Le jardin d'Eden subsiste ♦ (Arwenn ♥)

La Terre. Fille du Ciel et mère des Océans. Lieu de vie de la pire race qui puisse exister ; Les humains. Ils sont imbu d'eux-mêmes, destructeurs et ne respectent rien ni personne. Même pas leur habitat. Ne se rendent-ils pas compte que si la Terre meurt, ils mourront eux aussi ? Que s'ils massacrent les vies marines alors les océans périront ? Un monde sans son eau finira par flétrir et s'assécher, ne laissant plus que désolation et mort. Les humains sont bêtes. Non, même les traiter de bête est une insulte aux animaux. Au moins ces derniers ne tuent que par nécessité, afin de survivre et se nourrir. Tel que le faisait Arwenn à l'heure actuelle. L'immense dragon aux écailles bleues glissait entre les flots, parcourant les grandeurs aquatiques comme s'il était chez lui. Ondulant calmement sous la surface, il avait soigneusement replié ses ailes contre ses flancs pour profiter de sa balade. Un banc de poisson passa à côté de lui et il ouvrit la gueule pour en chopper quelques uns, savourant son repas.

Il était descendu de l'île en cette belle journée pour profiter du silence apaisant des fonds marins. Cette impression de plénitude était l'une des rares choses qui arrivait à calmer son esprit tourmenté de ces derniers jours. Encore trop chamboulé par les sentiments douloureux qui affluaient dans son cœur, il dormait mal, n'arrivait pas à se comporter normalement avec les gens qu'il croisait et était de plus mauvaise humeur que jamais. Mais aujourd'hui, il pouvait tout mettre de côté pendant un instant, le temps de n'être qu'un dragon, un reptile marin voguant dans son milieu naturel. Le temps d'être comme son père autrefois, le gardien de la faune et de la flore des mers. Ses épines dorsales, sillonnant à la surface comme des ailerons de requin, se cachèrent à nouveau sous l'eau lorsqu'il croisa un paquebot solitaire. Monstre marin fait d'acier, il semblait peser entre ciel et mer, Arwenn fronça de ses paupières écailleuses alors qu'il s'enfonçait profondément dans l'eau pour se cacher. De jour, il n'était pas intelligent pour lui de se montrer car, si les hommes le voyaient, il pouvait mettre énormément de monde en péril.

Ce n'est que bien plus tard que ses cornes percèrent la surface alors qu'il sentait les odeurs du sable et de la terre parvenir à ses narines. Le dragon replongea pour prendre de la vitesse et s'élança vers la surface pour s'envoler. Ses ailes battirent puissamment pour s'élever dans le ciel et disparaître dans les nuages, ses écailles bleues se fondant sur la voûte céleste. C'était une petite habitude chez lui, toujours faire une ronde avant d'y aller. Arwenn survola une petite île, apparemment inhabitée, un lieu parfait pour s'y poser et faire sécher ses ailes au soleil. Il fendit vers l'immensité aquatique, passant en rase-motte au dessus de la plus belle plage du petit bout de terre, et battit plusieurs fois des ailes pour se poser dans l'eau. Voler était très loin d'être son point fort, et fort heureusement pour lui, décoller et atterrir dans l'océan était beaucoup plus simple que sur la terre ferme. Son corps mythologique nagea un instant dans l'intention d'atteindre le sable mais il se stoppa net en décelant une présence qu'il n'avait pas remarquée jusque là. Honte sur lui de ne pas avoir été plus sur ses gardes ! Cependant, le spectacle qu'il vit était indescriptible. Une silhouette blanche se détachait délicatement de la mer, comme si sa présence en son sein était naturelle. Le reptile légendaire s'approcha doucement et reprit sa forme humaine pour avancer vers le jeune homme. Il ne l'avait pas tout de suite reconnu, probablement parce que ça faisait un petit moment qu'il ne l'avait pas vu.

