| Firefighter, not babysitter — KaOrion | Jeu 04 Aoû 2016, 23:51 | |
| Nombreux sont les journaux qui vantent les progrès faits sur l'île, qu'ils soient technologiques ou communautaire, comparativement à ceux faits sur terre. Aujourd'hui, je pense pouvoir assurer qu'au final, ici aussi, on est profondément stupides. Je travaille depuis maintenant un an en tant que pompier sur l'île, et je ne pensais sincèrement pas que ça se passerait comme ça. Commençons par le commencement. Il a été plutôt compliqué pour moi d'être accepté au sein de cette équipe de soldats du feu, en effet il semblerait que ma tête de brun ténébreux couplé à ma filiation ange-démon-vampire n'était pas le pedigree qu'ils espéraient. Une bestiole aussi mauvaise sur le papier ne pouvait pas vouloir faire le bien. A leurs yeux il me semblait qu'au fond de moi, mon rêve c'était de brûler des grands mères. J'en aurais eu, des raisons de brûler des gens. N'avez vous jamais remarqué que le numéro d'urgence que tout le monde connaît, c'est le 18 ? Pendant trois mois, mon unique rôle a été de rediriger les personnes désespérées et mal en point chez nos confrères de la police et du samu. Vous avez bien lu, j'ai postulé pour être pompier, je me suis retrouvé secrétaire. J'avais fini par me demander si nous notre devoir n'était pas plutôt de les laisser crever, car la sélection naturelle voulait faire son boulot ; supprimer les trois pelés et quatre tondus incapables de retenir trois numéros. Après cette période plutôt désagréable de ma vie (car il a fallut évidemment que Rhéa découvre en même temps les joies de l'ovulation), mes supérieurs ont enfin compris que j'étais capable de garder mon sang froid face aux pires spécimens (car je suis convaincu qu'ils ont tous attendu ma venue dans les services pour se déclarer). Je suis enfin devenu pompier. Un vrai. Et ce fut également la première fois que je remerciais mon père. Les entraînements militaires auxquels j'avais eu droit avaient été la meilleure préparation que je pouvais espérer. Bien évidemment, j'ai du me remettre au sport, mais au final, je crois que c'est le métier qui, pour l'instant, me correspond le plus. En d'autres termes, et là les plus attentifs seront moins perdus, c'est celui qui me les brise le moins.
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Il est 14h30 lorsque je me souviens en urgence qu'aujourd'hui, Wendy a une répétition de danse. Ni elle, ni moi, n'étions au courant, avant que je lise le post-it soigneusement déposé sur le frigo. C'est quand même incroyable cette capacité qu'on les choses de ne plus êtres visibles lorsqu'on a besoin d'elles, alors qu'avant on se dit que même en les décrochant, on s'en souviendra. Je songe sérieusement à mettre mes nouveaux mémos dans les toilettes, j'aurais au moins le temps de les apprendre. Ni une, ni deux, j'embarque numéro trois et démarre la voiture afin de la déposer avec juste vingt minutes en retard. Une fois arrivé, je l'aide à mettre son sac sur le dos, et elle gambade dans l'enceinte du théâtre, absolument pas gênée. C'est incroyable, cette capacité qu'elle a de se foutre de tout. Je crois que c'est de famille. Je m'apprête à remettre les clés sur le compteur lorsque j'entends le bipeur sonner. Comme je n'habite pas à la caserne (il est IMPOSSIBLE que je supporte d'avoir mes sœurs près de mon lieu de travail, j'aurais trop peur que Rhéa se barre avec un camion) j'ai le droit à un magnifique gadget qui sonne dès que l'on a besoin de moi. J'étais sensé être en week-end, mais avec ce métier on apprend vite à décompter nos heures de sommeil plutôt que de travail. J'actionne le moteur et arrive rapidement à la caserne, pour voir un collègue souriant, entouré d'une horde de pompiers, râlant à tout va. A ce moment là, je me rends compte qu'il y a une couille dans le potage. Dans ce brouhaha drogué aux testostérone, j'entends une grosse voix sortir du lot. « QUI est le GROS CON qui s'est ENCORE APPUYE sur le LANCEUR D’ALERTE GENERAL ??? »
Ah.
Il faut se l'avouer, quand on a des muscles et un grand cœur, le cerveau est parfois en reste. Vous ne doutez pas d'un quart de ce qui peut se passer dans une caserne, et je crois que je n'ai pas envie d'en savoir plus. Je soupire avant de repartir, comme on nous l'a demandé, car avec une horde de mâles (et de femelles, je suis pour l'égalité des sexes, je ne dis pas ça sous la contrainte) dans un hangar, c'est plus compliqué pour sortir les camions.
Me voilà donc dans les rues de Skyworld, à me demander ce que je vais bien pouvoir faire de mon après-midi. La répétition de Wendy termine à 18 heure, j'ai donc amplement le temps de me trouver une occupation. Si possible, loin de toutes les filles qui semblent, comme par magie, attirée par mon aura de pompier. Déjà que j'étais pas souvent tranquille, j'ai l'impression qu'aider mamie à se relever quand elle a oublié de boire, c'est encore un aimant à minettes. D'ailleurs, vous ne trouvez pas ça con, vous, qu'on soit obligé de dire aux gens de boire et de se mettre à l'ombre lorsqu'il fait chaud, car sinon ils risquent de mourir ? Car il faut remettre les choses au clair. Pour la plupart des gens, notre travail est héroïque (ce qui doit contribuer à ce succès insensé), mais en réalité nous faisons rarement des missions où nous risquons notre peau. Ca s'apparente plus à du service à la population. En plus clair, on empêche la sélection naturelle de faire son boulot.
Cherchant quoi faire pour ne pas rester assis comme un demeuré toute l'après midi, mon regard est attiré par une masse verte. Je plisse les yeux avant de voir que cette masse a un nom, et qu'accessoirement, je la connaîs bien. Je m'avance d'un pas hâtif avant de me rendre compte qu'elle ne bouge pas. J'espère qu'elle n'est pas morte, ça me rendrait peut-être un peu triste. J'arrive à me déplacer dans la foule qui s'est agglomérée autour d'elle, et lance un « Je suis pompier écartez vous elle a besoin d'air, et certainement pas de vous » peu agréable, mais qui a le mérite d'être clair. Je la mets ensuite en position latérale de sécurité, avant de vérifier qu'elle est bien vivante et qu'elle respire encore. J'attrape sa main et de l'autre j'interpelle une mamie :Vous savez ce qui vient d'arriver ? - Je n'ai pas compris, elle est arrivée d'un coup, on aurait dit un fantôme, comme si elle venait de sortir de cette vitre, elle a eu l'air surprise, puis elle est tombée d'un coup…
Je soupire et viens alors porter ma main libre sur son front écarlate :
« Kaori, faut te réveille, tu es par terre là. »
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