Would you be honest with me? (Ketra)

Les pieds de Thalie s'enfonçaient dans le sable à chaque pas fait, ses cheveux blonds volants au gré du vent, ses yeux azurés observant l'horizon et la mer, un magnifique paysage qui en enchanterait plus d'un. Le regard rivé sur cette merveilleuse scène, la demi-déesse s'en allait en marchant en solitaire dans le sable. Nemerya son affiliée était à ses côtés, s'inquiétant de la mélancolie de sa liée. Thalie n'allait pas bien : elle a encore du subir les moqueries de certains qui ne semblaient pas voir d'un bon œil son lien de parenté divin avec Apollon et la jeune sang-mêlée n'avait franchement pas apprécié. Chaque remarque concernant son sang à moitié divin la mettait dans un état de tristesse profond. En effet, jamais Thalie n'avait assumé cette part d'elle, bien que cela comporte beaucoup d'avantages, cela n'apporte pas que du bon, cela apportait un côté négatif à la chose, notamment pour les mauvaises langues et les mauvais yeux.

Se rendant près de la rive, Thalie observait le flux et reflux des vagues, donnant un côté pitoyablement mélancolique. Elle-même se trouvait ridicule qu'à son âge, elle souffre encore des moqueries des gens connaissant son identité. Parfois, elle aimerait disparaître et qu'on ne la remarque plus. Qu'on la laisse en paix. Qu'on ne puisse plus faire une différence entre elle et les autres créatures magiques. Pourquoi quand on est à moitié divin, on ressent cet étrange ressenti d'être rejeté ? Thalie le sait : c'est une erreur de la nature qui n'aurait jamais du voir le jour. La rencontre entre un Dieu et une Elfe n'était pas l'union la plus pure et pourtant, Thalie était certainement un des êtres les plus chaleureux et compatissant qui existe ici. Ayant hérité de son père Apollon ses manières chaleureuses de plaire et d'affectionner ceux qui le méritent, la fleuriste avait tout pour être quelqu'un de bien. Mais à quel prix ?

Attristée, Thalie vint alors se poser sur un rocher de la plage, observant les nuages et les gens rire, chanter, bouger, danser... En cet instant, la demi-déesse ne s'était jamais autant sentie pitoyable. Elle remarque alors une présence féminine déjà présente, avec un peu de gêne, elle s'installe tout de même avant de s'adresser à l'inconnue d'une voix gênée.

« Excusez-moi, cela vous dérange si... je viens m'installer ici un temps ? »

Avant de se poser et prendre Nemerya dans ses bras, une larme coulant sur ses joues, la demi-déese jouait les fortes à ce moment là. Finalement, peut-être que si ses sanglots éclataient, elle gênerait cette inconnue qui en avait sûrement rien à faire d'une demi-déesse en train de pleurer pour ce qu'elle est.

La voix sincère de l'inconnue rassure Thalie qui s'était donc installée avant de prendre contre elle Nemerya dans ses bras. A la manière d'une fillette prenant son ours en peluche dans ses bras pour consoler un cœur qui saigne, qui pleure. Apollon lui même avait-il penser qu'il pourrait briser la vie de sa "fille" ? La considérait-il comme tel ? Ou comme une sombre inconnue qu'il avant engendré lors d'une nuit partagée avec une elfe dans le plus grand des secrets ? Pourtant, l'unique fois où il était apparu à la jeune fille, c'était l'unique fois où il semblait si paternel, si attentionné mais l'échange avait été si bref... Si rapide. Thalie ne l'avait pas vu venir, et elle ne l'avait pas vu se finir. Ses armes étaient rayonnantes grâce aux dons que lui avaient offerts son paternel divin, elle pouvait le remercier pour ça. Mais elle souffrait de ne pas avoir pu le connaître plus. Elle était si jeune, elle était dévouée à vivre une vie monoparentale bien mélancolique. Bien-sûr, Thalie s'occupait de sa mère, jusqu'à son dernier souffle, mais elle ne pourrait jamais connaître la consolation d'un père, l'amour d'un père, la présence d'un père, la protection d'un père. Si un jour, elle se retrouvait en danger, la sauverait-il ? Ou la laisserai-t-il mourir injustement ? Une question demeurant sans réponse...

Après s'être installée, Thalie avait tenté tant bien que mal de retenir cette larme, elle l'essuya rapidement mais l'inconnue qui semblait méditer lui en fit la remarque. Se mordant les lèvres et se maudissant d'être aussi émotive, Thalie tourna son visage vers l'inconnue qui s'adressait à elle. Nemerya semblait interrogée et pencha sa petite tête sur le côté, l'air intéressé.

« Désolée. Ce n'est pas dans mes habitudes de me laisser aller. Pardonnez-moi. Peut-être que vous ne pourriez pas comprendre ce qu'il m'arrive... »

Prenant une grande inspiration, la jeune femme aux longs cheveux blonds levaient son visage vers le haut en soupirant ensuite.