Il dégageait toujours cette même prestance, un mélange de calme, de douceur et de mystère. Une personne contre laquelle même Arwenn ne pouvait pas s'énerver. Comme si sa simple présence adoucissait l'atmosphère et purifiait l'eau salée. Passant une main dans ses sombres mèches pour les égoutter, il s'avança sur son flanc, sa chemise blanche ondulant sur les flots silencieux de la plage et découvrant encore les quelques écailles apparentes sur sa peau.

« Endymion. »

Sa voix glissa parmi le clapotis des vagues sur leurs corps, cherchant à sortir son ami de ses pensées. Observer son visage et ses yeux rêveurs était toujours aussi agréable et même si le demi-elfe se permettait de le dévorer des yeux, il n'avait jamais cherché à le toucher. Comme s'il était un fruit défendu. Le fruit du Jardin d'Eden. Et aux yeux d'Arwenn, sa simple présence était un jardin utopique.

« Qu'est-ce que tu fais ici, dans un coin aussi paumé ? »


HRP | Navrée, j'sais jamais quoi dire au début /sbaff/

L'eau fraîche avait depuis longtemps traversé la toile de son pantalon et Arwenn sentait le liquide caresser la peau fine des ses jambes. Si ça ne tenait qu'à lui, il aurait repris sa forme mythologique pour se laisser tremper et profiter du confort du sable mouillé. Les flots ondulants contre ses hanches étaient à la profondeur parfaite pour son immense corps. Mais il lui était normalement interdit de divulguer sa véritable apparence aux autres, parce que leur race est censée être légendaire, sans savoir si le jeune homme l'avait aperçu ou non. Et même si Endymion était lui même un mythologique, chose qu'Arwenn avait ressentit dans sa délicate aura, même s'il le considérait comme un ami, il ne lui avait jamais fait part de son sang, et lui non plus d'ailleurs. Le torse parfaitement sculpté et immaculé de son ami se tourna vers lui alors qu'il lui offrait un sourire beaucoup trop éclatant. L'elfe laissa ses yeux plonger dans les siens pendant un moment avant de tourner discrètement la tête, portant son regard sur l'horizon. Ses yeux auraient pu continuer à l'observer sans se lasser mais son cœur, lui, ne pouvait pas. Ce sont donc ses sentiments pour l'être cher disparut qui l'obligèrent à le quitter du regard, comme si une impression de trahison l'avait prit à se permettre d'observer trop longtemps sa pure silhouette.

Un rare sourire sincère étira légèrement ses lèvres alors que son regard s'adoucissait aux paroles du jeune homme. Alors même lui s'inquiétait pour la santé de la planète, ça touchait énormément Arwenn de savoir que son ami avait les mêmes préoccupations que lui. Et sa propre présence en ces lieux était justement dû à cette raison. Il descendait régulièrement sur Terre pour cette petite balade qu'il venait de faire, autant pour son plaisir que pour s'assurer que rien de grave ne soit en train de se produire. Il n'approchait jamais vraiment les côtes des continents, trop polluées pour son corps sensible, mais peu à peu, il sentait que même les profondeurs marines perdaient de leur pureté. Il croissait régulièrement des déchets humains et s'était souvent retrouvé à aider quelques mammifères  aquatiques à se libérer de filets de pêche à la dérive.

« Et bien... Pour la même raison, je pense. J'étais venu nager et je pensais être seul ici. Les océans n'ont pas changé depuis la semaine dernière, mais avec le temps les hommes finiront par vraiment faire quelque d'irrémédiable... »

Il lâcha un petit soupir et laissa son regard se perdre sur l'éclat des vagues au loin. Le haut soleil faisait miroiter l'eau comme un véritable bijou sertit de pierres précieuses et il sentait sa chaleur sur sa peau rentrer en contraste avec la fraîcheur dans laquelle étaient saisies ses jambes. Arwenn était rarement aussi calme -et aussi ouvert soi-dit en passant. Peut être que le paysage y était pour quelque chose, peut être qu'Endymion y avait aussi un important rôle. Ses yeux bicolores se reportèrent sur lui un instant, détaillant sa peau blanche refléter avec force la lumière de l'astre. C'était la première fois qu'il le voyait aussi peu vêtu -et bons dieux, que c'est mauvais pour son cœur- en plein soleil. A son souvenir, sa peau supportait peu le soleil, il l'avait toujours connu vêtu de noir. Alors que faisait-il là, sur une île perdue et déserte, en plein milieu de l'eau et en plein soleil ?

