(niji&emma) ❥ « I just want you to know who I am. »

    La symphonie du printemps, sollicitée par le doux chant des oiseaux, tintait joyeusement à travers les fenêtres. Porteuse de bonnes nouvelles, cette mélodie égayait les paysages, réveillant la nature qui chassait les dernières traces de l'hiver comme le jour chassait la nuit. Les rayons du soleil se faisaient plus chauds, venaient chatouiller les visages de tous ces enfants blottis dans les bras de Morphée. La Nature ouvrait les paupières comme un Ange déploierait ses ailes, jetant un œil doré sur les plaines luxuriantes de Sanctuary of Heart. Les arbres revêtissaient leurs parures émeraude, les fleurs osaient montrer leur beauté au monde; l'apaisante mélodie continua de tinter contre les fenêtres et au-delà, annonçant le réveil de cette nature dans éclat de rire, comme une âme en fête. Les demoiselles Hottenberg en ce jour bienheureux préparaient un événement particulier à leurs yeux qui, chaque année, les rapprochaient un peu plus l'une de l'autre.

« Tu devrais te reposer mon ange, tu as assez travaillé aujourd'hui. »

    La mère était comme ce rayon de lumière qui se faufilait à travers les prunelles dorées du Soleil, illuminant à lui seul la face froide et inexpressive de la Lune personnifiée par la fille. Les quatre longues heures passées ensemble ne semblaient avoir fatigué aucune des deux célestes présences, mais Madame prenait soin de son enfant, à l'image de l'astre doré qui recouvrait son cadet de sa chatoyante lumière semblable à de la poussière dorée. Ses doigts glissèrent le long de la chevelure chocolat, se faufilèrent dans le tissu de dentelle fine pour terminer d'y apporter leur touche personnelle. Emma la laissa faire comme la belle poupée de porcelaine qu'elle était, se contentant de se taire et d'obéir à sa douce mère. Ses iris azurés croisèrent celles de la couturière qui s'arrêta dans ses mouvements fluides s'apparentant à une douce brise qui s'éteignait, et le mécontentement se lut alors dans son regard océan.

« Je suis pas fatiguée, on peut continuer. »
« Allons ne dis pas de bêtises Serah, tes yeux brillent. J'ai demandé à Donna de te faire couler un bain, dépêche toi ou il va refroidir. »

    Ses lèvres se plissèrent dans une moue boudeuse qui fit sourire la créatrice, laquelle préféra lui ôter elle-même la robe qui glissa le long de son corps pour tomber au sol, arrachant une plainte à sa fille. Contrainte de céder face à la demande de sa mère, Emma descendit de la marche sur laquelle elle était perchée et alla l'embrasser pour lui assurer qu'elle serait de retour un peu plus tard. Elle avança dans les couloirs de la magnifique demeure, beaucoup trop grande pour trois personnes. La gouvernante qui était sa nourrice s'occupait des tâches ménagères, comme chaque fois que la Fée se retirait dans l'atelier pour y passer des heures avec sa mère, mais Emma ne lui prêta pas attention lorsqu'elle trouva ce qu'elle cherchait depuis qu'elle avait quitté la pièce blanche dans laquelle elle avait laissé sa génitrice.

    Ôtant ses vêtements, Emma se glissa dans la baignoire remplie au préalable, propageant les ondes autour d'elle. Le contact de l'eau brûlante sur sa peau blanche l'apaisa, et ses membres se détendirent peu à peu tandis que les rayons du soleil venaient embrasser chaque parcelle de son doux visage à travers l'unique fenêtre de la salle de bain, faisant danser le reflet d'un arc-en-ciel sur ce tableau empreint de pureté. La pièce, d'une blancheur immaculée, débordait d'une odeur de parfum et de savon, capturée par l'humide buée qui couvrait les vitres et miroirs, s'échappant de la chaleur de la baignoire et allant se coller aux murs. La Fée ferma les paupières et se laissa bercer par les ondulations de l'eau qui se faisaient plus larges, la mousse augmentant de volume pour l'envelopper dans un nuage parfumé dans lequel elle se laissa doucement tomber.

