accepter. Comme ça. Il n'avancerait de toute façon pas s'il s'arrêtait au moindre petit problème. Après tout, cela ne faisait que révolutionner sa vision du monde... Rien de bien extraordinaire...! Il se redressa quelque peu et posa son regard étoilé sur le dénommé Ashley. Il nota que sa façon de se présenter, "tu peux m'appeler", laisser sous-entendre qu'il pouvait être nommé différement. Ou cacher sa véritable identité. Ou peut-être que le garçon était trop fatigué et qu'il commençait à sérieusement psychoter. Il crut entendre le rire amusé du félin dans un coin de sa tête.
- Ashley. D'accord. Il fit une pause, ne sachant que répondre à sa question. Je m'appelle Akitsuna... On va dire que c'est qui je suis, pour l'instant. En fait, je ne pense pas que ça va beaucoup changer, ça. Pas trop ? Remarqua-t-il tout en s'interrogeant lui-même. C'était encore confus. Très confus.
Puis, brusquement, une idée traversa l'esprit de l'adolescent. Une idée complètement suicidaire. Sûrement était-il vraiment éreinté. Il se redressa franchement, poussa son audace jusqu'à poser une main apaisante sur la tête du guépard, qui il le sentait n'approuvait absolument pas ladite idée.
- ...Écoute, je sais que rien ne t'oblige à m'aider. En fait, tu n'as aucune obligation envers moi. Mais j'aurais besoin de quelqu'un pour m'expliquer ce qui m'arrive. Il réfléchit. Ses méninges travaillaient dur. Voire même pour me guider vers, euh... Vers une ville ? J'imagine qu'il doit bien y avoir ça ? Bref. Ses yeux étaient braqués sur l'aura du vampire. Au cas où. Ça l'aiderait peut-être à prévoir sa réaction.
Il y eut un petit silence. Akitsuna avait conscience que le jeune homme n'avait absolument pas le profil de quelqu'un venant en aide à autrui naturellement. Il avait également cette intuition qu'il refuserait aussitôt de lui donner un coup de main si cela lui demandait trop d'efforts ou s'il considérait que cela lui ferait perdre du temps. Il fallait donc le convaincre. Et le garçon ne possédait qu'un argument qu'il considérait comme valable.
- Tu as faim-... Soif, non ? Sinon tu ne te serais pas jeté comme ça sur moi ? C'était le moment de se jeter à l'eau. La voix d'Akitsuna était calme mais il parlait de plus en plus rapidement, comme s'il voulait en finir au plus vite. Donc... Si tu acceptes de m'aider, je te laisserais boire mon sang... En quantité raisonnable...?
Hésitant, Akitsuna tendit son poignée comme une offrande, sans quitter l'aura d'Ashley des yeux. Le guépard avait cessé de ronronner, fixait le vampire, impassible. C'était l'idée la plus stupide qu'il ait jamais eue.
Hrp:
Huhu, oui en effet. Moi de même d'ailleurs, parce qu'en plus j'ai tellement trop écrit cette fois omg. D: Puis je me suis pas encore relue en plus. Puis voilà. Bref. ...Puis cette idée de dernière minute à la fin. C'est nawak. Pauvre Aki. Si ça t'arrange pas surtout dis-le moi je peux enlever ce moment. o/
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Mer 28 Oct 2015, 00:00
Étreinte.
Le fil de ses mots frôle le coin d'une lèvre fine, s'écarte jusqu'aux feuillages noircis par une nuit tombante. Puis s'effrite contre ses propres ténèbres, abandonne ses syllabes en une traînée d'étoiles. En silence, je les laisse s'effiler entre mes doigts, pour devenir ces quelques indolentes particules qui couvrent parfois le visage des hommes-acier. Au loin par-dessus les arbres, se délie la toile des ultimes lueurs, là où le jour fait l'amour à la nuit ; alors que leurs pensées s'évasent en nuée de soupir dans un ciel progressivement aveugle. Telle une inconstance décharnée à fleur de peau, qui fait, l'espace de quelques iniques secondes, appréhender la nuit comme la teinte délacée des amants.
Étreinte.