« Dis moi, tu ne risques rien à rester aussi exposé ? Ce n'serait pas mieux de retourner à l'ombre ? »

Il s'inquiétait sincèrement pour lui, encore quelque chose qui ne lui arrive pas souvent, mais il disait ça aussi pour lui-même, car rester ainsi dans l'eau allait vite ronger ses nerfs. Son sang de dragon rentrait en ébullition au moindre contact aquatique, et il avait du mal à retenir ses pulsions et son envie de se transformer. Ainsi que cacher ses écailles apparaissant délicatement sous sa peau translucide.

L'eau, le soleil, le sable mouillé sous ses pieds, le son des fines vagues glissant sur la plage. Tout en ce lieu l'obligeait à rester calme. La discrète présence d'Endymion ne faisait qu'appuyer ce fait. Mais pourtant. Pourtant, en ces jours tumultueux pour le jeune dragon, l'aura calme et apaisante qu'il dégageait ne l'aidait pas autant qu'autrefois. Il évitait clairement de le regarder directement, ses yeux esquivant adroitement la vue de son corps. Son ton s'était encore plus adouci à ses dires, apparemment lui aussi il était rassuré de voir que d'autres personnes semblaient encore s'intéresser à la santé de leur planète. Cependant ses paroles étaient très loin des pensées d'Arwenn, lui il n'avait jamais fait confiance au Hommes, et encore moins depuis qu'il vagabondait librement parmi les océans. Il ne les aimait pas, et ne les aimera jamais. Cette bande de brutes irresponsables, irrespectueuses et meurtrières. Une petite brise le fit sortir de ses pensées et son regard se posa un instant sur le sourire de son ami. Un sourire beaucoup trop doux, beaucoup trop gentil. Beaucoup trop douloureux pour son cœur. Il fermait ses paupières quand la peau encore fraîche de la main d'Endymion entra en contact avec la sienne, leurs doigts s'entremêlant. Un instant de panique s'insinua en lui, emplissant son esprit alors qu'il n'en montrait rien. Il l'entraîna calmement sur le bord de la plage, prenant apparemment en compte l’inquiétude dont il lui avait fait part quelques instants plus tôt.

Ce qu'il n'avait pas prévu, c'est que sortir de l'eau voulait aussi dire voir encore plus de son corps un peu trop parfait. Ses mèches de nacre, ondulant dans l'air, lui firent exploser un flot de flash-back dans sa tête et la douleur lui empoigna le cœur alors qu'il serrait les dents. Son dos à la peau pâle mais aux muscles si bien dessinés firent remonter un flot d'émotion qu'il essayait d'enfouir depuis si longtemps au fond de lui. Arrête de voir en lui quelqu'un qui n'existe plus Arwenn, arrête de souffrir à la moindre tendresse que l'on te donne. Arrête d'être si sensible. Ses sourcils se froncèrent sévèrement alors qu'il gardait son calme arrogant légendaire. La chaleur du sable sec et baigné de soleil caressa la plante de ses pieds nus alors qu'Endymion l'entraînait sous les arbres côtiers qui bordaient la plage. Leur ombre semblait dessiner deux parties bien distinctes entre ténèbres et soleil, la fraîcheur vint lui saisir le corps tandis que les rayons lumineux n'atteignaient plus sa peau. Leurs mains se séparèrent et il lâcha un très léger soupir, entre soulagement et déception. Depuis quand était-il devenu si faible ? Et, d'ailleurs, aussi focalisé sur l'effet qu'on les gens sur lui ? Un jour, il allait clairement craquer. Passant une main dans ses cheveux déjà presque secs, il remarqua les tremblements de son ami et hésita un instant. La première impression qu'il avait eut quand il avait vraiment appris à le connaître refit surface. Il ressemblait toujours autant à un enfant fragile, trop pur, trop sensible à ce qui l'entoure. Un petit sourire s’immisça sur les lèvres d'Arwenn et il défit les derniers boutons qui tenaient encore sa chemise blanche. La retirant et dévoilant à son tour son fin buste, il s'approcha d'Endymion et la posa sur ses épaules. Malgré ses extrémités encore humides de l'eau de mer, elle couvrit de sa tiédeur sa peau blanche.
Serrant doucement son épaule de ses doigts fins, Arwenn le relâcha et s'éloigna.

