« WAKE UP. » Ft. Douuuble [Hansel&Elliot]

« Eh, parait qu’il y a des pirates qui ont brûlé toute une flotte de bateau pas loin! »

Je soupire bruyamment en levant les yeux aux ciels, exaspéré par le taux de rumeurs wtf qui traîne dans les environs. Brûlé? Sur l’eau? Les pirates sont moins cons que ça, je pense. Faut vraiment être barge pour croire des trucs pareils.

« Sérieux? Mais ils ont pas… »

Et c’est reparti. Y a des fois où j’me demande vraiment pourquoi je vais dans des endroits avec des abrutis pareils, mais bon. Je choisis pas toujours ma destination. Lâchant un grognement, je me renfrogne dans mon siège, cherchant désespérément à passer inaperçu malgré ma tignasse ciel en triturant mon verre vide. Faut dire que ce lieu déborde de crétins, et j’ai pas envie de me retrouver mêler à leurs affaires. P’tain mais pourquoi j’ai accepté d’accompagner Jack? En plus cet enfoiré m’a lâché dès qu’on a foutu les pieds ici. “j’te revaudrais ça” mon cul, ouais. Je tourne la tête en fixant d’un oeil mauvais la fille qui menace de s’approcher avec un sourire aussi barbifié que son physique 100% botox, hausse un sourcil devant sa persévérance avant de me relever, un air autain greffé au visage. Qu’elle daigne encore s’approcher ne serait-ce que pour placer un mot d’une voix mielleuse de sous-entendus. Ses talons claquent une nouvelle fois sur le sol - comment elle fait pour marcher avec des échasses pareilles? - et son sourire s’élargit, comme si elle n’avait pas vu la tempête d’éclairs que je me cassais les burnes à lui envoyer depuis dix plombs. Voyant qu’elle ne dévit pas son chemin, fixant ses yeux bleues entourés d’une couche phénoménale de maquillage sur mon visage blanc comme neige, je m’avance à son tour vers elle, lui colle mon verre entre les mains avant de la contourner et de me casser, non sans l’avoir tchipé au passage. Une bonne chose de faite.

Je claque la porte, râlant une enième fois contre un peu n’importe quoi, avant de m’affaler sur le sol, contre le mur d’en face, les bras croisés et le menton collé contre mon torse. Journée de merde. J’aurais préféré me faire enlever par des pirates, comme ils disent, ça aurait été plus fun. En parlant de pirates, les rumeurs qu’ils balançaient me reviennent peu à peu à l’esprit, et je me met à y réfléchir. Il me semble bien avoir entendu plusieurs fois qu’un navire de pirates était amarré au port de la mer de nuage depuis pas mal de temps. Non mais qui serait assez doué pour se faire “kidnapper” dans un bateau amarré? … L’image d’une blondinette servient dans ma tête. P’tain. J’en connais une qui en serait capable.

Et si jamais les rumeurs étaient vraies? Enfin, pas toutes, j’suis pas une fillette naïve tout de même, mais quelques unes, les plus réalistes. Je me mord la lèvre inférieur en pensant à ma demi-soeur, que je n’avais toujours pas retrouvé malgré les mois passé ici. Si c’était le cas, si elle avait été enlevé...Tout serait logique, comme le fait qu’elle ne m’ait jamais contacté. Les paroles de Sven me reviennent rapidement en tête: elle voulait re-faire sa vie, avoir sa liberté blablabla. Ouais bah si elle s’est faite séquestrer, sa liberté, elle peut se la mettre où je pense, à ce niveau. Je soupire pour la seconde fois en moins de dix minutes, me relève, m’étire et fixe la porte que je venais d’emprunter. Bon, Jack devra rentrer tout seul comme un grand, hein.


La nuit était déjà tombée depuis pas mal de temps, ce qui a comme effet, en plus de me laisser quasi seul dans les environs, de me taper tout les imbéciles de piafs en pleine tête parce que je n’ai pas hérité de vision nocturne et qu’ils sont pas assez intelligents pour voir qu’il y a quelqu’un devant eux. Parce que oui, je vole - pour changer - au dessus du sol en direction de la mer de nuage citée plus haut, histoire de rendre visite aux fameux pirates. Oui, la nuit, CHUT, Je suis certes un pervers mais non voila quoi.