Tandis que, derrière lui, s'étire l'immense horloge de l'évanescence des instants. Puis sonne entre la longilignité de ses gracieuses aiguilles la majesté d'un monde déraciné à ses propres enlacements. Comme la lumière s'atomise vite, ainsi broyée par la pénombre ; et ses derniers fragments de rayons se suspendent à l'immense paupière du noir. Un battement frénétique frôle mes tympans, sourd et confus, puis soudain bien plus serein, comme une cascade s'effiloche en ruisseau. Serait-ce mon propre cœur ? Celui de l'enfant doucement bercé contre l'écorce noire ? Pendant quelques secondes, le vent se pare d'une nuance presque tragique, fuyante à l'orée des étoiles écloses comme autant d'éclats de diamants effleurant du velours.
Étreinte.
« Ashley. D'accord. Je m'appelle Akitsuna... On va dire que c'est qui je suis, pour l'instant. En fait, je ne pense pas que ça va beaucoup changer, ça. Pas trop ? »
Et s'engorge aux cils des astres fabuleux quelque élan de flammes ensommeillées. Comme si, dans la danse macabre des nuages éparpillés, la nuit allait ouvrir ses poumons, délacer son corset de sommeil martyrisant ses seins, écarter les ailes arrimées à son dos par la plus lubriques des reines. Prête à s'envoler, chuter avec euphorie. Au creux de ses mains déliceusement féminines, naît l'ombre témoignant du passage du jour. Et on sentirait presque les larmes de cette splendide amante embrasser la gorge de nos pensées, ruisseler sur son épaule cambrée.
Étreinte.
« ... Écoute, je sais que rien ne t'oblige à m'aider. En fait, tu n'as aucune obligation envers moi. Mais j'aurais besoin de quelqu'un pour m'expliquer ce qui m'arrive. Voire même pour me guider vers, euh... Vers une ville ? J'imagine qu'il doit bien y avoir ça ? Bref. »
Déjà, entre ses lèvres charnues, elle mâche ses premières froideurs. La brise s'écoule dans ma nuque, à l'arc de mon dos, pour un instant déformer ma peau en un relief frileux. Je détourne les yeux vers la courbe si douce du visage d'Akitsuna, longe d'un regard immatériel ses paupières translucides, ses lèvres ourlées de sang, ses mains de princesse au profil délié, presque onirique. Son histoire serait-elle funèbre ? Lorsque sous mes cils se meut sa poitrine d'un souffle pulsant, sa conscience-même semble défaillir dans la contemplation de cette vie véhiculée au long de ses artères délicates.
« Tu as faim-... Soif, non ? Sinon tu ne te serais pas jeté sur moi comme ça ? Donc... Si tu acceptes de m'aider, je te laisserai boire mon sang... En quantité raisonnable... ? »
Mon monde est une courbe qui s'allonge. Je dessine mes pas sur les fragments oxydés de votre lassitude.
En silence, j'arque un sourcil, expire sur une mèche fumée par le frottement de la toute jeune nuit. Encore un original. Mes yeux parcourent un instant son visage voilé par les ténèbres, où se tissent quelques sentiers d'incertitude. Là, son poignet se tend dans ma direction, écartelant un épiderme blanc.
J'observe un instant la peau étirée sur des veines incroyablement bleues, où palpite dans un roulement effréné un souffle effleurit sur la chair elle-même. Nous les savons fragiles, tous les deux. Atrocement fragiles, filées dans un cristal aux milliards de reflets éphémères. Pourtant, plus que n'importe quelle autre, on y lit bien trop de vies humaines, qui y lacèrent quelques ourlets pour faire ruisseler leurs gracieuses existences en des bouquets de roses épars. À cette seconde, je ne saurais dépeindre cette sensation blottie jusqu'à ma colonne vertébrale ; ou peut-être par un seul mot. La peur. Une peur horriblement brûlante. Une peur assouvie. Alors que la langueur lasse du soir dépose à mon côté un frémissement vicié, ma prunelle effleure les sillons indigo, comme ceux qu'un élan de crainte graverait dans ses reins, en quelque pensée vengeresse.
Une fragrance insoutenable me fait chanceler sur mes talons, comme rapatriée au creux de ma nuque par la simple vision de ces nervures violacées. Dérobées à leur propre cours en spectres vaporeux. Un instant, je les imagine se pencher sur son corps abandonné, expirant leur haleine létale en lourds nuages. Mon bras se tend, la jointure de mes phalanges caresse avec la douceur d'un amant les frêles artères.