« Ça fait longtemps que j'ai perdu espoir. »

Retournant sous les rayons du soleil, il s'assit dans le sable et s'étala de tout son long à la lisière de l'ombre. Après tout, il était venu pour ça, profiter un peu de la chaleur en cette belle journée. Il ferma les yeux, laissant l'astre lécher son visage et son corps. Il aurait préférait faire ça sous sa forme reptilienne, et réchauffer ses écailles de mythologique au sang froid, mais ainsi aussi, c'était pas mal. Ses lèvres s'entrouvrirent un instant, hésitant sur ses paroles.

« Tu ferais mieux de ne pas trop compter sur les humains pour rétablir l'ordre de la Terre. Dans le futur, ça finira que par te blesser. »

Tu es trop gentil Endy, et parfois, la gentillesse fait souffrir.

La chaleur du sable et les rayons solaires avaient vite fait de réchauffer son corps engourdi par les fonds glacials des océans. C'était toujours un véritable plaisir de faire sa petite pause reptilienne après sa promenade. Son esprit vagabonda un long moment alors qu'il observait la lueur rougeâtre au travers de ses paupières fermées, les paroles d'Endymion le laissant en pleine réflexion. Il ne comprenait pas vraiment les gens prêts à se sacrifier comme ça, la vie était bien trop précieuse pour que l'on crache dessus. En soit, ça l'énervait même que son ami dénigre à ce point son existence, mais il était bien trop calme à l'heure actuelle pour se mettre à lui remonter les bretelles. Il venait à peine de le retrouver après tant de mois sans nouvelles mais la disparition du jeune mythologique à ses côtés ne ferait que le détruire d'autant plus, il était déjà bien assez fragilisé ces derniers temps. Si un autre de ses proches venait à se volatiliser, et même, s'il le voyait souffrir à cause des hommes, il ne finirait que part les haïr d'autant plus. Et un dragon déchaîné dans les mers terriennes, ça ne serait pas de très bonne augure pour la race humaine.

« C'est pas en souffrant que tu sauveras qui qu'ce soit. Ta vie est d'autant plus précieuse pour la Terre puisque tu t'inquiètes pour elle. Déjà qu'on est pas beaucoup à s'en préoccuper, des mains en moins pour redresser l'écosystème ne lui serait que plus fatale. »

