Time to see ahead [ALLIAM]

Le ciel est souvent bleu ici. Pour penses-tu à cela, maintenant, ici ? Car tes pensées sont claires, comme elles le sont rarement depuis... ce jour. Depuis que tu possèdes cette nouvelle nature, la peur reste bloquée dans un coin de ta tête, accrochée ardemment à tes méninges. Et ta gorge sèche, t'empêche d'être en paix. Mais ici, tout est différent. Ici, tu as le temps de penser au ciel, à l'avenir... oui, le ciel est bleu, il ne l'était jamais autant à Seattle Oui, tu te rappelles également de ce passé que tu chéris tant, et qui te manque tellement...

Ce lac est-il donc spécial ? Peut-être... mais la Mer de Nuages a le même effet apaisant, la petite baignoire de ton refuge, ta maison également... même si ce cadre reste bien plus agréable qu'une vue sur un carrelage blanc orné de nombreuses fêlures. L'eau te calme, elle te berce, comme si elle comprenait ta souffrance, ta douleur, ta peur... elle te calme, comme ta mère l'aurait fait avant. Mais ses sourires se sont effacés quand on lui a volé sa vie, et la tienne par la même occasion.

Te laissant porter par le clapotis des légères ondulations aqueuses, un sourire se dessina sur tes lèvres, malgré les pensées tortueuses qui te possèdent constamment. Pourquoi ce sourire ? Tu aurais y rester, cette nuit, tu aurais pu finir à la morgue comme elle sûrement... regarder ce ciel magnifique te prouve que tu es bien vivant malgré ta peau froide, plus vivant que le cadavre que tu aurais pu devenir, qui aurait fini encastré dans un coin de terre. Le soleil tente de réchauffer ta peau blanche et sans un bruit, tu arques tes muscles, les réveillant doucement. Tu prends ton appui sur le sol poreux du lac pour t'enfoncer dans l'eau fraîche. Et enfin, tout ton corps se retrouve immergé. Enfin totalement sans ton élément. Si avant tu pouvais retenir ta respiration de très longues minutes, aujourd'hui, elle t'est inutile, elle reste un réflexe, qui te réconforte dans l'idée que la vie ne t'a pas quitté.

Tu souris Liam. Tu nages et tu es vivant. Vivant comme ce jeune garçon qui riait aux fêtes dans la forêt, qui donnait tant de joie à ses amis. Qui passait ses nuits à rire avec Adrian par sms, ou encore qui passait de délicieuse après-midis avec Nastasia dans les champs bordant la forêt. C'est dans ses moments, que la roue tourne, que tu vois l'avenir comme une chance à saisir, et non à subir. Ces dans ses instants, que tu images ton futur loin de la solitude, avec des amis, plus seul dans ta petite maison. Tes yeux sont animés, tu es vivant.

Ton cœur est brutalement chaud, brûlant, bouillant dans ta cage thoracique qui peine à contenir cet excès de « bonheur » si rare depuis des mois. Tu remontes vivement à la surface, pour transpercer la surface de l'eau qui te trouve perturbée, elle, si lisse habituellement.

Oui, tu n'as pas besoin de respirer vraiment... mais tu gonfles tes poumons d'air frais. Tes yeux fermés, tu sens chaque goutte d'eau ruisseler le long de tes muscles, profitant simplement, de cet instant qui pour des milliers de personnes, doit sembler stupide. Tu restes dans toutes ses sensations exquises qui remontent à la surface, celles qui semblaient perdues dans les limbes de ton être depuis ta transformation. Tu ne l'entends pas arriver, toi le vampire aux sens pourtant amplifiés.

Une ombre, tu te retournes vivement. Tu as beau sentir tes muscles se contracter, il arrive trop rapidement et le choc t'embrouille dans tes pensées. Ta respiration se coupe et ton corps tombe à la renverse. Une petite douleur se fait ressentir dans tes côtes. Rien de grave, mais le choc survenu avec surprise se trouvait être assez violent pour que toi, le jeune vampire, tu te fasses entraîner à terre. Enfin le tourbillon cesse et tu te retrouves plaqué contre au sol, par... tes yeux plissés à cause du soleil derrière l'inconnu ne te permettent pas de savoir qui c'est. Un inconnu. Sur toi. Enfin ta vison semble s'adapter à cette forte luminosité. Tu ne bouges pas, tes pensées encore confusent. Ton corps tendu est méfiant, mais ses yeux dans les tiens t’empêchent de faire le moindre mouvement. Son regard. Il n'est pas agressif, ni dur. Il est empli d'un sentiment que tu connais si bien, l'espoir et de bonheur. Un regard trempé, joyeux, et le tien perdu. Des mots s'échappent de ses lèvres de ses lèvre humides et ils résonnent à tes oreilles comme une plainte, presque une supplication, une envie...

► S...Seth? Qu…

Son sourire s'efface à la vitesse avec laquelle le tien était arrivé. Tu es l'objet de sa déception. Tu arrives donc à faire du mal même à un inconnu, Liam. Tes muscles restent contractés, mais tu soulèves légèrement ta nuque, un mince filet d'eau coulant le long de ta chevelure. Tu essaies de bouger légèrement, mais le jeune homme pèse son poids sur ton bassin, et malgré ta soif, malgré le choc précédant, tu sais que si tu essaies de te dégager par la force, celle que tu ne contrôles pas, tu risque de lui faire mal.

Tu observes son visage, fin, pâle, tu sens son corps léger sur le tien... les yeux emplis d'incompréhension, des paroles s'échappent enfin de tes lèvres jusque là scellées.

► Euh... Seth ?

Tu essaies de lire ses expressions faciales, de comprendre sa déception, sa tristesse. Tu comprends rapidement que le brusquer n'est pas la meilleure des solutions et son corps tremblant, te maintient toujours à terre.

► Eh... ! Ça va aller ?
 
Oui, tout le monde poserait cette question, et Liam n'a plus vraiment l'habitude de s'occuper des autres. Mais la pâleur du jeune homme, et ses larmes te montrent clairement que non, ça ne va pas. Alors que vas-tu faire Liam ? Fuir une nouvelle fois, tes semblables, ou rester, ainsi. Rester pour lui, pour ne pas l'abandonner seul sur les berges.

Toi qui a ressenti tant de vie depuis quelques minutes. Reste vivant encore un peu.

© a s h