« P’tain c’loin ce truc… »

Ça doit bien faire deux bonnes heures que j’étais parti de mon appart’ - jamais je n’avouerais m’être perdu - , et l’horizon vient à peine de se dessiner en...bah en nuage, kofkof. Je continue à voler quelques kilomètres avant de me poser sur le port, avec autant de discrétion que la nature me permet, réajuste mon haut avant de marcher le long d’un ponton, sans pour autant chercher le moindre bateau de pirate. A moins qu’ils soient franchement idiots, c’est pas sur un port en évidence avec une pancarte “ceci est un bateau de pirates, ne pas toucher, le vernis vient d’être refait” qu’ils vont se poser. Réactivant mon don, je lévite au dessus de l’eau, allant un peu partout histoire de dénicher le bâtiment thanks Double~. Il doit bien se trouver quelque p…

Bam. En effet, je crois que je viens de le trouver. Je retiens un grognement en frottant ma tête endolorie par la choc tête-coque, et relève la tête. Haaaaawn, caché par la magie, eukay, je pige mieux. C’est que c’est loin d’avoir la taille d’un canoë ce truc-là. Bon, après, attaquer un navire en canoë, j’dis pas la renommé. Toujours sous le contrôle de mon don, je longe la coque vers le haut, discrètement, veillant bien à ce qu’il n’y ait personne qui ne puisse me voir, ce qui serait assez dommage. Surtout pour moi. Une fois m’être assuré que le pont est vide, je me glisse sans bruit dessus, gardant au minimum dix centimètres entre le sol et mes pieds - ça serait con que le bois craque, m’voyez - pour avancer. Bon, alors, les cabines, les cabines… Où c’est que c’est, ça…

AHA. Trouvé, au bout de cinq minutes de recherches, après m’être planqué en croyant ma vie finit lorsqu’une fille aux cheveux blonds en deux couettes est passé tout près de moi, sans pour autant me remarquer Kuku capute. Oui bah je savais pas que la cabine était sur le pont principale, hein, j’suis pas un pro des navires de pirates. Je contourne par l’exterieur jusqu’à trouver une fenêtre, et la traficote légèrement - pouvoir cheaté - afin de l’ouvrir de l’intérieur et d’y rentrer, silencieusement, comme un gosse qui rentre chez ses parents à 3h du mat’ discretos. J’aurais bien dis que la lumière est ce qu’il manque, mais vu qu’on est en pleine nuit et que la personne présente dans la pièce est censé dormir, voila voila, on va pas chipoter. Une fois à terre, les bottes posées sur le sol, plutôt, je me retourne dans la cabine pour essayer d’un voir quelque chose.

Bon, c’est mort, je vois à peine le contours des meubles, mais au moins j’ai cru discerner un semblant de lit au fond de la pièce. Avec ma nonchalance relevant de l’insolence habituelle, je tire les rideaux histoire de faire entrer la lumière de la lune et des étoiles, éclairant déjà plus la pièce. Je me retourne enfin, avance calmement vers le lit, me penche dessus et...et tire la couette d’un mouvement, tout en me jetant sur le gens dans le lit en le plaquant contre.

« ELLE EST OU LEONOR? »

Quoi? Comment ça l’hypothèse m’était montée trop vite au cerveau?

« Leo... QUOI ?! »

La voix de ma simili-victime - je me fais pas d’illusion - avait crié sur le même ton que moi, sûrement par réflexe, s’étant affolement réveillée juste avant. Mes sourcils froncés et mes mains agrippées à ses poignets, je tente de le détailler dans le noir, mais avec l’obscurité présente dans la pièce - la lumière de l'extérieur n’étant manifestement pas suffisante - tout ce que je vois c’est qu’il s’agit d’un homme - quoique je le savais déjà - bruns aux yeux écarquillés, ce dernier détail n’étant, je suppose, que temporaire. Je sens alors un étau autour de mes jambes et sursaute, mais trop tard pour réagir: d’un coup de rein, il bascule nos positions et je me retrouve en dessous, bloqué entre le lit et celui sur qui je m’étais jetté dessus il y a moins d’une minute. D’abord surpris, je me mors la lèvre, fronçant les sourcils et fusille du regard le jeune homme au dessus de moi, frustré d’être physiquement soumis, bien que la position dans laquelle il était ne me déplaît pas plus que ça.

