Il n'y a pas que les oiseaux qui ont des ailes

Il faisait beau aujourd'hui. Beaucoup trop beau pour étudier ! Le soleil brillait doucement, chauffant l'herbe où Lanson c'était allongé. Hors de question d'aller d'enfermer dedans par un si beau temps, surtout pour un cours aussi peu intéressant que les interactions primaires. Il était bien mieux ici, à profiter du beau temps, écoutant la brise secouer les arbres proches. L'air était chaud, mais ce petit vent suffisait à rendre ça supportable, c'était même très agréable. Oui, c'était certain, il faisait bien meilleur être ici d'ailleurs. Il avait posé son livre ouvert sur sa poitrine, pour contempler le ciel d'un bleu paisible, ou quelques nuages passait paresseusement. Un peu comme la foule de gens, qui flânait un peu plus loin, dans les chemins tracé du parc. Il aurait put se mettre sur les toits, pour contempler le ciel, mais il se sentait mieux ici. Il étendit sa main, caressant doucement du bout de ses doigts fins l'herbe douce et un peu longue, dont le vert tendre lui évoquait une certaine demoiselle. Il ne l'avait que peu revu depuis ce jour là, pourtant elle l'avait particulièrement marqué, par sa façon d'être, de parler, de sourire … Il la revoyait sur son balcon, fixant l'horizon avec son regard émerveillé … Que faisait-elle en se moment ? Elle avait dit étudier l'art, mais il n'avait pas la moindre idée d'en quoi cela consistait exactement. Lui et l'art, ça n'avait jamais était une grande passion. Pourtant, quand elle en parlait, tout paraissait plus présent, plus … simple. Il voulait la revoir, il n'y avait aucun doute, mais après l'expérience de la dernière fois, il n'était pas sur que sonner directement chez elle soit la meilleur des idées.
Il soupira en fermant les yeux, se concentrant sur les sensations alentour. Le soleil, le vent, le bruit, l'herbe et les oiseaux qui profitaient eux aussi du beau temps pour sortir et s'envoler. Il se sentait partir un peu, une sieste ne serait pas mal non plus, surtout par un temps aussi agréable.Il se laissa aller, percevant à peine le bruit étouffé des pas foulant l'herbe dans sa direction. Pourquoi s'y intéresser, l’importun aller bien voir qu'il était là, et soit il s’arrêterait, soit il irait plus loin.

L'option « il lui rentrerai dedans sans le voir » ne lui avait même pas effleuré l'esprit, ce qui rendit le choc plus perturbant encore.
Il rouvrit instantanément les yeux, pour fixer d'un air plus que surpris la fille qui venait de s'écraser sur lui – ou du moins de s'écraser en trébuchant sur lui. Environ son âge, brune et l'air perdue et paniquée. Elle se redressa un peu, tourna la tête vers moi avant de lâcher un petit cri – digne de la peluche d'Haylei – et se mit à parler vite, très vite :


-Excusez-moi jeune homme je vous ai pas vu, excusez-moi.

Jeune Homme ? Elle avait quel âge pour parler comme ça ? Soit j'avais droit au nouveau modèle de vampire, soit … Nan en fait je sais, sur cette île, il fallait s'attendre à tout, au point qu'on n'a que l'embarras du choix niveau explication. Mais je ne pu pas aller plus loin dans mes réflexions, que déjà la demoiselle s'était relevé, et avait fuit derrière l'arbre le plus proche. Tandis que je la fixais d'un air toujours aussi surpris, et perplexe, appuyé sur mes coudes pour suivre ce qu'il c'était passé en à peine quelques secondes. Ok, normal.
J'hésitais. La demoiselle semblait vouloir fuir, j'aurai très bien pu la laisser faire, et retourner à ma pause soleil, mais cette histoire m'intriguais quand même. Que faire ? Aller la voir, ou la laisser tranquille ? Elle s'était peut être fait mal en tombant, la moindre des choses serait d'aller voir comment elle va.
Comme pour répondre à mon questionnement, deux grandes ailes grises parèrent l'arbre. Il n'y avait aucun doute que qu'elle se trouvait encore derrière. Et qu'elle était pas très douée niveau discrétion. Je soupirai doucement, l'heure de la tranquillité était passée semblerait-il, avant de me mettre sur mes pieds pour m'approcher doucement de l'arbre. En faire le tour pour se mettre face à la demoiselle n'était sans doute pas la meilleur tactique, aussi je gardais un peu de distance, pour lui demander doucement :

" Excusez moi, ça va ? Vous ne vous êtes pas fait mal j'espère ? "

On aurait dit un petit animal prit au piège, acculé, qui ne sait plus quoi faire pour rester en vie.
Il était évident, sans même parler d'utiliser le don d'empathie dont les mages avaient tous hérités, que la jeune fille était totalement terrorisée. Par qui ? Moi ? Il faut bien le dire, je ne suis pas vraiment l'archétype du mec menaçant, que ce soit par mon visage ou par ma stature. Alors quoi ? Était-ce la peur des (ou de certaines) habitant de l'île en général – peur qui pouvait se comprendre vu ce sur quoi on peut tomber ici – ou juste des gens sans distinction ? En tout cas, cette histoire la paniquait complètement.