« Inconscient. »
Ce mot, je le murmure à la nuit, dans une haletante supplique. Mélancolie silencieuse, soupir ; prière offerte à l'ombre soudain plus étouffante que du plomb, dans le désespoir de celui qui ne croit plus. Mes doigts se referment subitement sur le poignet du jeune homme – d'un mouvement je l'attire à moi jusqu'à ce que son dos effleure mon torse, passe son bras derrière sa nuque fine.
Une crainte altérée, martelante, suspendue au bout de mes lèvres. Ma joue s'incline jusqu'à sa petite main frémissante, où s'écoule à l'orée de ses ongles la torpeur adolescente, qui submerge les raisons les plus jeunes en quelques folles idées. Déjà, mes dents de requin croulent à ma gencive, presque fébriles. Comme animées en quelques lignes philharmoniques, dans les méandres de sa chair suppliciée.
D'une prosternation maladive, je broie la fragile peau qui le soustrait à la lune encore pâle – appuie ma main sous sa mandibule pour y sentir les battements frénétiques. Tremblant d'arracher cette mince poitrine, d'effriter les os de ses côtes pour contempler son cœur pulser son souffle dans les voiles du soir. Mes doigts chutent jusqu'à son flanc, longent la courbe de sa hanche, presque évasés à un désir sexué. Diapason de souffrance, un frisson éclot peu à peu à ma gorge ; alors qu'à fleur de peau, jusqu'à la ligne de mes cils, une aiguille noire trace l'étole du vermeil. Que ne graverait-on à ses muscles, que ne martyriserait-on sa respiration déjà trop fragile ! Je la sens se déployer dans l'air rafraîchi, toute entière élancée vers le flot écarlate de vitalité qui ruisselle au long de son bras, sur son épaule et jusqu'à son jeune pectoral. Oubliée dans sa propre déperdition, sifflante comme dans le témoignage définitif d'une âme qui se saurait mourante.
Étreinte.
Étreinte.
HRP ; xDD ta réponse est tellement bien omg ;;;;; Je me suis arrêtée là parce que je savais qu'Ashley ne pourrait pas cesser tout seul de presser Aki comme un citron /out. Et que je voulais pas faire intervenir ton guépard si t'avais pas envie (et encore moins Akitsuna du coup 8D). Donc je te laisse décider de comment ton elfe va le faire dégager huhu. 'Fin tu vois après si tu veux pas y'a aucun souci tu me dis et j'allonge ma rep <3
Invité Invité
Re: •• Au fil de ces veines bien trop bleues. | Jeu 29 Oct 2015, 00:29
ft. Lyham C. « A. » Jacobson
Au fil de ces veines bien trop bleues.
Plus Akitsuna y pensait, plus il trouvait son idée, disons, complètement stupide. Stupide, irréfléchie, et suicidaire. Avait-on déjà vu une proie s'installer tranquillement sur un plateau d'argent brillant puis se fourrer une pomme dans la gueule toute seule avant de se présenter comme pitance pour son prédateur ? Sérieusement. Il ne manquait plus qu'il lui propose un petit assaisonnement et ce serait la cerise sur le gâteau. En fait, son subconscient devait avoir quelques envies de l'achever en toute discrétion. Sinon il ne voyait pas comment une illumination aussi périlleuse avait pu lui venir à l'esprit. Lui qui se battait becs et ongles depuis de longues heures déjà pour ne pas se faire dévorer par la faune de cette forêt -de même que par ses visiteurs vampiriques -, le voilà qui s'offrait à présent, lui ainsi que son sang, à l'une de ces créatures de la nuit comme si c'était la seule chose raisonnable qu'il ait à faire. Il se jetait simplement et purement dans la gueule du loup. Quasiment au sens propre du terme en plus.