« Hey hey hey mon pote, calme toi... »

Sa voix magnifiquement enrouée atteins mes oreilles, et ses mains m’empoignant ne me laissent aucun espoir d’évasion; A contre-coeur, j’efface de mes pensées toutes tentative de me débattre en vain. Pestant dans ma tête, je fixe furieusement le brun qui fait la même chose. Maintenant qu’il est plus en hauteur, la lumière éclair d’autant plus son visage que je peux distinguer légèrement mieux ses traits. Yeux vermillions, cils aérodynamiques, joli visage, il est tout à fait canon. Plus que tout, son torse était totalement dénudé, et d’après ce que je peux sentir au niveau de mon bassin, il n’est pas beaucoup plus vêtu en dessous de la ceinture. Compte tenu de ma position actuelle, je me retiens fortement de baisser mon regard, histoire de ne pas m’en prendre une.

« Tu bouges et je t'attache, pigé ? »
« Gnn... »

Je cligne des yeux, ne m'apercevant que maintenant que sa prise autour de mes poignets s’était atténué, alors qu’il la retire complètement. Exceptionnellement docile, je reste allongé sur le lit, en partie parce qu’il est confortable mais aussi parce que son ton était totalement dissuadant à contredire. Le joli brun se lève et tâtonne sur le mur, jusqu’à trouver l’interrupteur qui illumine la pièce et me fait fermer les yeux par réflexe avant de me faire brûler les rétines. J’ouvre doucement les yeux, contemplant quelques secondes la pièce avant de tourner la tête vers mon hôte...et son corps parfaitement sculpté vêtu, comme je le pensais, uniquement d’un caleçon graou *sort*. Son soupire brise le silence qui venait de s’installer, me coupant dans mon questionnement intérieur d’est-ce qu’il va me tuer si je me redresse légèrement.


« Dooonc... j'attends une explication plausible ou j'te fais enfermer. T'as trois secondes. Un... deux... »
« jecherchemasoeurdepuisplusieursmoisetj’aientenduque… Hum, pardon » Je me racle la gorge avant de reprendre ce que j’avais entamé par reflexe « Je suis à la recherche de ma soeur depuis bientôt un an, et j’ai entendu dire qu’il y avait des pirates par ici. Comme ça serait tout à faire son genre de se faire kidnapper ou je ne sais quoi, j’suis venu vérifier. C’tout. »

Hésitant au début, je finis par me redresser, les jambes en dehors du lit et la tête faisant des allées retours entre ses yeux et son torse - la gêne n’est pas une notion connu chez moi - avant de continuer, une touche de dépit dans ma voix.

« Et apparement elle est pas ici... »

Je me mord la lèvre inférieur, laissant mon regard tomber au sol, avant de me relever d’un coup, lui faisant face à quelques centimètres. La différence de taille est flagrante et je râle dans mon fort intérieur, pestant contre ma petitesse qui me fait complexer. Mes bras se croisent sur mon torse instinctivement, preuve involontaire de volonté de défense, même si j’essayais de me persuader que je pourrais me casser quand je voudrais d’ici. Sauf qu’en fait non. On s’en va pas facilement d’un bateau pirate, hein? Surtout quand on se trouve juste un face du capitaine qui n’a pas l’air d’être une tapette. Reflechissant rapidement, je relève les yeux vers les siens en essayant de paraitre le plus innocent possible, ce qui n’est pas très difficile avec ma tête naturelle d’ange.

« Bon, monsieur le capitaine, ayant confirmé que j’me suis planté comme une merde, j’aimerais bien partir, genre la maintenant tout de suite. Sauf que j’imagine que c’est pas possible, hein? Je peux faire quoi pour arranger ça? »

J'exhibe alors un énorme sourire, laissant mon regard courir de haut en bas de son corps ma foi interessant. Ce n’est pas comme si c’est quelque chose d’inhabituel chez moi, de toute manière.

Le capitaine avait profité de ma tirade pour se rhabiller, du moins mettre quelque chose en bas, et je me retrouve à fixer sa nuque - ou plutôt ses omoplate si l’on prend en considération la taille. Je me tais alors, attendant sagement une réaction de sa part, chose qu’il a en se retournant et reculant vers un meuble plus loin.

« Comme tu l'as fait remarquer tout à l'heure, tu es sur un bateau pirate… »

Je hoche la tête, approuvant parfaitement ce que j’avais dis il y a plus ou moins trente secondes, et le regarde sortir une bouteille parmi toutes celles du meuble.