    Emma était une rêveuse qui ne trouvait jamais le temps de le faire. Aujourd'hui elle fit une exception et se laissa emporter dans une rivière d'où s'écoulaient, telles des larmes, une succession de songes, vestiges d'une époque oubliée. Depuis quand était-elle devenue cette poupée insensible et arrogante, qui reprochait au monde les défauts qu'elle-même possédait ? Cette question trotta dans sa tête, interrompant ses songes tel un poids de plomb enlacé autour de ses graciles chevilles la ramenant à la réalité qui manipulait les humains. Ses yeux s'agrandirent de stupeur lorsqu'elle se réveilla, lui retirant toute envie de se reposer. Quittant l'eau après s'être rincée, Emma attacha une serviette autour de son buste parfaitement dessiné et sécha rapidement ses cheveux chocolat qui retombèrent lâchement le long de ses épaules en formant les grosses boucles qui la faisaient ressembler à sa mère.

    Ses pas tracèrent le chemin le plus court vers sa chambre, en traversant doucement le couloir avec une nonchalance qui ne lui ressemblait pas. Par la fenêtre entrouverte, l'air entrant, gonflait comme une voile les rideaux de mousseline pâle. Ses souvenirs se jouaient d'elle; Emma ne se rappela pas l'avoir fait mais n'y prêta pas plus d'attention, pour finalement mettre cette idée folle sur le compte de Donna. La coquette demoiselle s'avança vers sa maquilleuse, observant son reflet dans la glace. Sur l'instant, Emma n'osa pas se reconnaître dans cette jeune femme qu'elle voyait en face d'elle. Ses pupilles céruléennes croisèrent celles de son reflet, mais la vie semblait les avoir désertées. Ses yeux s'agrandirent de surprise, tandis que le souffle chaud du vent printanier vint s'emmêler dans ses cheveux, soulevant avec délicatesse les mèches qui retombèrent presque aussitôt. La fenêtre se ferma avec brutalité, noyant ses craintes dans un claquement assourdissant qui accéléra les battements de son cœur.

« Du calme, c'est moi ! »
« Zooey... je finirais par te tuer un de ces jours... »

    Le renardeau sautilla jusqu'à sa liée et alla se lover contre ses longues jambes. Emma se pencha avec grâce et caressa le petit animal qui eut presque ce qui ressemblait à des ronronnements. Ses doigts de pianiste s'emparèrent du petit animal, qu'elle serra contre elle comme pour se persuader qu'elle était là, bel et bien vivante. L'image de cette poupée pâle, carapace vide de toute vite lui avait fait peur, et son teint cadavérique reprit bientôt des couleurs tandis que la présence apaisante de son Affilié la réchauffait de l'intérieur. Elle relâcha Zooey pour la laisser sautiller jusqu'à son écrin de velours et ses pas la menèrent à son armoire. Au moment de l'ouvrir, la voix de Donna s'éleva du bout du couloir, appelant des « Mademoiselle Serah ! » à tout va, arrachant un soupir exaspéré à la princesse de la maison. Au moment où elle ouvrait la bouche pour faire retentir sa voix cristalline, une main sortit de l'armoire et se plaqua sur ses lèvres, l'empêchant ainsi de hurler son mécontentement.

I just want you to know who I am

« Me faire ma fête... ? Mais t'es complètement malade ! »

    Les pensées se bousculèrent dans la tête d'Emma tandis que son "ravisseur" sortait de l'immense armoire. Elle resta un moment au milieu de ses vêtements, vêtue de sa serviette et incapable de faire la mise au point dans sa tête. Emma avait pris l'habitude de tout contrôler, car elle envisageait toujours toutes les situations possibles et imaginables... sauf que pour une fois, elle était contrainte et forcée de se rendre à l'évidence : personne ne se prépare à ce genre d'imprévus. Sans aucune gêne, l'inconnu s'affala négligemment sur le lit, faisant plier les ressorts du matelas. La pièce, en grande partie crème et rose pâle, donna une teinte éclatante au teint porcelaine de la Fée lorsqu'elle sortit à son tour de son armoire. Sans quitter l'intrus du regard, elle se demanda s'il fallait appeler à l'aide, ou si un cri ne ferait qu'aggraver la situation. Dans le doute, Emma préféra se taire, et fixa d'un air contrarié cet homme allongé dans son lit. Le fait de ne porter qu'une serviette ne la dérangeait pas le moins du monde, et elle aurait pu rester des heures ainsi si cela ne tenait qu'à ça. Mais en plus d'être impatiente, Emma détestait qu'on se moque d'elle à son insu. Elle arqua d'un sourcil lorsqu'il se redressa sur le flanc, face à elle dans une position des plus dérangeantes dans le sens où elle signifiait qu'il prenait ses aises. Elle passa outre le "belle demoiselle" qui ne lui fit ni chaud ni froid et arqua les sourcils.