Pourtant, quand Akitsuna se penchait avec plus de calme et de self-contrôle sur le problème, il ne voyait pas comment il pouvait faire autrement. Il se savait plutôt doué pour jauger autrui. Et de ce qu'il voyait d'Ashley, ce n'était certainement pas le genre de personne qui lui offrirait son aide ou se laisserait ensevelir d'interrogations avec la patience d'une mère par un pauvre petit être perdu ; du moins pas sans rien attendre en retour. Ce n'était clairement pas un bon samaritain. Peut-être était-ce juste son caractère, peut-être était-ce dû à sa nature de strige. Et c'était à vrai dire bel et bien cette nature qui sauvait par la même occasion la mise du garçon : ce dernier n'avait effectivement, et à première vue, rien d'intéressant à offrir. Il avait bien son portable (qui ne captait à vrai dire aucun réseau au milieu de cette forêt), son porte-feuille (qui ne contenait, bien sûr, que très peu de sous ; qui plus est, le cliché voulait que tous les vampires soient pleins aux as, aussi n'envisagea-t-il absolument pas l'idée de payer celui-ci), et... Et c'était quasiment tout. Il y avait également ce porte-clé un peu bizarre, dont la silhouette rappelait vaguement celle d'un singe, qui était accroché à son portable, et les lunettes moto que l'adolescent gardait rangé dans sa poche de jean ; mais il n'avait pas besoin de demander quoi que ce soit pour deviner que rien de tout cela n'avait de valeur aux yeux du jeune homme.
Et, forcément. On en revenait au point crucial : Akitsuna ne possédait, en fin de compte, que son sang pour faire office d'échange. Enfin, surtout pour motiver le dénommé Ashley à l'idée de lui donner le coup de main dont il avait tant besoin actuellement. Il n'arriverait pas à s'en sortir s'il n'était pas capable d'appréhender un minimum sa situation ; or, pour cela, il lui fallait des réponses à ses questions. Il lui fallait des explications consistantes, compréhensives. Il lui fallait quelqu'un pour le guider, ne serait-ce qu'un peu -et même temporairement. Quand bien même le premier être humain-... Le premier être semblable à un humain qu'il rencontrait se révélait être dans un premier temps carrément hostile et effroyablement dangereux, puis dans un second temps purement et méchamment sarcastique. Peu importait donc que sa compagnie ne soit pas celle rêvée : Akitsuna devait s'adapter à lui, ne pas trop l'agacer, ni le faire fuir d'une façon ou d'une autre. Il devait lui donner une raison de lui rendre service. Ce qui une fois encore ramenait le garçon à une conclusion identique. Qui plus est, le vampire était affamé -assoiffé- ; aussi ne devait-il pas laisser cette occasion filer. Même si ça pouvait paraître bas, il devait exploiter ce ventre vide afin de sauver sa peau. Ce qui était très ironique en fait, puisqu'au moindre faux pas il finirait vidé de ce liquide rougeâtre qui le maintenant en vie. Monsieur le Destin avait un sens de l'humour tout particulier.
Le fil de sa pensée lui confirmant que son idée était certes totalement suicidaire mais également l'unique solution qui s'offrait à lui, Akitsuna tendit finalement son poignet dénudé au jeune homme à la chevelure enneigée. Il inspira avec précaution, vida ensuite l'air de ses poumons dans une expiration contrôlée. Il ne devait en aucun cas paniquer. Ni perdre ses moyens. Il devait garder ses pensées au clair : sa situation n'était pas de tout repos et, plus encore, il s'était mis tout seul dans une position relativement délicate. Il devait l'assumer.
Le guépard demeurait quant à lui immobile ; cependant il s'était recroquevillé de sorte à pouvoir bondir tel un ressort à la gorge du vampire si celui-ci faisait le moindre faux pas. Les battements du coeur de l'adolescent s'accéleraient (quoi que, fort heureusement, ne devenaient pas erratiques) malgré lui tandis qu'il observait l'aura écarlate d'Ashley frémir à sa proposition ; ce dernier haussait d'ailleurs un sourcil, silencieux et probablement surpris. Il chancela imperceptiblement.
Akitsuna attendit dans un silence de mort la suite des événements, les lèvres légèrement pincées ; anxieux. Il suffit au vampire de tendre le bras pour atteindre l'adolescent, qui ne bougeait pas d'un pouce et mordillait désormais furieusement sa lèvre inférieure afin de ne pas écouter son instinct de survie et décamper sans demander son reste. Une caresse légère comme la brise effleura ensuite son poignet. Akitsuna tressaillit faiblement, incapable d'ignorer le chatouillement qu'elle suscitait ; l'ombre d'un sourire flottait au-dessus de son visage.
