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Le pauvre Oz avait dû se lever aux aurores pour suivre son entrainement quotidien en compagnie de son
adorable cousine. Cette dernière n'était pas ce qu'on appelait une lève-tôt, et faire cet effort de réveil rien que pour apprendre à son cousin l'art du combat était, elle l'avait répété, un
honneur. Oz n'avait donc pas eu le choix et s'était levé avec peu de convictions avant même que le soleil n'ait pointé le bout de son nez, et était sorti de la villa Vessahive en prenant soin de laisser un petit mot à l'intention de son frère, pour ne pas l'inquiéter.
En sortant de sa demeure, il prit tranquillement la route vers le manoir Relyse, dans lequel habitait Alice, sa cousine tyrannique, qui lui avait dit de venir la chercher dès qu'il serait prêt. Comme d'habitude depuis quelques mois, ce fut Edgar, le majordome de la famille Relyse, qui lui ouvrit. Maintenant, cela faisait un certain moment qu'il voyait le petit blond sonner à cette porte, et il n'ignorait pas quel lien reliait les deux blonds aux yeux respectivement vert et bleu. D'ailleurs, Alice lui avait parlé de ses trois colocataires, qu'Oz n'avait jamais rencontrés... même s'il les avais légèrement entrevus. Après qu'Edgar ait ouvert la porte, Alice sa faufila entre les deux et salua joyeusement son majordome, avant d'emmener Oz en direction de la forêt. Depuis quelques mois, elle lui donnait des 'cours' sur le combat, puisqu'elle était non sans dire douée dans ce domaine, comme si c'était une seconde nature. Elle lui avait, un jour, expliqué que cette aisance était due à ses origines demi-divines, et qu'Oz allait certainement l'acquérir également... Bah visiblement, ce n'était pas vraiment le cas. Enfin, il était assez bon, mais pas autant qu'Alice, surtout dans le maniement de l'épée.
Seulement, il avait découvert très récemment un don fort intéressant. En effet, il parvenait à faire apparaitre un trident, avec lequel il se battait plutôt bien. De ce coté, Alice n'avait pas vraiment d'experience mais pour Oz, tout était plus ou moins instinctif. Tous les coups qu'il donnait étaient poussés par un simple instinct, et Alice avait été claire sur ce sujet: c'était
normal. Et il ne saurait jamais contrôler ce don, car tout était purement impulsif, comme le sang chaud bouillant des demi-dieux comme eux. Même si techniquement il était âgé de plusieurs siècles, il gardait une mentalité de gamin de quatorze ans, ainsi que l'apparence, et la vitalité, également. En gros, il avait bel et bien quatorze années.
Pour en revenir à cette fameuse matinée, Alice avait été aussi dure que d'ordinaire. Même si elle n'avait pas usé une seule fois de ses éclairs, elle avait préféré utiliser sa lance pour le martyriser. Évidemment, le fils de Poséidon avait pris de l'aisance au fil du temps passé avec elle et ne se contentait plus d'esquiver, mais contre-attaquait de temps à autres. Ils finirent au bout de plusieurs heures acharnées, après lesquelles il fut aussi essoufflé que les jours précédents. Mais cette fois, il laissa Alice rentrer chez elle, et ne retourna pas à la villa Vessahive, préférant se promener un peu avant de rentrer à la maison.