« Comment tu dis ? Haine ? C'est pas un prénom ça. »

    D'une certaine manière, Emma était parvenue à deviner qu'il ne venait pas de lui dévoiler son identité. Ça aurait été trop facile sinon, il lui aurait suffi de le communiquer aux autorités et il aurait été enfermé pour violation de domicile. Sauf que la vie n'était pas toujours facile contrairement à ce que pouvait penser Emma. Pour une question de fierté, elle avait décidé de ne pas hurler à l'aide et passer pour une victime... Dans les films – Serah était une grande adepte des comédies romantiques, bien qu'elle n'en donnait pas l'air – elle avait toujours détesté ces nunuches incapables de se débrouiller seules pour s'assurer d'aller bien. Certes, elle était la première à déléguer le gros du travail aux autres, mais lorsqu'il s'agissait d'appeler à l'aide... il en était hors de question. Elle croisa les bras sur sa poitrine et patienta un instant, le temps de recevoir sa réponse puis détourna le regard pour le diriger vers la fenêtre.

« Pourquoi faut-il toujours que ça m'arrive à moi... ? »

    Son bain l'avait quelque peu calmée, raison pour laquelle elle affichait une telle flegme devant la situation tout à fait atypique dans laquelle ils se trouvaient. Elle le regarda longuement, posa les yeux sur son Affilié qui les observait, l'air de rien. Zooey était une diva de la même manière qu'Emma était une princesse, alors la Fée ne comptait pas sur l'animal pour l'aider à s'en sortir. Malgré ce manque de soutien dans de telles situations, les deux liées se soutenaient d'une manière fraternelle, et puisque la Fée n'avait jamais eu la petite sœur à laquelle elle avait aspiré des années durant, Zooey faisait très bien l'affaire. Et puis lorsqu'elle songeait à une vie avec une petite fille en plus, Emma ne pouvait s'empêcher de penser que finalement, être la princesse de la famille lui convenait très bien. Et il était hors de question de céder sa place. Ses doigts de pianiste se décroisèrent, allèrent rejoindre son visage et Emma se pinça l'arrête du nez. Quoiqu'il advienne, elle devait garder son calme et ne pas s'énerver. Ses iris céruléens plongèrent dans ceux de son invité – qui s'était au passage invité tout seul – et en l'espace d'un instant, un souvenir lointain lui revint. Une lueur fugace, un éclat joyeux au fond de deux pupilles émeraude. Deux enfants, des plantes carnivores. Elle cligna des yeux et l'image laissa place à la réalité, dans laquelle cet étrange individu demeurait encore et toujours allongé sur son lit.

« Je te laisse cinq minutes. Si d'ici là tu n'es pas parti, j'appelle les autorités. »

    La jeune fille avait beau savoir se montrer exécrable, ça n'était pas en envoyant les voyeurs – c'était ce qu'elle pensait : cet homme était un voyeur – en prison qu'elle prenait son pied. Non, non... Emma était plus dans le genre garce finie, qui savourait le lent déclin de ceux qui avaient osé ne pas être en accord avec elle. Comploter était son passe-temps préféré, et faire souffrir mentalement était tellement plus divertissant que de tout stopper en un claquement de doigt. Zooey sortit de son panier, guetta avec attention le jeune homme et suivit Emma jusque dans la salle de bain qu'elle venait de quitter. Une pile de vêtements décontractés l'y attendait, et elle s'empressa d'attraper son sèche-cheveux pour vite oublier ce qu'il venait de se passer. Avec un peu de chance, elle était tombée sur quelqu'un capable de raisonner logiquement, et qui prendrait la décision de partir sans se poser de questions supplémentaires. Elle espérait dans l'immédiat que cet épisode de sa vie ne soit plus qu'un souvenir lointain au bout des cinq minutes qu'elle lui avait laissées, mais si Emma était persuadée qu'il s'en irait, Zooey restait sceptique à ce sujet. Néanmoins, elles ne s'éternisèrent pas sur le sujet et le sèche-cheveux eut vite fait de couvrir tous les bruits aux alentours. Emma regarda son reflet dans le miroir, mais son attention dériva vite sur l'instant d'absence qui l'avait prise alors qu'il y avait bien longtemps qu'elle croyait avoir oublié. Et pourtant, c'était ce petit garçon qui lui avait persuadée que le prince charmant existait dans ce bas-monde, et qui continuait de lui faire croire qu'elle ne devait pas perdre espoir.