« Inconscient. »
L'elfe qui s'ignorait ne répondit à ce délicat chuchotement que par un sourire mi-figue mi-raisin. Il ne pouvait nier qu'il l'était. Inconscient. Ashley referma soudainement ses doigts sur le poignet du garçon avant de le tirer jusqu'à lui. Ce dernier suivit le mouvement, docile, et laissa le jeune homme le positionner le dos à quelques petits centimètres de son torse sans jamais relâcher sa prise. Une main de fer dans un gant de velours. Du moins en gestuel, et probablement parce que l'adolescent ne se débattait absolument pas, la créature de la nuit se montrait relativement douce. D'ailleurs, il était presque... Trop doux, en fait. Juste, trop. Cela laissait une impression étrange au garçon qui sentait à présent du bout de ses doigts la joue fraîche du vampire. Il frémit. Ne bougea néanmoins pas d'un iota. Il se contenta d'une vague grimace lorsqu'il sentit les dents, acérées, percer sa chair. Son coeur au contraire fit un bond phénoménal dans sa poitrine, effectua quelques ratés, puis reprit son rythme à celui d'un cheval de course. Ne pas se débattre. Rester détendu. Presque. Le vampire glissa ensuite sa main sous le menton d'Akitsuna qui demeurait immobile comme une pierre. C'était une sensation totalement unique, que d'avoir quelqu'un qui buvait votre sang. Ce n'était pas nécessairement douloureux (simplement comme si on lui avait fait deux piqûres simultanément, rien de bien extraordinaire à vrai dire), mais c'était vraiment... Curieux. L'aura rougeoyante paraissait prendre la forme de ronces tandis qu'elle encerclait l'adolescent, lentement mais sûrement. Pas de panique, murmura-t-il pour lui-même.
Le regard dudit adolescent s'était d'ailleurs tourné vers le ciel. Il fixait la voûte céleste qui se paraît à présent du joli noir de la nuit, observait ces rares nuages qui défilaient si lentement sous son oeil excessivement attentif. Il tâchait de rasséner le guépard qui trépignait manifestement d'envie de planter ses propres crocs dans la jugulaire d'Ashley. Il écoutait le bruissement des feuilles ; faisait de son mieux pour penser à autre chose qu'à ce sang qu'il perdait peu à peu.
Le garçon écarquilla cependant les yeux lorsqu'il sentit la main du vampire se mouvoir le long de son flanc avant d'atteindre sa hanche. Sa tête se vida brusquement, puis il serra la mâchoire, saisit ladite main dans la sienne -celle qui était encore libre-, afin de l'empêcher de se balader plus en avant. Par mesure de précaution.
Fallait-il vraiment que ce soit, tellement... Sensuel ? C'était inscrit dans les gènes de l'espèce, ce charme incroyable, ou bien toute cette gestuelle lascive était-elle propre à l'individu en question ?
Akitsuna se sentit tout à coup défaillir alors qu'un frisson glacé parcourait son échine. Ok. Il était temps de s'arrêter. Il tira doucement sur le poignet que le vampire gardait toujours entre ses dents. Et, à sa grande surprise, il fut incapable d'esquisser ne serait-ce qu'un geste. Ses sourcils se haussèrent à l'unisson tandis qu'il commençait à gigoter sur place afin de se manifester. Calme. Il fallait rester calme. Il appuya franchement son dos tout contre le jeune homme, leva la tête -et se déboita au passage le cou- pour le regarder yeux dans les yeux.
- Eh. Ashley. C'est bon. Stop. L'avertit-il avec toute l'autorité dont il était capable.
Pas de réactions. Autorité, zéro. En revanche, pire encore, le garçon se sentait brusquement comme... Comme compressé. Il sentait l'étreinte du vampire qui se faisait de plus en plus étroite. Il commençait à avoir du mal à respirer ; et il avait cette impression effroyable que ses côtes allaient se briser, et ce, d'un instant à l'autre. Le félin glapit tout à coup, bondit sur ses pattes, grogna toute sa hargne en signe d'avertissement.