« Tu es dans ma cabine et... t'en veux ? »

J’allais refuser, mais le brun n’attend pas ma réponse pour servir deux verres. Bon, temps pis, je supporte pas super bien l’alcool, mais refuser serait légèrement du suicide étant donné mes conditions actuelles. Les bras croisés, je piétine sur place en attendant de savoir quoi faire, qu’il me dise quelque chose ou quoi que ça soit, et le regarde refermer la vitre, prenant son verre et s’éloignant  de l’autre côté de la pièce. Mon regard le suit jusqu’à un fauteuil qu’il retourne avant de s'asseoir, face à moi, avec une position sous-entendant clairement qui est le dominant dans la pièce.

« Qu'est ce que je racontais déjà ? Oh Gott ! Ce bourbon est une tuerie ! »
« ... »

Je cligne une nouvelle fois des yeux, le laissant à son exaltation d’alcool tandis que je jette un coup d’oeil vers le verre qui m’ait destiné, avant de m’avancer pour le prendre et tremper mes lèvres dans la liqueur. Mmh, il avait raison! Mes yeux s’illuminent rapidement mais mon visage reste figé, essayant d’exprimer le moins d’émotions possible - en tout cas moins que tout à l’heure, si c’est pour finir attaché quelque part - en retournant vers le lit.

« Ah, je sais où on en était. Tu es sur un bateau pirate, mec. Tu viens de t'introduire dans ma cabine et... tu sais ce qu'il se passe quand on s'introduit dans ma cabine ? » En vu du sourire exhibant de longues canines, je déglutis silencieusement avant de répliquer, d’une voix un chouïa trop aiguë à mon goût « Un truc pas cool? »

Son attitude reste sauvage un long moment, me stoppant net dans mes mouvements, les pensées les plus affreuses passant dans mon esprit. Je suis trop jeune pour mourir. Encore.

« Assieds-toi, j'vais t'expliquer. Après on avisera, Monsieur le Capitaine est de bonne humeur. »

J’esquisse une légère grimace mais obtempère et m’assois sur le lit, les coudes sur les genoux en me penchant en avant, mes doigts caressant l’objet dans mes mains. Il boit une dernière gorgée avant de balancer son verre en direction de la table, ce qui me fait sursauter, mais le liquide reste à l'intérieur de l’objet. Magie? Sans doute. Je jette un regard curieux vers le brun, écoutant distraitement ses paroles, et en l'occurrence mon futur sort.

« Si t'avais été une fille, je me serais fait un plaisir de te faire enfiler une robe et on t'aurait fait marcher sur la planche. » Je fronce les sourcils en grimaçant au mot “fille”, vexé qu’on m’y compare.« C'est le genre de trucs qui fait marrer les gars, en plus ils s'ennuient pas mal ces derniers temps. »

Ah ouais, donc quand on parle de pirate on rigole pas. Je garde ça dans un coin de ma tête, histoire de garder les informations pour plus tard, ça peut être utile à l’avenir. Si j’ai encore un avenir. Je recule légèrement le torse en déglutissant, toujours aussi silencieux, attendant la suite qui ne tarde pas à venir.

« Mais vu que t'es un mec… Je pense qu'on va se passer de la robe. La planche, ça te dit toujours ? »

Je laisse une grimace se dessiner sur mon visage, réprimant l’envie furieuse de repartir d’où je venais, c’est-à-dire par la fenêtre; mais celle-ci se trouvant derrière le fauteuil où trône fièrement mon tortionnaire, la probabilité que je m’en aille sans dommages collatéraux avoisine le 0%. Je pose le verre à moitié vide sur la table en le faisant légèrement voler - chacun son tour - avant de m’étirer, dégustant la sensation de mes muscles tirés.

« C’est sympa pour la robe, j’aurais pas aimé la porter. » Je marque une petite pose en exhibant mon sourire innocent, avant de continuer en fermant les yeux. « Wow, me fait pas croire que tu me donnes le choix, hein~ mais ça m’étonnerais que la planche marche sur moi...enfin, vous pouvez toujours tester. »

On dit souvent que sous mes airs angélique se cache un vrai démon, mais en fait non. Pas du tout, étant donné qu’Hadès m’a donné une seconde vie en tant qu’ange, ce qui, je l’avoue, me laisse quelques fois perplexe. Je rouvre les yeux, plantant mon regard océan dans le sien, abordant un sourire indéchiffrable, ce sourire qui m’était si familier et personnel à force de le porter. Un petit détail de ses paroles me titille l’esprit et je penche la tête, posant mon menton sur une de mes mains avec un calme incertain.