-Oui, je suis tombé assez bien, ma poitrine a amortit beaucoup la chute. Vous n'aviez pas besoin de vous préoccuper de ma personne.

Encore une fois, je trouvais sa façon de parler bizarre … non, drôle peut être ? Ou juste intéressante.
La demoiselle se mordit la lèvre, troublée intérieurement, et replongea ses yeux dans les miens. Elle était peut être craintive, mais curieuse aussi, sinon, elle aurait déjà décampé depuis longtemps. Un mouvement derrière elle me fit lâcher ses yeux bleus, pour remarquer le frémissement de ses ailes, qui tentaient un léger mouvement. Magnifique. J'ai peu d'anges parmi mes connaissances, si on oublie Judith, qu'on pourrait difficilement qualifier d'angélique et dont je n'ai d'ailleurs jamais vu les ailes, si elle en a. Et à chaque fois, je ne peux qu'admirer la qualité de ces larges plumes, propres à chaque personne, dont la couleur et la taille, la forme et les détails changent selon chacun.
Et puis je vis les plumes frémir, encore. Tout comme la demoiselle qui en fait tremblait légèrement. J'avais presque oublié la situation dans laquelle nous nous trouvions ….

-C'est tout même gentil de vous avoir déplacer pour voir si je n'avais rien, beaucoup aurait rien fait, c'est surtout moi qui doit m'excuser. Je me suis tout même pris les pieds dans les vôtres, ce n'était guerre mon intention, j'aurai pu vous blesser et vous auriez pu me punir.

Elle avait un problème avec les gens en général. Définitivement. Comment peut-on en arriver à ce point là ?

" Loin de moi cette intention ! Je ne vous en veut pas le moins du monde."

Que dire de plus ? Il était clair que la demoiselle attendait que je m'en aille, mais la laisser seul au milieu d'un parc plein de monde était-il la meilleur des idées ? Elle devait bien avoir des amis quelque part, et rester cacher derrière un arbre n'allait pas l'aider à les retrouver. Du moins, si elle avait réussit à se faire des amis quelques part. Un nouveau frémissement fit s'étendre les ailes un peu plus ce qui fit naître sur mon visage un petit sourire alors que je me risquais un petit regard vers les branches de l'arbre qui nous offraient un petit coin d'ombre.

" Vous savez, si vous vous envolez ici, vous risquez de vous prendre une de ses branches en pleine tête ... "

La remarque était partie toute seule. Sans méchanceté aucune, bien entendu, ni moqueuse d'ailleurs. Juste l'habitude. Mauvaise habitude ou non, ce n'était pas le lieu pour en disserter.

Je la sentait se détendre. Un peu, juste un peu. Bien sur, elle était toujours plus que nerveuse, mais c'était déjà une amélioration. Mieux encore, la remarque que je fis, et que un instant je regrettais, de peur qu'elle ne le prenne mal, ne sembla pas la déranger. Ouf.

-Oui, vous avez raison, je dois m'exercer au vol, avoir l'habitude de sortir mes ailes grises. Je suis désolé, merci de votre avertissement. J'irai m'exercer quand il y aura moins de monde. Oui, ça m'as l'air d'une bonne idée. Il ne faudrait pas que quelqu'un en profite pour me blesser pendant que je vole.

Hum, oui bon, peut être moins nerveuse, mais toujours paranoïaque. Des centaines de personnes volaient continuellement dans cette ville, sous forme humaine ou animale, avec ou sans elle, dans des lieux publiques ou loin des regards. Ce n'était pas chose rare, et ça ne dérangeait personne, généralement. Il arrivait bien sur quelques accident parfois, mais pas plus que dans un trafic terrestre. C'était même un peu ridicule, même si les blessures dues aux chutes étaient à redouter … si on avait pas comme la plupart des habitants de l'île une constitution à toute épreuve. Oui, le genre de caractéristique dont je n'avais vraisemblablement pas hérité, malheureusement.