« Vous ait-il déjà arrivé de vous sentir rejetée par ce que vous êtes et ce que vous n'avez pas choisi d'être ? Comme... une erreur de la nature... ? » demande-t-elle aussi maladroitement qui soit. Peut-être qu'elle appuyait un point sensible et elle ne s'en rendait même pas compte. Nemerya s'inquiétait véritablement pour l'état émotionnel de sa liée avant de poser ses pattes dans le sable et s'approche très doucement de l'inconnue, comme si elle voulait en apprendre plus sur elle par curiosité. Nemerya n'était pas une affiliée malveillante, bien au contraire...

« Excusez mon... affiliée. Nemerya est assez curieuse quand elle rencontre de nouvelles personnes. Elle ne vous fera aucun mal, juste peut-être sentir votre odeur ! » s'exclama la demi-déesse avec la gorge nouée de larmes qui lui montaient peu à peu...

Étonnée ? Oui Thalie l'est. Cette dame complètement inconnue à ses yeux semble s'intéresser à sa condition, peut-être qu'elle pense tout simplement à une faible d'esprit comme elle peut paraître parfois ? Pense-t-elle de la demi-déesse qu'elle s'apitoie trop sur son sort ? Peut-être, mais n'avons donc pas le droit de laisser nos âmes décider de comment nous pouvons subir une chose ? Thalie n'a pas choisie de naître d'une union mal perçue, du moins c'est ce qu'elle croit, et encore moins avoir un père absent. Heureusement tout de même que sa mère était présente pour elle, de même que pour Nemerya, qui la comprend mieux que personne sur cette île, cette terre. Thalie sent même me filer entre ses mains Nemerya qui va sentir l'odeur délicate de la jeune femme aux cheveux longs et bruns. Une crinière que la demi-déesse admire beaucoup, puisqu'elle-même, est le parfait opposé avec ses cheveux blonds.

Alors que Thalie posait la question à la demoiselle, celle-ci lui répond une longue réplique qui la révolte plus que tout. Elle avait été sujet d'injures et d'homophobie... Comment des gens peuvent-ils penser ça de nos jours ? Enfin... Parle-t-elle d'ici ou d'ailleurs ? Dans tous les cas, Thalie se rend compte finalement qu'il y a plusieurs façons de vivre le ressenti d' « être une erreur de la nature ». Ceci dit, la jeune fleuriste ne compte pas faire la sourde oreille. Prenant un air attristé et compatissant pour la dame, Thalie lui répondit avec sincérité.

« Je suis tellement désolée de ce qu'il vous ait arrivé. J'imagine que cela n'a pas du être facile mais j'espère qu'aujourd'hui vous allez mieux et que vous avez pu passer au dessus de ce passé douloureux. Je ne peux que compatir à votre douloureuse expérience. »

Thalie avait la réputation d'être une jeune adulte sincère, aimante et chaleureuse, comme son père, elle est rayonnante, une délicatesse et une grande détermination. La demi-déesse avait l'envie de s'en sortir, mais comme elle se sentait perdue, elle avait la désagréable impression de se retrouver au beau milieu d'un grand labyrinthe lié à son esprit dont elle n'arrive pas à trouver la sortie ni à avancer.

« Je n'aurai peut-être pas du vous faire ressortir ces mauvais souvenirs dans votre esprit. Pardonnez mon manque de tact ! » s'exclame-t-elle en étant véritablement gênée. Parfois, Thalie peut vraiment être maladroite dans ses paroles, peut-être était-ce ce détail qui fait son charme ?

Bon dieu que cela faisait du bien à Thalie que pour une fois dans sa vie, parler à une inconnue n'était pas sujet de moqueries. Quand elle y pense, elle pense évidemment à son idiote de voisine qui s'amuse à se ficher d'elle les matins où elle sort. A croire que les elfes de Chloris ne sont pas tolérants ? Car oui, elle est une demi-déesse mais elle possède aussi une part d'elle elfique, ses oreilles longues en témoignant. C'est pourquoi Thalie s'est toujours vue étant une erreur, l'enfant qui n'aurait jamais du naître. Jamais elle n'a pu accepter ce passé, ses origines, qui pourrait voir du positif en étant l'enfant d'un dieu ? Pas grande monde. Le pouvoir ? Personne n'est au dessus des dieux et la jeune femme n'est certainement pas au dessus des autres au niveau de la puissance. Elle a eu accès certes, à une magie venant de son père, mais ça s'arrête là. Son arc et ses lames rayonnants en sont la preuve. D'ailleurs, cela fait un moment que la jolie blonde ne s'était pas entraînée à l'arc.