« Mmh tu réveillerais les autres à cette heure-ci pour un simple intrus? Oh, j’ai vu une petite blonde sur le pont, peut-être qu’elle est encore réveillée, elle. » Je reprend mon verre pour y reprendre une gorgée avant de continuer. « En tout cas si ça vous amuserait de me voir sur la-dite planche, je préfère pas imaginer ce que vous faites de vos journées.   »

Abordant un sourire provocateur quoiqu’involontaire - une sale manie attrapée ces 2 dernières années - , je pose le verre, quittant la surface du lit en levitant et ramenant mes jambes en tailleur. Cependant je fais attention à ne pas aller trop haut, afin d’éviter de lui donner l’impression de vouloir dominer la pièce alors que je suis en position de faiblesse actuellement, bien que l’avouer m’arracherait la gorge. Sans quitter ma position, je m’approche du fauteuil, me retournant presque soudainement pour finir la tête en bas, à un peu moins d’un mettre de lui, pestant intérieurement sur mes cheveux que je devrais remettre après: l’handicape de mon pouvoir, que d’ailleurs mon colocataire n’a pas avec le sien - maîtrise de la gravité - et que j’envie quelques fois.

« Alors, alors? Tu vois, contre ça, ça sert à rien~ »

Ma voix avait beau paraître enfantine, mon regard n’en est pas moi vicieux et mon sourire provocateur, immobile dans les airs. Profitant de ma position, je jette un rapide coup d’oeil à la bouteille, la fait s’envoler, droite, et l'attrape d’une main pour la brandir sous son nez. « Tiens~ »

J’étais peut-être allé trop loin. Bon, pour être honnête, j’étais sûrement allé trop loin, m’aventurant dans un terrain dangereux qui n’était qu'inconnu pour moi; d’après ce dont je me souviens, jamais je n’avais été prisonnier - ou quoi que ça soit qui s’avoisine à ce statut - par une quelconque personne mal intentionnée, mon beau-père ne comptant pas. Par conséquence, mon expérience en la matière était limité, voir inexistante, d’après ce qu’il s’est passé en moins de quelques fractions de secondes. Ses iris s’étaient mises à briller, comme deux petite lanternes, d’une lueur sauvages, qui me faisait penser aux vampires lorsque leur besoin naturel de sang remonte - mais ce n’était pas ça - et avant que je ne cligne des yeux, méfiant, il s’était jeté sur moi. Le choc contre le sol de la cabine avait vidé mes poumons d’air et une main sur ma gorge m’empêchait d’en reprendre normalement, laissant s’échapper un sifflement aigu. Mes yeux étaient grands ouverts mais mes iris ne voyaient rien, perturbées par le choc, coupant ma vision quelques secondes avant que le visage du brun ne m’apparaisse. Dire qu’il est furieux serait un qualificatif trop peu approprié. Disons que si je fais un mouvement, je suis sure qu’il m’arrache la tête avant que je ne puisse finir le-dit mouvement, même un battement de cil. Histoire d’être sûr, je me refuse de cligner des yeux, quitte à ce que les larmes m’y montent.

« Il y a des limites à la provoc'. J'te conseille de surveiller le ton que t'emploies si tu veux sortir vivant de cette cabine. »

Les battements dans ma poitrine s'accélèrent légèrement, je garde le regard fixé dans le sien, et, je l’avoue, je panique. Cet homme est dangereux. Je déglutis péniblement, à cause de sa main, et hoche légèrement la tête en signe d’approbation. Je n’ai plus qu’à me tenir à carreaux pour le restant du séjour, quelque soit la fin.

« Et pour répondre à ta question: oui, je réveillerais les autres pour un simple intrus. Pourquoi les priver du plaisir de s'amuser alors qu'ils auront tout le temps de dormir la nuit prochaine ? »

Question rhétorique, je continue de me taire, cette fois-ci sans bouger. Je ne lui offrirais pas la satisfaction de me plier en huit, quand même. Je détourne les yeux de son visage, essayant tant bien que mal de respirer, et lui tapote la cuisse en signe d’abandon, pour qu’il me laisse toute de même réspirer.