« Emma ? EMMA ! »
« Quoi ? »
« Ça fait dix fois que j'essaye de t'appeler ! Tes cheveux sont secs. »

    Ses doigts cherchèrent le bouton pour éteindre l'appareil, et elle le déposa négligemment sur le rebord du meuble. La Fée enfila son débardeur vite suivi de son short, et elle s'inspecta avant de remettre en place les boucles qui tombaient sur ses épaules. Une moue peu satisfaite prit place sur son visage avant qu'elle ne décide d'attacher la masse de cheveux fraîchement lavés en une queue de cheval simple mais efficace. Serah resta bien trente secondes à s'inspecter, comme à son habitude, puis s'autorisa un sourire lorsqu'elle fut satisfaite de sa condition. Cet instant de répit lui permit même d'oublier que cinq petites minutes auparavant, un parfait inconnu se trouvait dans sa chambre. Zooey sauta dans ses bras et Emma ouvrit la porte. Lorsqu'elle tomba nez à nez avec un garçon qui, visiblement, avait les yeux rivés à l'intérieur du trou de sa serrure, la Fée ne put réprimer l'acte le plus impulsif de sa vie : lui jeter son Affilié. On ne refait pas Emma, assurément.

Maisons ▬ E. Niji Faräwell & Emma-Serah K. Hottenberg

« I just want you to know who I am. »

Les plaintes successives de N et de Zooey n'alertèrent pas Emma qui, contre toute attente, regardait la scène comme pétrifiée par ce qu'elle venait de faire. Ça n'était pas tous les jours que l'on pouvait voir son Affilié griffer ardemment le visage d'un individu qui n'aurait pas dû se trouver dans votre chambre. Aussi, son manque de réaction résultait également d'une surprise certaine quant au spectacle qui se déroulait devant ses yeux. Finalement, il lui balança Zooey dans les bras, dans lesquels le renardeau alla se nicher non sans une exclamation pleine de colère en prime.

« Mais t'es malade ! Ton chat allait me défigurer ! »
« Il a raison sur un point : t'es complètement folle ! Espèce de garce ! »

En temps normal, un « Merci pour le compliment. » aurait dû franchir les ravissantes lèvres de la Fée. Cependant, elle était encore sous le choc si l'on puis-dire, raison pour laquelle Emma ne dit rien, préférant regarder l'homme assis en tailleur au milieu de la pièce, occupé à frotter sa joue où trois belles griffures trônaient désormais. Zooey se retourna dans les bras de sa liée, et jeta un regard mauvais en direction de l'elfe qui s'en prenait plein la figure, en se faisant réprimander mentalement par le dragon qui lui servait d'Affilié. Mais ça, les demoiselles l'ignoraient.

« Je t'avais dit de t'en aller. »

Ce fut sa seule réaction face à cette scène tout à fait méritée à ses yeux. Emma laissa le renardeau pourpre retomber au sol, et l'observa un moment. Il était vrai que Zooey avait les mêmes tics et habitudes que les chats, sûrement à cause de l'éducation qu'elle avait reçue de la part d'Emma... mais si l'on regardait bien, tous les traits du renard y étaient, si l'on passait outre cette couleur atypique dont elle était affublée. Personne ne savait pourquoi elle était pourpre et non pas rousse, mais ça n'avait pas l'air de la déranger plus que ça, elle qui avait vécu toujours de cette façon. Zooey entreprit une toilette pour « se recoiffer » tandis que la voix de N s'éleva à nouveau dans la pièce. « D'accord, je vais m'en aller. » Emma arqua un sourcil, habitude qu'elle avais prise depuis toujours. Ce qu'elle ne comprenait pas dans ce qu'il venait de dire, c'était la manière dont il avait déclaré forfait ; un peu trop vite à son goût. Le « C'est tout ? » qu'elle aurait aimé rétorquer ne franchit pas ses lèvres délicates, car aussitôt eut-il prononcé ces mots qu'il sortit de sa poche une chaîne ornée d'un médaillon qu'Emma ne connaissait que trop bien. Un frisson lui parcourut le dos tandis qu'elle amorçait un pas en avant, et qu'il plongeait par la fenêtre restée ouverte. La vitesse naturelle d'Emma la propulsa au bord de cette dernière, sur laquelle elle se pencha pour voir ce qui se déroulait dans la rue en bas de chez elle. Rattrapé par un énorme dragon blanc, il se posa délicatement sur le trottoir et leva la tête vers elle, un sourire moqueur sur le visage.