Cette partie de l'île était tout aussi magnifique que toutes les autres et le soleil tapait tellement fort dans le ciel qu'il sentait les rayons lui brûler la peau même à travers le feuillage, bien qu'extrêmement épais. Heureusement pour lui, il trouva vite une petite source d'eau, dans laquelle il plongea la tête la première, sans se poser de questions. Il avait chaud, et un peu d'eau était la bienvenue, bien entendu. L'eau venait certainement des montagnes, et était donc gelée. Alors qu'il s'en extirpait rapidement, il secoua la tête par pur réflexe, tel un chien sortant de l'eau, et entreprit un séchage rapide tout en remontant le petit fleuve qui coulait devant lui. Jamais une seule fois il ne s'était aventuré dans les montagnes, et profitait de cette petite opportunité pour le faire. Maintenant, il avait pris une certaine aisance au niveau de son contrôle de l'eau, et parvenait à enlever l'eau de ses vêtements tout en marchant, les yeux levés vers le magnifique paysage qui s'offrait à lui. Le bruit de l'eau qui coulait le long de la petite rivière était la seule mélodie qui parvenait aux oreilles du demi-dieu, tel une jolie berceuse douce et agréable, et il atteignit bientôt le pied de la montagne qu'il tentait de rejoindre à l'aveuglette depuis maintenant presque une demi-heure. Caché précédemment par les arbres de la forêt, le ciel était à présent grisâtre et Oz ne serait pas étonné si un orage éclatait en cet instant. Les averses étaient fréquentes en cette période de l'année, et les orages tombaient en veux-tu en vois-là, sans jamais prévenir personne. Le fils du Dieu de la mer entreprit l'ascension de sa montagne, à la recherche d'un abri afin de se réfugier en vue du temps qu'il faisait. Heureusement, les chemins aménagés par les habitants de l'ile adoucissaient un peu plus la pente, et il atteignit bientôt une sorte de grotte, où il s'avança d'un air guilleret, appréhendant la découverte de ce qu'il pourrait bien y avoir au fond. Il vit un éclair de lumière derrière lui, suivi du grondement du tonnerre, ainsi que du bruit de nombreuses gouttes tapant sur les cailloux brûlants.
— J'ai bien fait de ne pas rentrer à la maison, je suis sûr qu'Alice est en train de se prendre toute cette pluie sur la tête ! pensa-t-il a haute voix.
Ou pas, vu à la vitesse à laquelle elle pouvait courir. Car oui, l'avantage d'être la fille du Seigneur du Ciel était bien évidemment de se déplacer à la vitesse de l'éclair, mais être celui du Dieu de la mer était de respirer sous l'eau... la classe totale. Il l'avait remarqué alors qu'il était resté un moment dans l'eau gelée de la mer de nuages, et qu'il avait désiré un moment respirer normalement, en plus d'avoir une vue parfaitement claire sur le spectacle maritime. Depuis, il ne craignait plus rien sur cette planète, pourvu qu'il ait un endroit où il y avait de l'eau.
Il examina rapidement les lieux, et constata sans beaucoup d'étonnement qu'il n'y voyait rien du tout, mais s'enfonça tout de même dans la grotte, mais fut interrompu après une cinquantaine de pas par des voix s'élevant de l'entrée de la grotte, qu'il venait de quitter à l'instant. Deux voix distinctes, et féminines. Lui, était avant d'être un demi-dieu, un garçon qui aimait la compagnie des filles, et légèrement dragueur malgré lui. Il fit demi-tour rapidement et vit, à l'aide du peu de lumière que procurait les éclairs qui passaient de plus en plus fréquemment. Elles devaient avoir le même âge, et étaient toutes les deux étonnamment jolies, comme beaucoup de filles sur cette ile. Toutes celles qu'il avait rencontrées, en fait. Chacune des deux avait une apparence bien spéciale, l'une ayant d'étranges cheveux bleus qui lui allaient parfaitement bien et l'autre possédant deux oreilles de chat -ou d'un autre animal qui y ressemblait- s'accordant magnifiquement bien avec sa chevelure couleur chocolat, qui rappelait au demi-dieu celle d'une jolie fille qu'il avait rencontré lors de son arrivée sur l'ile. Il s'approcha d'elle, passa une main dans sa chevelure dorée et sourit aux demoiselles.
— Bien le bonjour ! les salua-t-elle en se courbant galamment. Charmante journée, n'est-ce-pas ?
Son éternel sourire aux allures fausses sur le visage, il dépassa les deux filles pour observer le temps qu'il faisait, en dehors de la grotte. Effectivement, la pluie était au rendez-vous et tombait en trombes sur le sol... il était clair que personne ne pouvait sortir avec un temps pareil, surtout qu'on ne voyait strictement rien à plus de cinq mètres. Le demi-dieu ne chercha pas à reconnaitre l'Aura des deux jeunes filles, mais la sienne était très peu commune alors soit elles n'auraient aucune idée de la sensation que procurait cette puissance demi-divine, soit elles auraient tout de suite senti les origines du blondinet. En soi, ce n'était pas une information bien importante, et Oz était loin de se vanter du fait que son père était le dieu des océans.
— Je suis Oz Vessalius, enchanté de faire votre connaissance, déclara-t-il en se retournant.
Vraiment, Oz devait passer pour un gamin hypocrite. Peut être était-ce le cas, mais personne ne le saurait jamais... »