I gotta be a freaking monster this time {Shawniël <3}

La douleur transperce ton corps. Rien n’a plus d’importance, tout ce que tu ressens c’est la douleur. Ton cerveau n’est plus capable de réfléchir, plaqué contre ce mur, une sorte de bête humaine collé sur ton torse, plantant ses crocs dans ta chair.
Tu essaies de te débattre, comme tu peux, tu ne sais pas comment, tu n’as pas tellement de force. Tu l’avais senti qu’une chose comme cela arriverait ce soir, tu t’en étais douté, tu avais eu ce pressentiment en tournant au coin de cette ruelle, mais tu n’avais pas eu le temps de réagir. La partie fae en toi savait qu’il était temps de faire quelque chose et tu te souviens de cette époque où tu remontais les terrains et enchaînait les paniers grâce à cette fameuse agilité et vitesse qui t’étaient caractéristiques.
N’y pensant pas une deuxième fois, essayant de faire abstraction de la douleur, tu prends appui et saute hors de l’emprise de la bête. Ses crocs déchirent ta peau alors que le sang se répand et la douleur et plus forte que jamais - cependant, tu es hors de ses griffes. Tu titubes quelques pas pour t’éloigner de ton agresseur, la main sur ta chair douloureuse. En cet instant, la seule chose que ton cerveau arrivait à se dire c’est que tu comprenais enfin tous les articles sur la douleur que les éléphants ressentait lorsque certains braconniers leur arrachait leurs défenses. Mais bientôt, le fil de ta pensée se perd et tu reviens à la réalité, la terrible réalité. Que pouvais-tu faire? “Qui… Que.. Que veux-tu?”

Ce sont les seuls mots que tu arrives à articuler avec les quelques forces que tu arrives à rassembler. Tu étais vraiment en mauvaise posture actuellement, et tu n’avais pas vraiment grandes possibilités de fuite ou de défense dans l’état où tu étais. Dans la pénombre de la ruelle, uniquement éclairée par une lampe à moitié cassée sur une corniche, tu étais piégé. Contre ta main, tu sentais le sang couler, et cela te faisait paniquer. Est-ce ici que tu allais mourir? Est-ce comme ça que tu voulais mourir? Non, non, non, tu ne voulais pas mourir ici. Tes cordes vocales s’activent une nouvelle fois : “QUE VEUX-TU?”, que tu cries. “TU VEUX ME TUER?” Tu respirais la rage, et pourtant tu te vidais de tes forces rien qu’en criant. Faire cela serait peut-être vu comme une forme de provocation pour la bête, mais pour l’instant tu n’en avais que faire. “QUI ES-TU?” Tu tombes sur tes genoux, tu ne peux plus tenir debout. Comment allais-tu sortir de cette galère?

— Donne-moi ce que je désire et tu auras la vie sauve pauvre petite chose ~

T'as peur, Shawn. Dieu que t'as peur. T'as pas eu aussi peur depuis si longtemps.
La peur de mourir? Tu ne l'avais pas. La peur du vide, de la solitude, du tout et du rien? Tu ne l'avais pas. Habtiuellement, tu es vide, mais peut-être reste-t-il un creux d'humanité au fond de ton estomac ; ton estomac qui se tord et ta machoire qui se serre.
T'as du sang partout sur le corps, sur les mains, qui dégouline. T'essaies de tout retenir, maladroitement, comme si tu t'accrochais encore à la vie. T'as les yeux qui tremblent et les iris qui se brisent alors que ta vue se brouille. T'as l'impression que tu peux t'évanouir à tout moment, que c'en est fini de toi.
Mais t'avais pas prévu ça comme ça, toi. T'avais un plan pour ta mort, t'avais des schémas, des notes, des cahiers entiers. Tu peux pas mourir ici et maintenant.
Alors tu sers les poings et tu lèves la tête, dans un mouvement qui te fait frémir.

— Qu'est-ce que tu désires? Dis-moi.

T'as le coeur qui bat alors que tu dis cette phrase, t'as peur, Shawn. T'essaies de te caler contre le mur tant bien que mal sous la poigne de ton agresseur impromptu. T'as une main sur la sienne, dans un espoir de l'empêcher de t'étouffer, et t'as la deuxième là où il a planté ses dents.
T'as pas envie que ça s'finisse là, Shawn, t'as encore plein d'idées pour remplir tes carnets, t'as encore plein de traits à dessiner sur tes bras, t'as encore plein d'alcool à ingurgiter et plein de drogue à tester.
T'as encore l'espoir de t'en sortir. T'as ta matière grise qui tourne, qui s'embrouille, qui semble disparue. Tu fermes les paupières toutes les quelques secondes et tu te demandes si tu vas résister, être assez en vie pour assouvrir les besoins de la bête inconnue qui te faisait face. Alors tu rassembles tes forces, et tu luttes.

— Est-ce que je peux avoir au moins un prénom? Histoire de savoir qui va me tuer.

T'as pas le temps de te poser des questions, de réfléchir à ce que tu dis, à ce que tu fais, à ce que tu réponds.
T'es pas en position de faire ça, Shawn.