« Tu serais surpris de savoir ce qu'il se passe sur un navire pirate rempli de créatures magiques... »

Je n’en doute pas une seconde, et cligne simplement des yeux. J’en ai connu des endroits avec que des créatures magique, il suffit juste d’aller sur l’Île, bien que les navires manquaient à mon expérience. Le brun se met à serrer mon col, je suffoque légèrement, recommençant a tapotter sa cuisse, plus fort cette fois ci, pour qu’il me lâche avant de me tuer. L’intensité de ses yeux avaient augmenté quelques secondes avant qu’il ne secoue la tête, comme s’il chassait une mauvaise pensée de sa tête - quoiqu’avec son air absent c’était sûrement ça.

« T'es sur un bateau pirate, oublie pas. »

Il relâche sa prise, je prend une grande bouffée d’air avant de toussoter. Il se relève de mon torse et s’éloigne tandis que je me redresse, massant ma gorge en fixant le brun grimper sur son bureau, empêchant toute fuite, même si je n’avais pas envisagé d’être aussi lâche. Je jette un coup d’oeil circulaire dans la pièce, sentant son regard peser sur moi, provoquant des sueurs froides sur ma nuque.

« Comment tu t'appelles ? »

Je tourne la tête vers le capitaine, clignant des yeux plusieurs fois, et recule pour me caler contre son lit, les bras autour de mes jambes, recroquevillé en le regardant, dominé fixant dominant.

« ...Elliot Sky-meltemson. » hésitant quelques seconde, je finis par rajouter:« Fils d’Hermès. »

Au cas où mon sang divin pourrait être une quelconque sortie de secours. Je me tais quelques secondes, attendant sagement qu’il se présente à son tour, puisqu’il semble être du genre civil - sinon, qui aurait partagé un verre avec quelqu’un qui vient tout juste de l’agresser dans son sommeil? - malgré la lueur sauvage dans son regard. Vampire étant à balayer de la liste des possibilités, je me tourne plus vers un côté animal, voir démon, mais cette option ne m’enchante guère: ayant un côté ange, si jamais il s’en rend compte en prenant part aux rivalités inter-raciale, je suis dans la bouse de vache absolue. Je plonge ma bouche derrière mes genoux, laissant à peine mon visage visible vu la masse de cheveux qui me tombe devant les yeux, et fixe le port par la fenêtre.

« ...Pourquoi vous restez amarrés? C’est pour la nuit, ou…? »

La curiosité avait poussé mon visage hors de mes genoux, le menton posés dessus.

J’aurais été prêt à parier qu’il avait tiquer quand j’avais dis le nom de mon père. Bon en même temps, ça surprend pas mal, vu que les demi-dieux sont assez rares - on passera le fait que j’en connaisse une bonne partie, c’est le metier qui veut ça - et donc en rencontrer un n’est pas donné à tout le monde. Pourtant je crois discerner une ombre amère sur son visage, avant qu’il ne me réponde vaguement « On doit réparer deux trois trucs avant de se remettre en route. » et que je voix vraiment la haine dans son regard. En fait il a peut-être un truc contre les Dieux. Dans ce cas-là, dire que j’en ai le sang ne devait pas être la meilleure idée du siècle. Mais son attitude change à peine une seconde après, et bien qu’il ne puisse pas effacer toutes traces de rage, il avait l’air de s’être calmé. Plus ou moins. Je dessers la prise sur mes jambes et me décontracte légèrement; ils ne pouvaient pas partir tout de suite, même si je le savais déjà, et il y aurait toujours un moyen pour moi de m’échapper. Toujours.

« Capitaine Hänsel Grimm-Atlantís. »

Hänsel. Un prénom facile à retenir - peu commun mais, étant donné qu’il vient d’un conte que ma mère adoptive m’avait lu quand j’étais gamin, je pense m’en rappeler - que je note dans ma mémoire. Quand je retournerais dans mon bureau, je devrais penser à écrire toutes les infos sur le Navire et l’équipage dans un dossier, histoire que mon escapade nocturne serve à mon boulot au lieu de me faire juste à moitié kidnapper, par ma faute, au bord du meurtre. Le brun finit par reposer son regard sur moi, me forçant indirectement à faire de même, et j’évite soigneusement de fixer sous ses clavicules: J’ai déjà vu pire question homme-flippant-et-barraqués, mais j’ai vu moins aussi. Beaucoup moins. Faisant impasse de son moment étrange, il reprend son statut de supérieur qui m’horripile quand même.