Écoutant le discours de la jeune inconnue, Thalie était très attentive, en gage de respect. Cette belle inconnue respectait les sentiments dérangés de la demi-déesse et l'écoutait sans rien dire, alors autant instaurer une discussion sous le signe de la confiance, du non-jugement et du respect. D'autant que la vie d'avant de cette jeune femme semblait attristé Thalie qui s'était sentie réellement désolée pour tout ce qu'elle avait vécu, même si la brune lui assurait que cela remontait à un long moment.

« Je suis heureuse de savoir ça alors. Que vous avez réussi à passer au dessus. J'imagine que cela n'a pas du être facile. En tout cas, moi, je vous admire pour votre courage. Mais peut-être qu'aussi, mes problèmes ne sont pas aussi vieux que les vôtres. »

Une main compatissante vint se poser sur l'épaule de la fleuriste qui fut vraiment surprise de ce geste. Ne s'attendant pas à autant de compassion venant d'une belle inconnue. Les paroles délicates et rassurantes de la jeune femme semblait toucher réellement Thalie qui ne savait plus vraiment quoi dire. Elle était sans voix. Elle admirait tant cette lueur d'espoir dans les yeux de la femme aux cheveux bruns, elle avait tant vécu et aujourd'hui, elle semblait être plus que jamais épanouie. C'est tant mieux pour elle.

« Merci... pour vos paroles. Elles me touchent vraiment. Pour vous dire la vérité, puisque vous m'avez conté votre passé, je vais vous raconter le mien. Thalie marqua une pause avant de se tourner vers la brune. Je suis... une demi-déesse. Mon père est le Dieu Apollon lui-même. Je suis née de l'union d'un soir entre lui et ma mère, une elfe de Chloris. Et... Je pense que vous pouvez vite comprendre que beaucoup de personnes puissent mal me voir. Et moi-même, que puis-je penser de moi-même... ? Il m'a été donné de voir mon père qu'une seule fois, c'était l'unique fois où j'ai pu sentir sa chaleur et sa prestance... Vous comprenez ? J'ai grandis sans père, un père qui est en plus, un Dieu ! » finit par dire Thalie, prenant un air presque choqué d'elle-même. Sa voix était tremblante et sa gorge se serrait petit à petit. Mais non. Il ne faut pas pleurer. Pas encore... Plus maintenant.

La demi-déesse savait très bien que ce n'était pas toujours évident de vivre avec ses origines, elle-même avait eu une sombre période de mal-être à cause de ça et surtout, elle souffrait de ne pas avoir une figure paternelle auprès d'elle, chaque jour qui passait, pour la consoler et la conseiller. Son père ? Un dieu qui s'en fou d'elle. Comment vivre en sachant cela ? Mais les paroles de la belle femme la rassurait sur un point : on s'y fait. Mais dans combien de temps ? La dame semble avoir un certain âge bien qu'elle ne le paraît pas physiquement, alors comment Thalie, jeune fille de vingt six ans fait pour attendre ce jour ? La fleuriste de Chloris écoute avec attention et respect le discours de l'immortelle qui semble être pleine de sagesse et donc, beaucoup de conseils à prendre. Thalie pourrait l'écouter pendant des heures, pour en apprendre plus et savoir ressembler à cette sage.

« Vous êtes pleine de sagesse, je vous admire. Puis-je vous demander votre nom... ? Rassurez-vous, rien de malveillant, bien au contraire. Vous êtes une femme que j'admire et respecte, vous êtes une des rares personnes à ne pas me juger, j'ai beaucoup d'estime pour vous. »

La Lys souriait sincèrement, son visage était certes humide à cause de ses larmes, ses yeux rouges à cause des pleurs mais son sourire était illuminé. Les paroles d'une sage lui faisait beaucoup de bien. En l'écoutant, Thalie se rendait compte qu'elle avait beaucoup à apprendre. Lorsque finalement l'inconnue comprend le sens de mes paroles, Nemerya revint immédiatement auprès de la fleuriste afin de se blottir dans ses bras pour la rassurer, pas de mots, juste des actions, des contacts physiques. Cela suffisait à la jeune elfe pour se sentir aimée.

« Je n'ai certainement qu'une infime partie divine en moi. Il m'a été donné de rencontrer seulement une seule fois, mon père, Apollon lui-même. Il m'a offert tout simplement ceci... » Thalie fit descendre Nemerya de ses genoux avant d'écarter ses mains, se concentrer et faire apparaître dans un large halo de lumière jaillissant de ses mains un magnifique arc blanc et doré avec le carquois l'accompagnant. « Ceci est l'héritage de mon père. » Lorsque l'arc était apparu dans les mains de la demi-déesse, cette dernière malgré tout, aimant sentir la chaleur de la lumière qui émanait de ses mains, son pouvoir tiré directement de la lumière solaire, lui correspondait bien.

« C'est un cadeau magnifique pour son enfant me direz-vous. Mais en échange, vous ne le reverrez plus jamais... » finit-elle par dire.