adriel ; shama ∞ ¿ y si hacemos un muñeco ? no, no creo.

"J’m’ennuie".
La déclaration de mon affilié m’arracha un soupir. Il avait un caractère de cochon de nature, mais quand il s’emmerdait… alors là il était invivable. Parce qu’il cherchait de nouveaux centres d’intérêts, qui curieusement se limitaient à « que vais-je cramer aujourd’hui ? » Certes je maîtrisais le feu mais j’en avais ras le bol de lui courir après pour éteindre les éventuels incendies qu’il semait derrière lui dans cet état d’esprit.

- Tu veux qu’on sorte ? Qu’on aille se promener ?

Il haussa les épaules dans un geste très humain. Perché sur la fenêtre grande ouverte, il fixait d’un œil morne la circulation des habitants de Skyworld. "Nan. Trop relou." Je levai les yeux au ciel. C’était bien un ado, ce Blaze ! Je jetai un œil à l’heure. C’était mon jour de travail, il était bientôt 11h. J’allais devoir y aller. Mais je ne pouvais pas laisser Blaze sans surveillance, sait-on jamais. Je décidai donc de l’emmener avec moi au boulot. Peut-être qu’il trouverait des rats à martyriser, avec un peu de chance. "J’vais me faire chier, moi, là-bas" Je lui lançai un regard réprobateur qui ne souffrait aucune réplique.

- Arrête de faire ta mauvaise tête. Tu viens, un point c’est tout.

Il s’envola de mauvaise grâce tandis que je fermai la fenêtre avant de quitter l’appart’. Ce petit dragon me faisait parfois tourner en bourrique, mais je l’adorais plus que tout. Et puis je devais avouer que nous nous ressemblions beaucoup, lui et moi. Moi aussi j’avais mauvais caractère, mais j’étais quand même plus raisonnable que lui. Je pris le chemin du travail les mains dans les poches de mon short en jean. Heureusement que mon patron ne m’imposait pas de tenue de travail, j’avais horreur de ça. Tout ce qui l’intéressait, c’était que j’attire les clients –chose aisée, vue mon physique de bombasse- et que je fasse rentrer l’argent dans les caisses. Mais je devais parfois me contrôler pour éviter de casser le bras de ceux qui osaient me mettre une main au cul. En général, je me contentais de les brûler légèrement dès qu’il me touchait. Quand j’étais de bonne humeur. Le patron me sermonnait souvent là-dessus, mais vu que je bossais relativement bien, ça n’allait pas plus loin. J’avais appris à me maîtriser, depuis que j’avais été virée de mon boulot précédent, parce que j’avais failli envoyer un client à l’hôpital. L’avait qu’à pas toucher à ma poitrine.

La journée se déroula sans encombre. Je fus agréablement surprise de voir Blaze se tenir tranquille. Il y eut pas mal de clients, et cela mit le patron de bonne humeur. Tant mieux, j’avais peut-être une chance d’avoir un bonus. Mais nan. Ce vieux radin trouvait que j’étais trop abrupte avec les hommes qui me relookaient de trop près. Des flammes apparurent dans mes prunelles, mais le vieux crouton  ne se laissait plus impressionner. Je serrai les points et sortis du café, en espérant qu’il ne m’appellerait pas en début de soirée pour que je fasse des heures sup’. Il était presque 17h.

- Viens Blaze, on va à la taverne. J’ai besoin de prendre l’air et de me changer les idées.

Mon dragon doré me suivit sans rechigner, ce qui me mit sur mes gardes. En général, quand il était calme comme ça pendant toute une journée, il n’en loupait pas une le soir. Alors je me méfiais. Il était capable de changer d’humeur d’une seconde à l’autre, et le savoir si paisible alors qu’il affirmait s’ennuyer le matin même ne me plaisait pas des masses. Je me dirigeai vers les ruelles sombres de la capitale de l’île, plongée dans mes pensées, lorsque j’aperçus du coin de l’œil un éclair doré. Je relevai la tête, surprise. Blaze fonçait droit devant lui, pour quelle raison, allez savoir.

-Blaze, reviens ici ! Qu’est-c’ tu fous ?

Je lui courus après, pressentant une catastrophe. "J’ai vu une proie !" Mon affilié galopait, à moitié en train de voler. La rue étroite ne lui permettait pas de se mouvoir avec aisance en plein vol, mais il battait des ailes pour augmenter sa vitesse de course. "Tu vas faire une connerie, bordel. Tiens ton feu !" Trop tard. Il visait je ne savais pas quoi, mais je vis loin devant un jeune homme qui semblait effrayé par le comportement de Blaze. Il n’avait pas à s’inquiéter, mon dragon ne s’en prenait jamais aux habitants sans une bonne raison. Une douleur sourde naquit dans mon corps. Mon cri s’étouffa dans ma gorge. Ce salopard lui avait donné un coup de pied ! Nan mais il était malade ou quoi ? Des flammes dans les yeux, je lui fonçai dessus. Il me dit quelque chose, mais je ne l’entendis qu’à moitié.

- Nan mais t’es taré !! pourquoi tu l’as frappé ?! lui hurlai-je dessus.