Je vis l'attention de la demoiselle se perdre dans son plumage, qu'elle porta jusqu'à sa main. La sensation devait être agréable, car elle lâcha un petit rire, avant de se souvenir de ma présence et de revenir en position « j'essaye de rentrer dans l'arbre ». Peine perdu d'ailleurs vu sa taille, plus grande que la moyenne. J'étais prêt à renoncer, quand elle planta ses yeux dans les miens, l'air soudain un peu plus sur d'elle.

-Puis-je faire quelque chose pour vous aider ? Mon nom est Freya, je vis avec la troupe du cirque, n'hésitez pas à venir nous voir. La représentation est un spectacle à voir.

Elle sourit doucement. Le cirque ? Pour quelqu'un d'aussi timide, c'était quelque chose d'étonnant. Je n'étais aller que rarement voir des cirques, peut être une ou deux fois dans mon enfance, pas plus. Ce n'était pas vraiment quelque chose qui me passionnait, je doit bien l'avouer. Mais peut être que … Oui, peut être que Haylei pourrait être intéressée ? Qui sait. Il faudra que je lui en parle, si jamais …

-Puis-je avoir votre nom, noble étranger, il sera plus aisé de parler, enfin je crois.

Complètement absorbé par mes pensées, j'avais à mon tour oublié que nous étions deux. La jeune fille, Freya, c'était encore un peu détendu, et elle souhaitait même engager la conversation maintenant. Ça c'est de l'avancé ! Je lui rendis un sourire détendu

" Je m'appelle Lanson, enchanté. "

La tension presque douloureuse qui régnait il y a peu c'était en partie dissipée, et ce n'était pas plus mal. Une idée me traversa vaguement l'esprit alors que j'admirai de nouveau les ailes de l'ange. Pourquoi pas ?

" Si vous voulez, je connais quelques endroit assez calme … Une petite pause avant d'ajouter, en désignant les ailes d'un léger mouvement de tête : Pour vous entraîner à voler. "

Ce n'était qu'une proposition comme une autre, rien de plus, elle était plus que libre d'accepter ou pas. Après tout, même si je souhaitais l'aider, ce n'était pas vraiment mes affaires. Elle pouvait dire non, elle pouvait partir, et je retournerai à ma sieste tranquille. Ou alors elle pouvait dire oui, et j'irai me caler dans un endroit encore plus calme. Aucun des deux calculs n'était plus mauvais que l'autre au final.

Et puis, sans aucun rapport, une question stupide à laquelle ne n'avait pas de réponse se mit à tourner autour de moi. C'était pas bientôt finit oui, ces idées éclaires ?

" Au fait … Où le cirque c'est-il établit ? Je suppose que s'installer directement en ville n'est pas forcément le plus pratique, si ? "

Elle souriait. Un peu, pas beaucoup, mais c'était déjà pas mal. Était-ce l'idée d'un endroit bien plus calme qui lui plaisait ? Sûrement, c'était le plus probable. Même si tout son être vibrait encore d'une peur profonde qui ne semblait pas bouloir partir. Mais je suppose que je ne pouvait plus rien y faire. J'avais essayé, ça ne marchait pas, tan pis. Alors j'ai abordé le sujet du cirque, le sujet où elle semblait le plus à l'aise, et son sourire c'est encore un peu agrandit.

-On est pas loin de la ville pour le moment, mais on reste jamais longtemps à un endroit, c'est comme cela que fonctionne la troupe. Pour l'endroit pour s’envoler, je veux bien, mais si ce dernier fille les jetons, je prends mes jambes à mon cou et vous me verrez plus.

Elle avait changé de sujet si rapidement que je ne m'y étais pas attendu. D'ailleurs, je ne pensais même pas qu'elle aller répondre à ma première question. Pourtant, elle l'avait fait, et d'un ton très sérieux en plus. Je sais pas pourquoi, mais je trouvais ça drôle. Bon, tout de même, je me retenais de rire, me contentant d'un sourire amusé à peine dissimulé.
Elle remit en place un mèche qui semblait vraiment ne pas vouloir tenir, avant de continuer comme si de rien n'était :

-En pleine ville, on manquerait sûrement de place, les roulottes seraient les unes sur les autres, les animaux ne serait pas à l'aise dans leur cage, les espaces restreins changent les gens.