Le dos de sa main vint se poser sur ses yeux clos et il lâcha un petit soupir. Tout ça, c'était comme cacher la véritable raison derrière des belles paroles sonnants comme s'il lui faisait la morale. C'est plus pour lui que ce serait fatal. Mais ça, il ne l'avouera jamais. Que sa présence lui était bien trop bénéfique et que le calme qu'il arrivait à lui procurer était trop précieux pour qu'il le laisse se sacrifier en vain. La Terre mourrait à petit feu et même s'ils arrivaient à allonger sa durer de vie, elle finira tôt ou tard par sombrer. Il le savait, il savait à quel point les océans souffraient en ce moment même, il était bien plus au courant de leur douleur que n'importe quel autre habitant de la planète. Ses nombreuses balades n'avaient fait que lui briser le cœur devant tant de méchanceté gratuite, lorsqu'il voyait les cicatrices parcourant le corps des immenses mammifères marins, lorsque le crissement douloureux des coraux résonnaient sur ses tympans sensibles au moindre bruit des fonds aquatiques. Il n'était pas prêt à pardonner ceux qui continuait de massacrer sans vergogne la nature. Le son léger du sable crissant sous la démarche d'un crabe lui fit ouvrir un œil alors qu'il voyait sa petite silhouette rouge se fondre à nouveau dans les eaux de la plage. Lui aussi, comme tout les autres, il finira par mourir étouffé dans un sac plastique ou pêché par les humains pour être gâché comme s'il n'avait toujours était qu'un simple déchet. Le présence d'Endymion dans son dos se fit plus forte alors qu'il sentait son regard peser sur lui. Retirant sa main de son visage, il pencha sa tête en arrière en ouvrant les yeux pour l'observer.

« Quoi ? »

Il était assis dans la pénombre, l'ombrage des branches dansant sur sa peau pâle alors qu'il posait un regard inquiet sur le dragon. Ce dernier le vit resserrer sa prise sur sa chemise et il fronça les sourcils, inquiet à son tour. Il se redressa dans le sable et lui fit face en s'asseyant en tailleur. Ses doigts glissèrent dans ses longs cheveux nuit pour les rattacher correctement et il posa un lourd regard sur Endymion.

« Qu'est-ce qu'il s'passe ? Si tu me dis rien, j'risque pas de savoir à quoi tu penses. »

Il se redressa et secoua doucement son pantalon de toile pour en décrocher les grains de sables. S'étirant un instant, il retourna dans l'ombre et tendit une main à son ami pour l'aider à se redresser. Détournant la tête avec un air renfrogné, il soupira et lâcha un petit sourire tout de même.

« Je sais pas ce que tu veux faire, mais je peux t'accompagner ou t'aider si tu veux. »

Endymion lui prit délicatement la main, comme il le faisait toujours, avec toute cette douceur qui lui était sienne. Arwenn s'y était peu à peu habitué avec le temps et il l'aida à se redresser, le retrouvant à sa hauteur, ses yeux rencontrèrent les siens un instant, le temps de voir cette petite lueur de tristesse qui brillait au fond de ses iris incolores. Il sentit le tissu de sa chemise se reposer dans sa main, celle qu'il lui avait précédemment tendue, ses lèvres s’entrouvrir dans l'intention de lui dire qu'il pouvait la garder le temps qu'ils rentrent tout deux sur l'île céleste. Qu'il n'avait pas besoin de ça en restant sous les rayons solaires. Il s'apprêtait à lui dire, oui, quand les fines mèches blanches chatouillèrent sa joue et que son menton frôla le haut de son épaule nue. Un instant d'incompréhension embruma son esprit, un très court instant, avant que la panique ne prenne sa place. Le peau pâle d'Endymion entra en contact avec la sienne, aussi douce que la soie, ses bras se refermèrent autour de lui et le tétanisèrent.

« Merci beaucoup pour ta chemise. Notre tendre océan se fait dépouiller par un bateau de pêche. Je dois sauver ses habitants Arwenn ... M'aider ? Je t'en prie ne prends pas de tels risques. Je ne veux pas te voir blessé ... »

Arwenn ne sut pas quoi répondre, bloqué par cette étreinte soudaine. Une peur viscérale lui empoigna le corps pendant quelques infimes secondes, cette peur d'être coincé dans une situation, d'être enchaîné, menotté. Elle ne dura qu'un instant, bien trop court pour que cela ait un quelconque impact mais il ne savait toujours pas comment réagir à la situation. C'était la première fois que son ami agissait ainsi, ça avait de quoi le désarçonner. Ses mains se posèrent doucement dans son dos, glissant du bout des doigts sur sa peau. Un geste simple et prude comme il pourrait le faire avec n'importe qui, une simple accolade entre amis mais pourtant. Pourtant son dos lui parut si large sur le moment que le fier dragon se sentit perdre le dessus. Une sensation qui lui rappela une certaine personne, désagréable mais si nostalgique et tentatrice. Une pulsation qu'il avait perdu depuis si longtemps.

