we have each other. ❥ (Stelian)

••• flashback. •
ISRAE & STELIAN

－✦－

Avais-tu déjà eu ce sourire doux pour quelqu'un d'autre depuis cinq ans déjà ? Le rictus franc, paisible, presque rêveur, qui illuminait le visage crispé par l'angoisse, la haine, la peur, toutes ces émotions plus destructrices les unes que les autres et que tu entretenais à ton être macabre dont le sang ne coulait que pour le vice et le pouvoir. Ce monde sombre dans lequel tu étais plongé depuis neuf ans et qui ne t'avait jamais fait sentir plus vivant depuis ta propre naissance ?

Est-ce que tu te rappelles n'avoir ressenti la tendresse que pour d'autres yeux que ceux de ton jumeau, sa progéniture peut-être ? Personne n'avait jamais osé se mettre en travers de ta route depuis ce jour, comme quiconque osait s'en prendre à la chair de ta chair le regrettait aussitôt. Tu avais ce rire joyeux, tonitruant, provoqué par des blagues aussi foireuses que stupides, mais qui avait le plaisir seul d'avoir été prononcées par Thomas.

Qui depuis ton arrivée à Skyworld t'avait vu sourire, sans se poser la moindre question de ta sincérité et des desseins que tu avais en tête en adressant le simple geste de réconfort? Israe. Tu avais posé ta main sur sa joue pâle quand la seule fois depuis votre rencontre tu avais vu des sanglots invisibles dans ses yeux clairs. Tu avais parcouru cette peau laiteuse et avait hésité à la blottir contre ta chemise impeccable, et lui octroyer à elle seule le droit de la froisser avec ton consentement. Tu te rappelles de tout ça. Tu te souviens de son attitude fière, son air de ne pas y toucher mais la clairvoyance sur tout ce qui pouvait entacher la pureté qu'elle inspirait à ton propre esprit malicieux. » Vous êtes ? ” Et tu te rappelles, là encore. Ta réponse purement intéressée qui te provoquait l'ironie aujourd'hui pour ce qu'elle était devenue par la suite à tes yeux.

» Stelian Phoenix. ” Tous les témoins intimes de votre propre relation si jamais elle avait été mise à nue devant le grand public auraient ri devant la condescendance de tes propos de l'époque. Mais tu jouais encore ce jeu que tu orchestrais avec tout le monde, tout individu sur qui tu pouvais avoir la main mise, une emprise totale, et dont Israe n'aurait été qu'une pauvre parmi d'autre. » Enchanté, Mademoiselle Frescobaldi. ” Tu avais su son nom dès lors que tes employés t'avaient averti de l'arrivée de cette grande famille mafieuse dans le paysage de Skyworld. Tu avais du mal à implanter ton pouvoir durablement dans ce monde, malgré toute l'arrogance dans tes paroles et la supériorité que tu t'efforçais de figer à l'ensemble de ton être. » La même chose, s'il vous plait. ” Et tu l'avais suivie dans sa consommation, cette fois-là. Comme pour montrer votre ressemblance évidente que tu devinais déjà, et le gentleman en image que tu étais avais tendu ta carte platinum au serveur, lui précisant que l'addition serait la sienne, qu'importe ce que la jeune héritière aurait pu commander. Tu ne lésinais jamais sur les moyens, déjà à cette époque. » Une splendide jeune fille seule dans un bar, vous n'avez pas peur ? ” Sûrement que non. Elle n'était pas le genre de fille qu'on laisse sans surveillance, même si on ne la voit pas. Elle n'était pas n'importe qui. Mais Stelian non plus. » Puis-je vous accompagner un moment ? ” L'insolence vissée au corps, alors qu'il s'était déjà permis de le faire depuis plusieurs secondes déjà.

© charney

••• flashback. •
ISRAE & STELIAN

Elle avait l'ivresse de la jeunesse qui coulait dans ses veines de noblesse et la fierté à son visage laiteux qui impressionnait n'importe qui la prenait pour une frêle poupée désarticulée. As-tu une fois eu cette envie de la briser, elle aussi ? Ce besoin de la soumettre à ta propre suprématie parce qu'elle n'aurait été qu'une idiote de plus à ton tableau de chasse si seulement une fois tu l'avais souillée entre deux coups de reins trop violent.

Et non, elle n'était pas aussi impure. Jamais tu n'avais osé penser, si ce n'est aux quelques secondes qui ont précédé votre rencontre la considérer comme une jolie femme parmi d'autres, qui aurait perdu son intérêt sitôt qu'elle se donnait à toi. Jamais ça ne l'avait effleuré, pas plus que toi. Les seuls mouvements que vous vous accordiez dans une entente tacite étaient le réconfort presque paternel que tu réservais à ta seule protégée de ce monde décadent dans lequel tu exerçais un pouvoir sans limites si ce n'est celles que tu n'as pas encore brisées.