J'étais d'un coté étonné de cette réponse, et de l'autre elle ne me surprend guère. Je comprenais fort bien la logique de la demoiselle, mais j'avais toujours crut que les gens du cirques était du genre à rester entre eux, toujours coller les uns aux autres, pire qu'une famille. Et je ne pensais pas que le manque d'espace pouvait alors les gêner. Comme quoi.
Je hoche donc la tête, pour lui faire savoir que je comprenais, avant de récupérer mon sac, resté là où je dormais, en y rangeant mon livre abandonné dans l'herbe. Une fois le tout emballé et balancé sur mon épaule d'un mouvement souple, je me retourne vers la demoiselle :

" Vous venez ? Pour voler. C'est vraiment pas très loin. "

En fait, on pourrait presque dire que c'était à coté, puisque le lieu en question était dans le parc. Un petit coin où presque personne ne va, parce qu'il est loin du sentier et qu'il faut passer sous des arbres bas pour y accéder. Mais une fois dedans, on s'y sent vraiment tranquille, loin du bruit et des gens grâce aux murs de végétaux. J'y guide tranquillement la demoiselle, passant par le chemin le plus pratique -même si ce n'est pas forcément le plus rapide- pour arriver dans ce coin hors du temps. Un délice. Et aujourd'hui, il n'y a personne, n'y artiste, ni poète, ni autres personne dans le même genre qui peuvent parfois venir ici. Je fais quelques pas pour laisser à Freya le temps d'observer autour d'elle, avant de me retourner, les bras grand ouvert pour désigner l'ensemble :

" Pas mal, hein ? Voici le coin le plus tranquille de toute la ville !"

Ouais, j'ai un petit coté théâtral, mais je le vis plutôt bien.

Je le savais, cet endroit lui plaisait. En fait, je ne vois pas quelle personne normale pourrait détester cet endroit, mais il y a toujours des gens plus sensible que d'autres aux charmes de cette clairière. Je vis ses ailes frémir un instant, elle avait envie de se lancer, au plus profond d'elle même. C'est normal après tout, beaucoup de gens rêve de glisser dans les courant aériens, voir le monde d'en haut, se sentir libre … Mais le doute est toujours présent, je le sens, et sur ce point je ne suis pas sur de pouvoir l'aider …

-Et si je m'écrase au sol et que je me fais mal ? Non, ne pas avoir peur Freya, Amel disait que si j'avais les ailes c'est pour voler, mais les pingouins volent pas, comme le dit Iorek.

Elle n'avait donc vraiment jamais décollé ? C'est triste, d'une certaine manière. Bon, bien sur, je ne suis pas le mieux placé pour parler, je n'ai pas d'ailes, ni le pouvoir de léviter. Mais le vertige n'était pas non plus quelque chose de familier, et heureusement, vu le temps que je passe sur les toits.
Mais pour elle, c'est sans doute une expérience hors du commun, qui semble même lui faire un peu peur. Elle hésite, tout son être crie qu'elle ne sait pas quoi faire. Finalement, en quelques mouvement d'ailes, elle finit par décoller. Quelques centimètres à peine, cela peut suffire pour décider ou non si l'on veut continuer. Pour elle, cela fut vite fait, elle retrouva presque immédiatement le sol.
N'importe quel mage passant par là aurait alors pu sentir le mélange de joie et de peur qui se noyait dans son être. Une vraie boule de stress, comment fait-elle pour survivre plus d'une journée ? Impensable. Le seul moment où j'ai pu à ce point hésiter dernièrement, c'était face à la famille de Haylei. Parce qu'entre passer du temps avec elle, et devoir du coup faire face à cette bande de gens au cheveux vert … Je ne sais ce qui l'emporte. Mais bon, faut bien l'avouer, dans leur cas j'ai une bonne excuse. Quand il s'agit de Haylei, ils font très très très peur.
J'aurai pu rester longtemps, appuyé contre mon arbre, à partir dans mes pensées, mais Freya m'en fit sortir rapidement.

-Je pourrai voler plus haut, j'ai peur, faut que je m'y habitue, merci monsieur, grâce à vous j'ai moins peur de voler, c'est super gentil à vous. Vous êtes un homme très gentil.

… Deux choses : Le « monsieur » me fait prendre un sacré coup de vieux, et le « j'ai peur » mais « j'ai moins peur de voler », c'est assez contradictoire … Bon, oui, cette fille est contradictoire. Mais voilà !
M'enfin, l'important, c'est qu'elle sourit encore, c'est rassurant. Plus encore, elle réessaya de décoller, plus haut cette fois, et lorsque la peur prit le dessus à nouveau, je réussis à y discerner également un nouveau sentiment : de la curiosité. Et ça me fit sourire à mon tour.

"Je suis content d'avoir pu être utile, n'hésite pas à revenir, il y a généralement peu de personne par ici. Et ne t'en fais pas si tu as peur pour le moment, c'est nouveau pour toi je suppose."

J'avais dit tout ça en m'allongeant, mon livre dans une main, mon autre bras sous ma nuque, prêt à profiter de nouveau de mon après midi volée. Je ne pouvais plus vraiment aider la demoiselle, si elle souhaitait continuer à tenter de voler, libre à elle. Pour ma part, mes lectures m'appellaient.