Mais Endymion se sépara de lui, lui servant un pâle sourire. Un sourire qui mit du temps à monter jusqu'au cerveau d'un Arwenn encore perturbé. Quelle était la signification de tout ceci ? Quelles étaient ses paroles quelques minutes plus tôt ? Qu'avait-il dit déjà ? Alors qu'il essayait de comprendre ce qu'il se passait, son ami s'était déjà éloigné sur la plage, s'enfonçant dans les eaux. Il le vit disparaître sous la surface et une aura mythologique éclata devant lui. Avant même qu'il ne l'aperçoive, avant même qu'il ne le voit de ses propres yeux, la joie s'empara de son esprit. Un Mythologique aquatique ! Un immense sourire éclaira son visage alors qu'il percevait la grande silhouette blanche et étincelante du cheval des mers jaillir hors de l'eau et se propulser au loin. « Je ne veux pas te voir blessé ... » Sa joie fut vite effacée, soufflée par ses paroles alors qu'elle percutaient enfin dans son cerveau. Cette fois-ci, ce fut au tour de la colère et de l’inquiétude de s'insinuer en lui. La chemise blanche tomba dans un froissement sur le sable et ses pieds nus s'enfoncèrent dans le sable alors qu'il se jetait en avant. Ses chevilles entrèrent en contact avec l'eau, éclaboussant son pantalon de toile qui avait finalement séché pour rien. Il se démena sur le début des profondeurs et plongea. Hors de question qu'il le laisse se sacrifier comme il l'avait sous-entendu plus tôt. Hors de question qu'il souffre en vain pour sauver une pauvre poignée de poisson. Hors de question qu'il se sacrifie face à la cruauté d'une dizaine de faibles humains !

Un grognement remonta dans sa gorge alors que son corps s'allongeait rapidement, se recouvrant d'écailles bleues. Les deux grandes ailes membraneuses s'écartèrent dans les fonds marins et se rabattirent puissamment, le propulsant en avant. Telle une torpille, il fila à la poursuite d'Endymion. Son corps écailleux ondula, ses griffes palmées raclèrent dans l'eau par intermittence régulière pour qu'il garde sa vitesse. Mais son ami avait une marge d'avance énorme, telle qu'il allait arriver bien trop tard pour éviter le pire scénario. Le clapotis des vagues sur la coque d'un navire parvint à ses tympans, suivit des cris de joie, déformés par son immersion. Au loin, de son regard affiné, il remarqua la silhouette du bateau et le corps à moitié immergé de l'Hippocampi, saisi dans les filets meurtriers des pêcheurs. La rage inonda son corps, le remous causé par le nouveau déploiement de ses ailes fit voler le sable des profondeurs, danser les algues fatiguées par le passage du navire et fuir les quelques poissons qui étaient encore présents. Ses crocs brillèrent à la lueur du soleil qui perçait le toit liquide et il se jeta en avant, de toute ses forces, de toute la vitesse qu'il pouvait donner. Le prédateur s'écrasa sur le coque qui tangua comme au milieu d'une tempête. L'euphorie des hommes se transforma en cris d'alerte. Les serres du Dragon entaillèrent le fin métal, ses cornes percèrent la surface alors que son long cou dominait la bâtisse. Son poids accroché sur le côté de la poupe faisait pencher le bateau, les regards posés sur lui se muèrent en terreur tandis que sa gueule s'ouvrait pour dévoiler la puissance de sa mâchoire acérée. Sa longue et fine queue s'enroula à son opposé, en face de lui, balayant plusieurs humains dans l'eau, et son rugissement vibra dans l'air marin. Profond, enragé.