Ses yeux insolents avaient répondu avec autant de flegme que toi, et dès lors, sans le vouloir réellement elle avait gagné un respect trop dur à percevoir dans ton esprit trop noir. À l'instant présent, tu ne t'en étais pas rendu compte, puisque ni l'un ni l'autre vous n'aviez énoncé clairement vos propres ambitions. Elle s'était contenté, tu t'en souviens, de répondre par la pareille, le même mystère dans l'écho de sa voix et l'insoumise campé le long de son corps de femme.

» Il n'y a pas un seul lieu où je ne sois pas invité, sachez-le. ” Israe ne serait nullement impressionné par tes frasques délirantes où tu t'improvisais macabre héros sous la coupe d'un compositeur malsain, tous ces rôles que tu t'étais inlassablement octroyé puisque personne à part toi n'avait le mérite  nécessaire pour s'imposer dans ta propre existence. Pas même ton frère avec qui tu partageais le même sang, Israe partageait aujourd'hui bien plus, jusqu'à l'intime, tant vous vous ressemblez.» J'aime votre franchise et votre intelligence, mais apprenez à canaliser cette fougue, je ne dévoile pas tous mes secrets dès la première rencontre. ” Tu avais détaillé la moindre parcelle de l'habit dans lequel elle se sculptait, du diadème le plus scintillant aux coutures de la robe sans la moindre imperfection, à l'image du modèle moulé dans des parures dorés.» Je ne me fie pas aux apparences. ” Tout de suite les règles avaient été posées, et les cartes achevées sur la table définissaient l'absence de limites de votre propre déchéance.» Si seulement vous n'aviez pas ce truc en plus, que je ne sais pas encore mais que je vais m'employer à découvrir, je ne vous inviterai pas dans ce lieu trop sombre. ” Et même si elle avait ce nom de Frescobaldi qui avait titillé ta curiosité au premier abord, malgré la beauté juvénile doublée d'une innocence refoulée, elle avait autre chose. Cette chose en plus, que tu n'avais jamais retrouvé chez personne à part ton jumeau, et qui relevait de la fierté chaque fois que tu te toisais dans le miroir avec orgueil. » Je ne vous cacherai pas non plus que votre nom a un intérêt à mes yeux. Mais il y a plus. Bien plus. Et ça n'a rien à votre avec votre physique.” Le regard plus sombre, le sourire insolent, la voix basse et grave comme si le temps des confidences s'était instauré trop rapidement.

© charney

••• flashback. •
ISRAE & STELIAN

Son physique n'avait jamais été un attrait particulier pour toi. Des belles femmes, tu en connaissais par dizaines, centaines peut-être. Peut-être moins qu'elle, peut-être moins classe, sûrement plus lisses et assurément transparentes à côté d'elle.
Son nom n'était qu'un enchaînement de lettrines sur un blason doré. La consonance mélodieuse rajoutait l'enchantement à la prononciation de son identité, mais rien de plus.

À tes yeux, elle n'avait jamais rien eu de plus que les autres. Mais c'était elle et personne d'autre. Elle n'était pas idiote. Elle n'était pas laide. Elle aimait le pouvoir sous toutes ses formes. Elle avait la puissance et la grâce.
Elle avait l'insolence vissée à sa peau de nacre et les pupilles acérées à faire pâlir le plus téméraire de tous.

» Je ne vous mentirai jamais, sachez-le. ” Israe avait compris sûrement l'accord tacite passé entre vous, dès la première rencontre. C'était froid, un duel féroce entre deux âmes qui ne plieraient jamais devant qui que ce soit.» Et non. Aucun de ces hommes ici ne me ressemblent. ” Jamais personne ne leur ressemblerait.

••• flashback. •

Tu ne feras pas d'excuses. Ni à elle, ni à personne. Parce que tu continuais de te convaincre que tu n'y étais pour rien. Que ce n'était pas ta faute si tu étais allongé sur ce lit d'hôpital, que tes yeux clignent avec difficulté alors que les infirmiers et autres personnels du corps médical attendait les premiers signes de réveil. La majesté s'était effondré, mais tu tentais de te persuader encore que tu n'étais pas en position de faiblesse. Les iris fiers rencontrent les tiens encore timides et affaiblis. Tu ne t'en veux pas. L'orgueil parle plus que le palpitant. Tu n'en as rien à faire qu'elle te voit dans cet état - ta voix crie dans ton cerveau comme l'auto-persuasion le demande. Tu ne veux ni de sa pitié, ni de sa compassion. Encore moins la faire pleurer.
Non. Tu sais qu'elle ne pleureras pas. Tu te persuades qu'elle ne pleureras pas. Pas pour toi. Pas pour ton corps inerte sur un sol tâché de sang, pas pour des fils relié à ton corps affaibli pour que tu te battes encore. Elle est plus forte que ça, tu le sais. Et puis personne ne pleure pour toi depuis longtemps.