Alexiël, tu t’en souviendras. C’est déjà gravé dans ta mémoire. T’oses plus parler, t’oses plus rien dire, parce que t’as peur qu’une parole de travers te condamne. « Je suis personne, me tue pas. » Il te fait peur, c’est un monstre. Il a changé, s’est métamorphosé, et maintenant t’es plus rien face à lui. T’étais déjà rien, alors maintenant… Tu peux rien faire, t’as pas d’armes, pas de force, pas assez de force pour courir et le distancer. T’es bloqué là, avec lui, peut-être pour les derniers instants de ta vie. « Me tue pas, pitié, me tue pas. » T’as les larmes aux yeux, tu veux pleurer mais rien ne sort, comme si tu n’avais déjà plus rien à pleurer. T’es fini, Shawn, tu vas y laisser ta peau, mais pourquoi ici?
Tu fermes les yeux, t’essaies d’oublier la situation mais le sang qui continue de s’échapper du bas de ton estomac.
T’es impuissant, Shawn, c’en est fini de toi.
Tu rouvres les yeux et tu le fixes, toujours spectateur du spectacle de ta mort. « Alexiël… Moi, je m’appelle Shawn. » Tu sais plus ce que tu fais, t’as jamais su ce que tu fais. Est-ce ça accepter la mort? Est-ce que t’en est vraiment arrivé là? « Je… J’pensais pas avoir peur de mourir un jour. Mais… Tu fais peur. J’ai peur de toi. Je sais pas quoi faire. Laisse moi vivre s’il te plaît. »
Et cette fois tu pleures, tu sens le désespoir dans tes tripes, et ça fait bien longtemps que t’as rien senti couler le long de tes joues. T’as peur, Shawn.
« Je ferais ce que tu veux, pitié. »

« Te... te trouver de la chair fraîche ? » Ta propre question se répercute contre les murs de la sombre et étroite ruelle pour te revenir en écho à multiples reprises dans les oreilles. Toute la scène qui se déroulait depuis plusieurs minutes semblait tellement irréelle, tellement improbable. Tu n'aurais jamais cru finir à moitié mourrant en face d'une sorte de bête mi-humaine qui, pour épargner ta vie, te demande de la nourrir. C'était surréaliste. Tant bien que mal, tu te redresses, toi qui est resté courbé jusqu'à maintenant. Ta main n'a pas quitté ta plaie, qui saigne par flots irréguliers. Tu n'as pas toute la nuit devant toi si tu comptes pouvoir soigner ça.
Par tous les dieux, tu n'aurais jamais dû sortir de chez toi cette nuit. Par tous les dieux, il semblerait que le karma n'ai pas fini de te faire payer ton imprudence. Tu te mets à marcher, aussi bien que tu le peux, clopinant quelques peu. Tu t'enfonces dans les ruelles adjacentes, priant pour tomber sur quelqu'un qui accepterait de t'aider, quelqu'un qui pourrait te renseigner, te sauver. Tu pourrais t'enfuir, mais tu as trop peur qu'Alexiël te retrouve dans la minute qui suit. Tu es terrorisé, et toutes les gouttes de sueur qui perlent sur ton visage blanchâtre en témoignent.
Tu croises quelqu'un, tu vois dans la lueur de ses iris qu'il te dévisage, qu'il te demande sans prononcer un mot si quelque chose ne va pas. Bien sûr que quelque chose ne va pas, rien ne va. Je saigne. Je vais mourir. J'ai toujours voulu mourir, mais je n'en ai pas envie ce soir. Il ne continue pourtant sa route et ne regarde pas derrière lui lorsqu'il te croise. Bordel, j'ai besoin d'aide. Une nouvelle personne croise ta route. Celle-ci se précipite vers toi, un regard alerte immédiatement collé sur son visage. « Je peux vous aider, jeune homme ? » « Il y a quelqu'un qui m'a blessé. J'ai besoin d'aide. Il lui faut de... de la chair fraîche. Sinon il va me tuer. »
Tu t'attendais à ce que la personne s'en aille, se mette à courir, mais au lieu de tout cela, elle sortit un couteau de sa poche, et commença a soigneusement découper sa peau. Manquant de déglutir, tu n'arrives même pas à hurler, dans l'incompréhension totale. Lorsque ton interlocuteur retire une partie de ses entrailles et les tend, tu ne sais pas quoi penser. « Régénération. Ca va se refermer. Maintenant, courrez. Allez lui donner. Je reste là et contacte le Castle of Heart en attendant pour qu'ils envoient une ambulance. » Tu hoches la tête simplement, un peu confus. Et quand tu repars en trottant, tu te dis que tu ne pourrais jamais assez remercier ce monsieur.
Il avait comprit, il avait comprit que te sortir d'ici serait inutile tant que la faim de ton assaillant ne s'était pas calmée. Est-ce qu'il était un mage? Il possédait le pouvoir de regénération, pourquoi pas celui de lire brièvement dans les pensées?
Tu te retrouves de nouveau dans la petite ruelle, face à Alexiël. « J'ai... j'ai amené ce que tu voulais. » Penserait-il que tu avais tué pour lui ramener ceci?