Je me penchai sur Blaze qui sifflait et gémissait, groggy. Le coup de pied de ce démon l’avait propulsé contre un mur et il avait mal partout. Je lui murmurai des mots de réconfort en l’aidant à se remettre sur ses quatre pattes. Je me redressai vivement pour faire face au cinglé et pointai sur lui un doigt menaçant.

- La prochaine fois que tu l’touche, j’te fais bouffer tes couilles, c’est clair ?

Ce salopard était bien un démon, pas de doute. Con, détestable, et rien dans le ciboulot. Pour toute réponse, il se contenta de critiquer ma poitrine. En l’écoutant, je croisai mes bras et haussai un sourcil. Sérieusement, c’est tout ce qu’il avait trouvé ? il avait un pois chiche à la place du cerveau ou quoi ? C’était bien un mec pour penser comme ça. Je détaillai un instant sa tronche de cake, ses cheveux noirs en bataille et ses yeux gris délavés. Franchement inintéressant. J’étais nullement impressionnée, ni énervée par sa remarque. Juste blasée. Je le regardais avec un sourire narquois. Il pensait vraiment me provoquer, toucher un point sensible ? J’étais habituée à ce genre de remarque, autant de la part des hommes que de la part des femmes, et ce n’est certainement pas aujourd’hui que j’allais répondre à ce genre de provocation sans queue ni tête.

- C’est tout ce que t’as trouvé, Ducon ? Mais je suis d’accord sur un point. J’vois pas comment j’vais t’faire bouffer tes couilles, t’en as pas.

Il voulait jouer à ce jeu ? OK. J’adorais faire mes règlements de compte à OK chorale. Mais franchement, j’avais pas envie de perdre mon temps avec un sale con qui pense qu’à pourrir son monde. Certes, j’étais moi aussi une démone, mais je passais pas mon temps à emmerder les autres non plus. Disons que j’en avais le caractère bien trempé, et que ceux qui voulaient me marcher sur les pieds se rendaient compte trop tard que les dits pieds étaient franchement brûlants et récalcitrants. Et avaient tendance à quitter le sol pour les frapper en pleine face. En tout cas, je voyais sur son visage que je l’avais énervé. Mais franchement, il pensait à quoi ? Que j’allais le laisser frapper mon affilié sans rien dire ? C’est bien ce que je pensais, rien dans le ciboulot. Un mec.

- J’ai pas de temps à perdre avec des tronches de cake comme toi.

Je me détournai, m’apprêtant à prendre Blaze dans mes bras et à rentrer à la maison –et tant pis pour la taverne- lorsque j’entendis sa réplique. Je m’immobilisai, dos à lui. Okay. Là, il avait franchis la ligne. Sans d’autre cérémonie, je me retournai vivement et lui foutus mon poing dans sa sale gueule. Il ne fallait jamais aborder le sujet de ma parenté. Entre une mère portée disparue, supposée morte, et un père divin éternellement absent, c’était assez délicat. Si, j’avais appris les bonnes manières avec ma mère, une démone aveugle, il y avait plus de 13 ans. Mais plusieurs années passées dans les rues les avaient remises en question. Car sa sert à rien pour survivre.

- Ferme ta gueule. Tu sais rien. Et en parlant de merde, ça doit pas être facile d’en avoir tous les jours dans la bouche, hein Ducon ? Garde la pour toi, p’tit merdeux. Fais un peu fonctionner ton pois chiche. Tu penses quoi ? Que t’as le droit de frapper mon affilié comme bon te semble ? Que j’allais dire pardon, alors que c’est toi qui l’as attaqué ?

Blaze commençait à se remettre du contre-coup. Le pauvre n’avait rien compris de ce qui lui arrivait. Il poursuivait une petite proie –enfin, selon lui-, certes il avait un peu craché du feu, mais jamais il n’avait visé le con en face de moi. Mon dragon avait mauvais caractère, mais il ne ferait jamais volontairement un truc qui me ferait du tort. Et puis je lui avais appris dès le début que les habitants n’étaient pas des proies, ni des ennemis. Il continuait de grogner et de siffler sur certains passants, mais sans plus. Il n’attaquait jamais. Je secouai la tête de droite à gauche, l’air dégoûté. Mais pourquoi ce putain de monde n’était peuplé que de putains de connards comme lui ? J’en avais marre des mecs comme lui. Des bouseux, des fouteurs de merde. Il devait vraiment se faire chier à mort.

- T’as que ça à foutre, hein ? Pff. T’es pathétique.

Je l’avais dit d’un ton méprisant. C’est vrai quoi, les mecs qui cherchent la merde, c’est qu’ils en ont pas assez, ou pas eu assez, pour s’en contenter. Un mec écœurant comme je les détestais, qui n’utilisait jamais son cerveau –s’il en avait un. Le mec qui avait vécu une enfance paisible, qui n’avait jamais eu à trimer, à courir pour sauver sa vie, à voler pour se nourrir, à subir la moquerie des autres à cause de sa couleur de cheveux, à être désigné du doigt, à être poursuivis pendant des années par des poulets en mal d’action.