» Toi ?” Les lèvres peinent à bouger pour tous les médicaments qu'ils t'avaient administré - pour que tu ne souffres pas. Tu souffres déjà.

© charney

••• reflection. •
ISRAE & STELIAN

－✦－

Les mots de douceur avaient quelque chose de piquant - une amertume sous la rosée de rancoeur et l'ivresse de la compassion masquait l'ardeur des reproches; il était le Saint Divin jugé par la Vierge elle-même. Bien sûr qu'elle lui en voulait. Et tous les mots pour clamer que ce n'était pas de sa faute n'auraient servi à rien. Ils savaient tous les deux. C'était pire que tout.

» Je suis impressionnée par ta patience. ”

Les longues minutes qu'il s'était octroyé pour ne pas la regarder - affronter la culpabilité que les iris pouvaient faire naître dans les siens avaient débouché sur une phrase pleine d'ironie et de non-sens. Il aurait voulu la prendre dans ses bras - un peu de tendresse, la rassurer qu'il était toujours là, qu'il ne la lâcherait pas. Et le paradoxe avec le lieu dans lequel ils se retrouvaient présentement aurait fait tomber toutes les barrières.

» Tu as fait quoi pendant tout ce temps-là? ” Raconte-moi les jours que je ne sais pas.» Ils en ont tous profité pour prendre ma couronne tu crois ? ” Est-ce que tu penses que je suis toujours moi? » Peut-être même qu'ils ont déménagé mon bureau, pensant que je m'en sortirai pas. ” Haha. Il se retint d'aller plus loin. Les questions étaient d'une obscénité insolente et il regrettait presque chaque mot dérisoire qu'il venait de prononcer. Il se tut pendant un moment. Et tendit une main ouverte vers elle.

» Tu n'as pas eu le temps de changer. Tu es toujours... toi.”

Toujours aussi belle. Toujours aussi précieuse à ses yeux. Toujours là auprès de lui - même quand il l'avait trahi, de la pire des façons. Il aurait aimé lui dire qu'il n'y était pour rien. Que ce n'était en rien de sa faute. Mais le silence était plus agréable et il savait qu'elle n'était pas idiote.

» Je t'ai manqué ?” Le sourire doux qu'il n'adressait qu'à elle fleurit légèrement sur son visage éreinté par les soins thérapeutiques. Le seul instant qu'il s'accorderait.

© charney

••• reflection. •
ISRAE & STELIAN

Dieu qu'il s'en voulait et qu'il aurait couru se confesser s'il avait une once de foi en lui. Mais il lui avait appris à n'avoir foi en rien d'autre qu'eux-mêmes, alors ce ne serait pas maintenant qu'elle est toute puissante face à lui insignifiant qu'il allait bafouer les principes qui les rendaient si spéciaux aux yeux du monde ; elle était unique à ses yeux à lui - plus lumineuse encore maintenant qu'il sortait de l'obscurité la plus complète.

» Je vais mieux. ”

Si ces trois mots avaient pu esquisser de la rassurer, alors c'était suffisant. Mais il savait. Il savait toutes les questions qu'elle s'était posé en son for intérieur et qu'elle se pose encore.

» Je n'y suis pour rien. ” Crois-moi ce n'est pas moi.» Je ne sais pas ce qu'on t'a raconté. ” Mais je n'y suis pour rien. » Mais je te jure que ce n'est pas moi. ” Il n'avait rien fait. Il ne l'avait même pas vu venir. Alors il s'était contenté de s'effondrer, de chuter, lamentablement. Et Dieu qu'il s'en voulait.

» Je ne sais même pas si je veux savoir qui a fait que je me retrouve ici. ”

Minable. À l'inverse de la stature qu'il s'était imposé depuis des années, il ne ressemblait plus à rien et savait pertinemment qu'elle avait bien plus de prestance que lui n'aurait pu espérer à l'instant présent.

» Toi tu m'as manqué. ” Même si ses paupières restent closes,
même si son coeur bat trop peu, même si son souffle est trop faible. Eux contre le monde entier.

charney