« Espèce de... »

Sans terminer sa phrase, elle appela Zooey avec impatience, qui courut vers elle en attrapant au passage une casquette bicolore, avant de sauter dans les bras de la Fée, qui plongea à son tour par la fenêtre, déployant de magnifiques ailes translucides, d'une couleur rose pâle aux reflets irisés. C'étaient des ailes particulières, qu'elle héritait de sa mère qu'elle-même avait reçues de sa propre mère, et qui se transmettaient de génération en génération aux femmes de cette famille dont elle ne portait pas le nom. Emma enfila ses chaussures pendant le vol et se posa avec délicatesse sur le sol, avant de faire disparaître ses ailes comme elles avaient poussé dans son dos. Pas fou, N resta à une distance raisonnable de la demoiselle, dont le regard céruléen lançait des flammes avec lesquelles il n'était pas bon de jouer. Zooey bondit au sol et se lécha la patte, de la même manière que le faisaient les chats, et sans lever le regard vers le sang-mêlé, lança une remarque qui n'eut pas l'air de plaire à Emma.

« Elle est folle de rage. Tu devrais lui rendre son collier, où elle te rôtira le derrière. »
« Laisse-moi parler, Zooey. »

La renarde leva les yeux au ciel en lâchant un soupir exaspéré, tandis qu'Emma enfilait en vitesse sa casquette. Depuis toujours, la demoiselle développait une certaine allergie au soleil ; rien de bien grave mais elle prenait un grand soin en ce qui concernait la protection de sa peau fragile, particulièrement au niveau du visage. Ses bras et jambes avaient fini par s'y habituer au fil du temps, mais il était vrai que s'exposer trop longtemps aux rayons UVs avait un effet néfaste sur sa pigmentation parfaite. La demoiselle se redressa, adoptant sa cambrure naturellement indécente, et ne put rien faire quant à adoucir son regard d'une noirceur inhabituelle. De toute manière, c'était le cadet de ses soucis.

« Je m'appelle Serah. Ça te vas comme ça ? »

Après tout elle n'avait pas répondu à sa question. Il était peut-être temps de le faire, mais Emma avait dans l'immédiat décidé de tricher de la même manière que lui et ne pas prendre le risque de révéler son véritable prénom. Le marché était équitable dans ce cas-là, et il n'aurait rien à lui reprocher s'il découvrait par on ne savait quel moyen son identité. Elle le fixa un long moment, sans s'empêcher de penser qu'il possédait ce médaillon avec, entre autres, des photos de famille. Dans l'une des faces se trouvait une photo de leur famille réunie au complet*, prise quelques temps avant le divorce de ses parents, qui n'existait pas autre part et qui témoignait du fait qu'ils avaient été, le temps de quelques années, une famille heureuse. Mais ce temps était révolu, et enfermé dans ce collier auquel elle tenait trop pour le laisser entre les mains d'un parfait inconnu. Dans l'autre face, une photographie de sa mère avant qu'elle ne rencontre son père, à l'époque où elle était aussi libre que sa fille, et où ses traits n'étaient marqués par aucun problème découlant de la vie de famille. Pas de stress ni d'anxiété, pas de fatigue ni d'inquiétude. Juste de la liberté. Cette époque avait été l'apogée de sa vie de femme libre aux yeux d'Emma, et ce pourquoi elle travaillait si dur pour lui ressembler. Son poing se serra, et elle dût se faire violence pour réprimer les flammes qui menaçaient d'y apparaître.

« Qu'est ce que tu veux d'autre en échange ? »

Il fallait mettre toutes les cartes sur table et aller a l'essentiel. Il savait de quoi elle parlait, et avais malheureusement touché un point sensible en ce qui concernait ses biens matériels. Pour aucun autre objet au monde Emma ne se serait donné la peine de sauter par la fenêtre, et risquer de se faire mal – quoiqu'elle avait des ailes et savait s'en servir – pour le récupérer. Tout portait à croire que ce n'était que de la chance, mais Emma préféra rester sur ses gardes et ne pas tirer de conclusions hâtives, sans pour autant tomber dans la paranoïa. Mais ce dont elle était certaine, c'était qu'elle serait capable de tout pour récupéré ce qui était à elle, et ce collier en particulier.

* vu qu'Earl est jeune sur la photo, N peut ne pas l'avoir reconnu et donc ne pas se douter que lui et Emma sont frères et sœurs.

Maisons ▬ E. Niji Faräwell & Emma-Serah K. Hottenberg

« I just want you to know who I am. »