« Bâtard de Poséidon. Loup-garou avant tout. »

Je sursaute en entendant le nom de mon grand-oncle - chez les Dieux, les liens de parentés c’est n’importe quoi - et le fixe plus intensément. Les enfants des trois Grands Dieux étaient encore plus rares que les autres, vu que lesdits Dieux sortent encore moins de chez eux. Cependant j’en connaissais certains - enfin surtout de nom, très peu personnellement - et à présent un de plus. Le fait que ce soit moi ne change pas grand chose, il y en a quand même.
Si la première partie de la phrase renfermait ce qui semblait être la rage de tout à l’heure - s’il n’aimait pas son père, cela explique tout - , la seconde étaient tout bonnement de la fierté pure. Loup-garou. Ils étaient assez présents sur l’Île, j’en comptais quelques uns - le mec collé à Logan, par exemple - parmis mes proches, et à part le sourire joyaux qui manque franchement à Hänsel, ils se ressemblent quelque part. La tignasse brune, sans doute. En tout cas, il était loin d’avoir la carrure et l’aura du capitaine.

« Oui, c'est cliché qu'un fils du roi de la mer puisse diriger un bateau pirate... mais figure-toi que c'est du hasard total. »

Je hoche doucement la tête, distrait et à moitié plongé dans mes pensées. Les préjugés étaient quelque chose dont je me fiche totalement, puisqu’ils sont en général faussés; mon aversion pour la gente féminine, à quelques exceptions près, n’a strictement rien à voir avec. C’était juste quelque chose dont je m’étais aperçu pendant ma première année au lycée, à Washington. Fille rime particulièrement bien avec hypocrisie, jalousie et pleins d’autre adjectifs péjoratifs en “ie”. Je secoue la tête et me redresse, m’asseyant sur le lit de la même manière que je l’avais faite quelques minutes plus tôt. Le regard de Hänsel a quelque chose de pesant, voir dérangeant, et je passe ma main dans mes cheveux pour me redonner un peu de contenance.

« Qui aurait pu croire qu'on avait un lien de parenté, toi et moi ? »

“Parenté” était un bien grand mot, autant au sens propre qu’au figuré, mais n’avait pas vraiment le sens de lien sanguins pour moi. Et puis, la famille et la consanguinité… Je pense être dans ce cas-là. L’image d’un blond me passe dans l’esprit, mais je la chasse rapidement avant de partir sur autre chose, et me gratte la tempe du bout des doigts.

« Pas moi. » C’était une question réthorique mais je n’avais pas résisté. « De toute façon chez les Dieux, la famille c’est le bordel. »

Le fait de savoir son nom m’avait détendu, de même que le lien familial. En parlant de famille, je me demande si il sait en avoir une immense, et qu’une majeur partie se trouve ici. Tout savoir était mon travail, vendre des informations aussi. En me rappelant ce détail, j’entrevois une porte de sortie dans cette cabine fermée avec pour seule compagnie un loup-garou considérablement dangereux, et mal réveillé.

« T’sais qu’il y a d’autres fils de Poséidon? J’en connais quelques uns sur l’Île. »

Je croise les jambes l’une sur l’autre en réfléchissant à ce que j’allais dire. De tout les fils de Poseidon, il était le premier qui je rencontrais vraiment, mais j’avais entendu parlé de deux autres fils sur l’Île, ce qui portait le nombre de bâtards du Dieu des Mers à trois - il fallait bien l’avouer, ce mot était idéal pour notre situation.

« Mmh, en fait on pourrait très bien négocier ma “liberté”. Tu cherches quelque chose? Quelqu’un? Je bosse en tant qu’informateur sur l’Île. Autant dire que je sais plus de choses que tout le monde. »

Je ne souriais pas vraiment, il ne s’agissait pas de faire du charme, mais plutôt de sauver ma peau, dans l’instant présent. Ma qualité d’informateur m’avait toujours sauvé du pétrain dans lequel je me met tout le temps, puisque les êtres vivants sont tous avides du savoir. Pour moi, c’était plus un travail qu’autre chose. Tout savoir peut être horrible, des fois, et ça file des migraines épouventables.