univers déchiré // adriel

Le silence dévorait la pièce depuis plusieurs minutes déjà, et même si ses conseillers avaient perdu la notion du temps depuis bien des années, ils semblaient perdre patience, à attendre une réponse de leur roi. Aucun d'entre eux n'avait pourtant osé perturber le calme plat qui régnait autour de la table. Pas le moindre mot, pas le moindre son, la seule brise que l'on pouvait entendre était celle qui passait outre les lèvres du seul mortel invité, Adriel.

Puis enfin, Hadès se leva de son siège, dans un mouvement rapide et ferme, avant de tourner le dos à la petite assemblée qu'il avait l'habitude de réunir, au moins une fois par lune. Et en passant ses doigts sur l'arête de son nez, Hadès se décida enfin à prononcer le premier mot depuis ce qui avait semblé une heure, libérant la tension palpable de leur réunion.

« — Vous pouvez tous disposer. J'ai besoin de réfléchir. »

En se retournant, il adressa un regard à son épouse qui s'éloignait aussi, s'égarant quelques secondes dans des pensées trop tendres pour son esprit trop acide. Puis le froid – encore – et sa voix éclata en un écho grave.

« — Toi, Adriel, tu restes. »

Et avant qu'il ne quitte la pièce, il s'arrêta. La porte se referma. Hadès engagea un pas vers lui, puis un autre, dans une lenteur lourde qui lui seyait bien. En observant les murs et les formes difformes de l'architecture, il eut comme un sentiment de lassitude. Quelques pensées lui murmurèrent que l'endroit était toujours plus morne sans les couleurs de Perséphone, et après tout, elle venait de quitter la pièce.

Il s'arrêta à plusieurs mètres de son oracle, le regard vagabond s'échouant finalement sur lui. Et la sentence fut brève.

« — J'ai vu. »

Le silence était une bien meilleure arme que les mots, pour le maître des morts. Il y avait eu un regard de trop entre son oracle et son épouse – et ce regard fut le seul traître. Hadès était un Dieu minutieux, observateur, calculateur. Le traître ne lui avait pas échappé.

« — J'espère qu'elle ne t'a pas demandé de m'assassiner, je me verrais fort embêté. »

C'était sa manière à lui de plaisanter, et ça n'avait même pas eu le mérite de détendre l'atmosphère. Si au moins un rictus – une pauvre esquisse – s'était dessinée au coin de ses lèvres : mais rien. Pas la moindre once de chaleur ne se dégageait de lui. Pourtant, Hadès n'était pas en colère.

« — Que s'est-il passé entre toi et elle? »