« Qui êtes-vous, mortels, pour oser profaner la propriété de Poséidon ? »

Ses paroles vibrèrent sur ses cordes vocales comme un ronronnement menaçant. La membrane de ses ailes claqua dans les airs alors qu'il les battaient violemment, projetant de l'eau sur les impudents. Ça courrait partout à bord, les cris fusaient alors qu'ils semblaient se donner des ordres les uns les autres en essayant de gérer leur situation désespérée. Un ricanement sadique s'échappa du Dragon qui referma ses crocs sur le faible corps d'un des marins, le lançant par dessus lui pour le jeter à la mer. Il n'y aura pas de morts, probablement quelques membres en moins, mais Arwenn n'était pas un assassin. Cependant les humains n'étaient pas comme lui. Un harpon perça ses écailles et se planta dans son épaule, lui arrachant un hurlement de douleur. La haine brute traversa ses pupilles dépareillées alors qu'il refermait sa mâchoire sur l'objet mortel en espérant le retirer. Ses crochets, profondément encrés dans sa chair et ses muscles, l'en empêchèrent et il rugit à nouveau, secouant la bâtisse. Son corps enroulé autour de la coque se mouva et il tenta de grimper un peu plus, ses griffes s'enfonçant dans le sol du navire. Une autre flèche métallique s'enfonça dans son flanc, ce qui n'eut pour effet que de l'enrager encore plus. Le bateau pencha sous son poids, petit à petit, inexorablement. Puis dans un dernier soupir du bois et de l'acier, il se renversa, déversant son contenu dans les eaux.

Relâchant sa prise, le Dragon ondula douloureusement pour rejoindre l'Hippocampi toujours prisonnier des filets qui s'étaient d'autant plus enroulés autour de lui dans le chavirement du navire. Ses griffes s'accrochèrent dans les mailles alors que ses crocs déchiraient la base de l'attache pour le libérer. Le corps de son ami glissa des cordes de nylon et Arwenn se positionna sous lui pour le soutenir. Il s'éloigna un peu du naufrage en l'emmenant avec lui et s'arrêta quelques dizaines de mètres plus loin. Un grognement mécontent lui échappa alors qu'il tordait le cou pour lui mordre l'échine, bien assez pour lui faire ressentir un pincement douloureux. Sa voix mécontente, épuisée et inquiète filtra dans l'eau.

« Ne refais plus jamais ça ! »

Endymion n'avait pas le caractère d'un combattant, pourquoi se jeter dans la gueule du loup lorsqu'on a aucun moyen de se défendre ? Il leur était pourtant interdit d'agir directement devant les humains, ce que son père lui avait toujours rabâché depuis qu'il était tout petit. Pourquoi se mettre dans un tel danger ?! Sous l'énervement, la douleur des harpons plantés dans son corps s'accentua et il se crispa.

« Qu'est-ce que tu aurais fait si j'étais pas intervenu ?! Qu'est-ce qu'il se serait passé s'ils t'avaient emmené je ne sais où ? Sa voix se brisa sur la fin. Qu'est-ce que j'aurais fait si toi aussi... Tu disparaissais... »

Il se sentait tourner de l’œil, son corps perdit de sa prise dans l'eau, et il se sentit couler lentement. Trop d'émotion d'un coup, son corps meurtri n'aidant en rien. Et qui sait ce que les hommes pouvaient bien être en train de faire en ce moment même. Il voulait s'éloigner encore un peu, mettre de la distance entre eux et ces meurtriers, capable d'appeler des secours et du soutient pour ce qu'ils avaient vu. Il fallait absolument qu'il éloigne Endymion d'ici avant de perdre connaissance...


HRP | ... On sent l'inspiration dans ce RP x'D Pour la fin, tu peux considérer Arwy comme perdant connaissance ou non, tout dépend de comment tu veux prendre la suite :3 ♥