Akitsuna avait quant à lui déjà lâché de sa main libre celle d'Ashley et cherchait avec angoisse le premier objet qui serait sa portée. Il suffoquait. Ses doigts se refermèrent une seconde plus tard sur un caillou relativement gros, qu'il plaqua ensuite sur le bras du vampire. Il verrouilla la cible du regard. La menace était visible et compréhensible. Pourtant Ashley ne réagissait pas. Le visage d'Akitsuna se tordit de désespoir : il n'arriverait pas à lui faire de mal, pas après avoir constaté qu'il avait une conscience. Pas en sachant quelle douleur il s'apprêtait à lui faire ressentir en toute connaissance de cause. Maudit soit sa bonne conscience et tous ses principes naïfs ! Il était en train de mourir, que Diable...! Il ne comprenait pas pourquoi même en cet instant il trouvait que c'était vraiment trop contre-nature de faire du mal à qui que ce soit -même envers un potentiel meurtrier. Son regard rencontra une dernière fois celui du vampire en ayant l'impression que ce dernier le regardait sans le voir, puis se dirigea vers celui du guépard. Ce dernier, suite à un accord tacite, s'approcha vivement de l'adolescent, se redressa quelque peu puis s'étendit comme un fil de rasoir afin de poser sa patte sur le bras dégoulinant de sang du garçon. Ils disparurent dans un petit éclair lumineux pour réapparaître l'instant d'après à quatre bon mètres où Akitsuna finit aussitôt à quatre pattes, incapable de rester assis droit et encore moins de tenir debout. Il prit une immense inspiration de noyée, comme s'il avait été privé d'air durant de longues minutes (ce qui, au fond, était presque le cas). Il avait la tête qui tournait ; son corps était transi de froid et tremblant du choc qu'il venait de subir -un de plus. Il tenta de se relever, chancela, fut rattrapé par le guépard qui lui offrit une épaule charitable sur laquelle s'appuyer. L'adolescent prit ensuite son poignet mordu dans son autre main, serra le tout aussi fort que possible afin de stopper l'écoulement du sang. Après quoi il se tourna vers Ashley en grimaçant, épuisé. Vraiment épuisé.
- J'espère pour toi que tu as savouré ton dîner et que tu es rassasié, parce que je serais pas en mesure de te laisser boire une seule autre goutte de mon sang. Ses sourcils se fronçèrent. Il avait l'impression que le décor était une tornade tout autour de lui. On t'a jamais dit que la gourmandise était un vilain défaut ?
Sans parler du fait qu'il l'avait littéralement broyé. Du moins, avait essayé. Il se frotta les côtes à l'évocation du souvenir douloureux... Un souvenir douloureux encore d'actualité à vrai dire.
- La prochaine fois que que tu veux faire un câlin, trouve un bon gros nounours : tu risqueras pas de lui briser des côtes au moins, à lui. S'esclaffa-t-il mi-figue mi-raisin. L'humour -ou un quelque chose qui s'en rapprochait. C'était ce dont il avait besoin pour se détendre.
Même s'il était quelque peu furax. Très furax, en fait. Akitsuna savait néanmoins que c'était de sa faute : c'était lui qui avait eu cette idée, alors il était logique qu'il doive en subir les conséquences. Il était également conscient qu'Ashley n'avait rien d'un ange (c'était un vampire alors, ça tombait vraisemblablement sous le sens). En conséquence de quoi ce n'était pas tellement surprenant s'il avait tenté de le vider de son sang. Par contre, il avait sacrément intérêt à accepter de l'aider maintenant. Sinon, cette fois-ci, l'adolescent n'hésiterait plus à lui exploser des cailloux à la tronche, ni même à retenir un fauve furieux de lui déchiqueter la gorge. Ce dernier ne cessait d'ailleurs de grogner et de rugir dès que le vampire esquissait le moindre mouvement.
Akitsuna poussa un soupir. Tout aurait été tellement mieux s'il n'avait jamais atterri sur cette île.
Hrp:
Merciiii ça me fait super plaisir que tu me dises ça tu sais. *o* Mais tes réponses aussi sont extras vois-tu ! <3 Y'a aucun soucis, ça ne m'aurait pas dérangé si tu avais un peu contrôlé Mauve ou Aki. o/ (Sauf que du coup j'ai pas trop fait avancer le rp, navrée pour ça ! Dis-le moi si tu veux que j'édite hein)